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Ca bouge à La Poste !


A La Poste de l’Hérault les grèves se succèdent depuis septembre
(La Marseillaise 06/06/2012) 

Des grèves tournantes affectent les plates-formes de distribution du courrier depuis des mois dans l’Hérault. En cause, charge de travail et sanctions disciplinaires.photo illus RT
photo illus RT
Des grèves tournantes affectent les plates-formes de distribution du courrier depuis des mois dans l’Hérault. En cause, charge de travail et sanctions disciplinaires.

A la Poste de l’Hérault, la situation est explosive, Les grèves se succèdent depuis septembre. Et les postiers espèrent qu’au moins le changement portera sur le social. En écoutant les postiers raconter leur vie au travail, on ne peut pas croire que leur entreprise est détenue à 100% par un seul actionnaire : l’Etat. Les salariés eux-mêmes ne savent pas répondre sur le sujet. Ils se souviennent juste que leur entreprise a été transformée en société anonyme et que bien avant encore leurs usagers étaient devenus des clients. Ce qu’ils savent fort bien par contre, c’est que tout a changé dans leur manière de travailler et dans le service qu’ils rendent.
« On est effarés de voir que les gens reçoivent en même temps deux ou trois jours de courrier et deux ou trois journaux à la fois », s’indigne Guillaume, un postier héraultais, membre du CHSCT*, qui enquête à ce titre sur la plate-forme de Saint-Jean-de-Védas. Du coup, l’usager est mécontent et s’en prend au facteur... qui n’en peut mais.
En cause, selon Bruno Gagne, responsable du syndicat CGT héraultais, les réorganisations à marche forcée avec une « forte tension managériale ». « Les réorganisations visent à supprimer des postes, détaille Guillaume. Mais elles sont préparées de façon déloyale, arbitraire et incohérente. » En gros, le temps de travail prévu sur une tournée est trop court. « Cela génère du travail dissimulé », proteste Bruno Gagne. Entendez du travail gratuit pour terminer la tournée... ou des sanctions si le préposé revient avec du courrier. C’est arrivé à Christelle de Capestang, mise à pied pour avoir ramené quelques publicités qu’elle n’avait pas eu le temps de distribuer et dont la mise à pied a été suspendue grâce à la solidarité de ses collègues.
Chez Médiapost, filiale de la Poste qui emploie 120 salariés sur les deux plates-formes de tri héraultaises, ce système, appelé « préquantification », est exploité de manière plus radicale encore. « Notre entreprise est à l’image de ce qui va se passer à la Poste dans les années qui viennent si rien ne change », estime Lucky. Exemple : un secteur de 12 kilomètres au sud de Montpellier où le salarié doit s’arrêter pour mettre des publicités dans toutes les boîtes aux lettres doit être parcouru en 1h40... Impossible évidemment. « Comme l’entreprise emploie beaucoup de retraités et des personnes en grande difficulté qui se contentent de 300 ou 400 euros, elles se taisent... » Et travaillent bien après l’heure sans espérer grand chose du changement de gouvernement.
Il n’en est pas de même pour Lucky qui a alerté à maintes reprises l’Inspection du travail, mais sait que les dossiers qu’a reçus le Procureur sont « enterrés »... Il dit aussi que l’arrêté permettant la préquantification du travail a été annulé il y a deux mois et demi... sans aucune influence sur leur travail quotidien. Lucky attend au moins de la victoire de la gauche, « le respect de la loi et du code du travail ».
A la maison mère, les salariés sont un peu moins désabusés. Ils savent pourtant qu’il faut que les choses changent. D’autant que la situation est explosive. Dans l’Hérault et ailleurs. Une jeune femme a tenté de se suicider vendredi à la Poste des docks à Marseille. En Bretagne, un postier s’était tué quelques jours plus tôt... Et c’est au moment où un de leurs collègues a essayé de se défenestrer, qu’un long mouvement a commencé dans les hauts cantons de l’Hérault à Bédarieux.
C’était en septembre. Depuis, presque tous les samedis, c’est grève à la Poste... et quand ça se tasse dans un endroit, ça repart dans un autre. « La surcharge de travail était tellement forte à Agde, qu’un jour plus de la moitié des salariés sont sortis en faisant jouer leur droit de retrait », rapporte Bruno Gagne. « Ils ont considéré que l’organisation du travail non négociée mettait en péril leur santé physique et psychique. » Une première en France dont la légalité est contestée mais qui a été motivée par les suicides, les accidents du travail et l’absentéisme en hausse. Ainsi cet agent de Pignan, 29 ans d’ancienneté sans aucun accident du travail et puis trois d’un coup. « Un jour, il s’est révolté, il a pété les plombs... et a été mis à pied. »
Les procédures disciplinaires augmentent aussi. A Bédarieux, la Poste a porté plainte contre plusieurs syndicalistes pour « menaces physiques et verbales avec séquestration ». Ils risquaient gros pour des faits qu’ils niaient. Bruno Gagne qui faisait partie du lot vient juste d’apprendre que l’affaire est classée sans suite.
Il a cependant écrit aux nouveaux ministres de la Justice et du Travail. « La Poste ne peut pas être au-dessus des lois », insiste-t-il. C’est un minimum qu’il attend du gouvernement et de l’Assemblée qui sortiront des législatives.
Lucky et ses camarades de Médiapost ont demandé audience au ministère du Travail sur le même thème. Quant à Guillaume, il espère dans le changement mais il croit surtout que « ça ne changera qu’avec le rapport de forces ».
Témoignages Annie Menras

*Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

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