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Conseil national de la Résistance : l’envers du décor


Le programme du Conseil national de la Résistance (CNR), dont c'est le 70e anniversaire, est régulièrement évoqué comme modèle à suivre, en opposition à la politique actuelle.
 
Il est vrai que « l’intensification de la production nationale selon les lignes d’un plan arrêté par l’État (…) ; le retour à la nation des grands moyens de production monopolisée, fruits du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurances et des grandes banques » (…) et surtout l'instauration d’un « plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État » sont des mesures contradictoires avec la politique libérale actuelle. Et nous avons raison de répéter que s’il a été possible de mettre en place la Sécu dans un pays dévasté par la guerre, on peut faire bien plus aujourd’hui. Mais cela ne doit pas nous transformer en inconditionnels du CNR.


Les capitalistes étaient inquiets de voir se répéter à la fin de la Seconde Guerre mondiale la vague révolutionnaire qui avait secoué l’Europe entre 1917 et 1923. En France, à part quelques personnages secondaires, tous les représentants de la droite ont soutenu les nazis ou le régime de Vichy. Les entreprises d’importance et tout l’appareil d’État ont « collaboré », seul un préfet, Jean Moulin, ayant refusé de servir. Même si tous ces gens ont commencé à jouer double jeu quand ils se sont aperçus que la défaite nazie approchait, cela ne suffisait pas aux résistants des milieux populaires qui aspiraient à se débarrasser des « collaborateurs » et à mettre en place une autre société. Ils avaient raison ! Et l’exemple (1) de la proposition du Comité des Forges (l’ancêtre du Medef), faite à un mouvement de résistance, de plusieurs dizaines de millions et 500 automitrailleuses, pour qu’il fournisse 20 000 hommes acceptant de participer à la lutte préventive contre le communisme, montrent qu’eux aussi se préparaient.

L'État remis sur pied
 
De Gaulle chercha donc à contrôler les résistants organisés par le PCF en constituant une structure d’unité nationale. Il fonde le CNR le 27 mai 1943. Il regroupe les huit mouvements de résistance, les deux centrales syndicales (CGT et CFTC) et les six principaux partis de la IIIe République, le PCF, la SFIO (PS), les radicaux et trois petits partis de droite. Le programme, adopté le 15 mars 1944, validait le gouvernement de De Gaulle, préparait la réinstallation d’un État et reprenait les propositions socio-économiques des socialistes, soutenues par les milieux de droite chrétiens sociaux. Le PCF l’appliqua en acceptant fin 1944 la dissolution des milices patriotiques, contre pouvoirs réels, au motif qu’il ne faut qu’un seul État, une seule police, une seule armée, et en combattant les grèves des mineurs : « Produire, c'est aujourd'hui la forme la plus élevée du devoir de classe »…


Les réformes du CNR ne sont pas spécifiques à la France, contrairement à ce que notamment le PCF voudrait faire croire. Les mêmes nationalisations (de 20 à 25 % de l’économie) vont être faites en Grande-Bretagne, en Autriche, et des systèmes de sécurité sociale vont être instaurés à cette époque dans presque toute l’Europe. Alors oui, on peut mettre en cause la pertinence de ce modèle d’union nationale, qui a été un frein aux mobilisations qui auraient pu remettre en cause le pouvoir des capitalistes à la fin de la Seconde Guerre mondiale.


Patrick Le Moal


1. Grégoire Madjarian, Conflits, pouvoirs et société à la Libération, 1980, 10/18


L'article sur le site national du NPA 

Pour démêler les fils d'une histoire lourde de conséquences, celle de la Seconde Guerre mondiale et de la Libération : Le PCF pendant la seconde guerre mondiale et à la Libération

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