Ce "prestataire" ami de Marine Le Pen qui fait affaire avec la Syrie…
(Midi-Libre)
Bien que resté secret pendant le campagne, l'épisode a bien fini par éclater. Frédéric Chatillon, 44 ans, "prestataire" de la
campagne présidentielle et ami de longue date de Marine Le Pen, a
fait l'objet, entre janvier 2011 et avril 2012, d'une enquête de la
brigade financière, n'ayant abouti sur aucune poursuite judiciaire.
Motif de l'investigation : les affaires liant la société de
communication de Chatillon au régime syrien.
Mediapart explique que cette enquête est "partie d’un signalement
Tracfin, service anti-blanchiment de Bercy". Elle visait "une galaxie de
sociétés de communication et de sécurité", gravitant pour la plupart
autour de Riwal (présidée par Frédéric Chatillon), et de Vendôme
Sécurité (dirigée par Axel Lousteau, également prestataire du FN). Riwal
possède également d'autres clients proches du Front National. Brigitte
Bardot, qui a soutenu la candidature de Marine Le Pen, lui a notamment
confié plusieurs campagne de communication.
Plusieurs prestations pendant la campagne présidentielle
Ces deux sociétés sont souvent intervenues pendant la campagne du FN :
selon Mediapart, Riwal a réalisé "les sites de la candidate, les
applications multimédias pour les smartphones, et le tirage des tracts
et programme de la campagne", tandis que Vendôme a loué des agents de
sécurité, "jusqu’à deux cents hommes, pour certaines manifestations en
renfort du service d’ordre militant". Selon Chatillon, les contrats se
monteraient à "quelques centaines de milliers d’euros".
Les relations de Riwal avec la Syrie représentent également de coquettes
sommes d'argent, "entre 100 000 et 150 000 euros par an". La société
est en affaires avec l'ambassade de Syrie à Pari, via le compte au
Crédit Lyonnais de cette dernière. Concernant le motif de ces contrats,
la société évoque, selon Mediapart, "des opérations de communication et
de marketing concernaient le ministère syrien du tourisme et la
promotion du pays".
Un bureau ouvert à Damas
Mais le site rappelle que Chatillon a "notamment organisé la visite du
ministre du tourisme, Saadallah Agha al-Qalaa, à Paris, en 2008", et
ouvert un bureau à Damas, Riwal Syria, pour démarcher sociétés et institutions syriennes.
Selon Chatillon, ces contrats ne revêtent pas de "dimension politique",
et présentent même un certain risque commercial, car le régime ne verse
pas d'acompte. Chatillon avoue même avoir craint être "planté" par la
Syrie en 2010, à cause d'un paiement arrivé en retard. Le chef
d'entreprise affirme avoir des "amis des deux côtés" du régime syrien,
mais il a parrainé l'an dernier le site internet InfoSyrie, proche du
régime.
"Vieux pote de faculté" ou simple "fournisseur" ?
S'il n'est pas encarté au FN, Frédéric Chatillon n'en demeure pas moins
très proche du parti d'extrême droite. Se considérant comme "vieux potes
de faculté" avec Marine Le Pen, considère les réseaux néo-fascistes
comme ses "anciens alter ego", et a été l'ancien chef du GUD (Groupe
Union Défense), un syndicat étudiant d'extrême droite aux activités
violentes. Il a aussi organisé la tournée à Damas de l'humoriste
Dieudonné (qu'il qualifie de "pote"), régulièrement interdit de
représentation en France.
Chatillon est marié avec Marie d'Herbais, amie d'enfance de Marine Le
Pen, membre du service communication du FN, et présentatrice du "Journal
de Jean-Marie Le Pen", une vidéo hebdomadaire du président d'honneur du
Front. Elle a été candiate aux dernières législatives.
Pourtant Alain Vizier, responsable du service de presse au Front
National, et Marine Le Pen elle-même considèrent Chatillon comme un
simple "fournisseur" ou "prestataire de service". Medipart explique que
ces liens sont plus étroits, rappelant notamment une "soirée arrosée de
février 2003, jour d’anniversaire de Frédéric Chatillon", au cours de
laquelle Marine Le Pen "s’est interposée, alors que son ami repoussait
la police. Elle a été elle-même visée par la suite par une plainte pour
outrage déposée par les policiers".
Une opération uniquement "politique" ?
Concernant les investigations de la brigade financière, Frédéric
Chatillon assure que cette enquête est "politique". "Les policiers m’ont
dit “c’est Tracfin”" explique Frédéric Chatillon à Mediapart. Il ajoute
: "ma banque m’a certifié que ce n’était pas eux. Tracfin, c’est le
fourre-tout du système. Je ne sais pas si c’est Sarkozy ou l’Etat
français, mais en tout cas, c’est politique".
Ses liens avec le Front seraient d'évidence au cœur de l'affaire. "Quand
Marine prend le Front, pendant six mois ils enquêtent, ils collectent
tout sur moi, assure Chatillon. Une fois qu’ils ont tout, ils me
convoquent. A cause du bruit autour de la campagne de Marine, ils ont
cherché des trucs. Eux-mêmes ne savaient pas ce qu’ils cherchaient".
Les dates de début et fin de l'enquête ("quand elle prend le FN en
janvier 2011, et à la fin de la campagne, quand les jeux sont faits, en
avril 2012", précise le site) auraient troublé le chef d'entreprise.
"Sur le coup, je n’étais pas très rassuré car je me dis “si ça se trouve
c’est une cabale politico-financière” dans laquelle je n’ai aucun
contrôle", commente Chatillon.