Justice. Enfermement des mineurs : ni angélisme, ni hypocrisie, ni simplismes, ni pseudo-raison, donnons le coup de grâce à l'hystérie sécuritaire...
Enfermement : L’esprit fermé des naïfs de droite
9 Août 2012 Par gilles sainati (Mediapart)
[Gilles Sainati est, comme il l'indique lui-même sur son blog de Mediapart, un juriste ayant pour devise Liberté, Egalité, Fraternité (Clermont-l'Hérault )]
A peine l’encre fraîche des déclarations de 
Christiane Taubira a t- elle séchée que nos habituels idéologues de 
droite s’en sont donné à coeur joie. Pourtant les déclarations à 
l’emporte pièce de MM Brice Hortefeux ou d’Yves Jégo cachent mal l’échec
 de leur politique sécuritaire...( http://www.liberation.fr/depeches/2012/08/07/christiane-taubira-critique-l-enfermement-et-provoque-un-nouveau-tolle-a-droite_838267).
La volonté est vive de redonner corps au clivage entre les angélistes
 ignares des réalités et les hommes de raison, ces derniers  siégeant 
forcément à droite de l’hémicycle...
Il est  bien évident que non seulement cette vision du monde est 
simpliste mais encore elle empêche tout débat sur les réalités de 
l’enfance en danger ( qu’elle soit délinquante ou pas). 
On pourrait même dire que les angélistes sont ceux qui jouent les 
fiers à bras  en menaçant les sauvageons du bâton et de l’enfermement...
 Evidemment c’est plus simple, c’est même simple comme le signe 
définitif d’une impuissance face à la délinquance juvénile... Otez de 
mon regard ces jeunes délinquants dans l’attente qu’ils deviennent 
majeurs,  et qu’on n' en parle plus... Quelle naïveté ou 
hypocrisie..c’est selon....!!!
Pourquoi les Centre Educatif Fermés ( CEF)  ne sont pas la panacée du lutte contre la délinquance
La plupart du temps associations de droit privé, les CEF ont vocation
 à accueillir, sur décision d’un juge des enfants, des enfants de 13 à 
18 ans, souvent avant même leur condamnation, mais qui ont déjà fait 
l’objet d’autres procédures pénales. Conformément à leur intitulé, 
l’enfermement est au centre de ce dispositif et toute fugue, même sans 
nouveau délit, peut entraîner une incarcération. 
Une étude du contrôleur général des lieux privatifs de liberté a 
démontré que, par-delà un intitulé unique, les CEF fonctionnaient bien 
souvent avec des orientations différentes selon les lieux et que, plus 
les structures étaient ouvertes sur l’extérieur dans les dispositifs de 
droit commun (inscription à l’école, formation professionnelle, 
activités extra-scolaires, ...), plus la récidive était réduite.(http://www.laurent-mucchielli.org/index.php?post/2010/12/19/Le-contrôleur-général-des-lieux-de-privation-de-liberté-critique-les-centre-éducatifs-fermés).
Mais ce constat partagé et observé par tous les professionnels doit 
se re-situer dans  le démantèlement progressif du suivi en milieu ouvert
 qui a été systématiquement mis en oeuvre sous Nicolas Sarkozy... Le 
résultat est simple...en l’absence de suivi éducatif proche du milieu 
familial et de suivi psychologique, aucune prise en charge n’est 
proposée à l’enfance en danger...ou bien compte tenu de l’encombrement 
des services la prise en charge intervient de longs mois après la 
décision du juge des enfants... La totalité des moyens budgétaires et 
humains est phagocytée par les structures à visée d’enfermement .. et la
 vidéo- surveillance ....
Par ailleurs, l’enfermement n’est qu’une phase et toute la difficulté
 est de réinsérer le jeune dans son environnement familial et social. 
L’absence de toute passerelle  entre la prison et la société conduit 
inévitablement à une accentuation de la désocialisation et in fine à de 
nouvelles violences..
 Il est plus rentable  et efficace de favoriser des foyers d’accueil 
ouverts sur l’extérieur dans les dispositifs de droit commun 
(inscription à l’école, formation professionnelle, activités 
extra-scolaires, ...) pour lutter contre la récidive...( cf http://www.lepartidegauche.fr/actualites/communique/protection-judiciaire-la-jeunesse-oui-l-education-non-l-enfermement-16473#.UCQjvUJcnu1).
Courtes peines,  idées courtes...
De la même manière, la Garde des Sceaux a déclaré : «Il y a des 
années qu’on sait que la prison, sur les courtes peines, génère de la 
récidive, c’est presque mécanique. Je le dis, il faut arrêter ! Ça 
désocialise, ça coûte cher et ça fait de nouvelles victimes»...
Les critiques de la droite nationale et populaire ont redoublé de vigueur...
Pourtant cette situation mérite quelques explications que l’on 
retrouve dans un rapport publié à la documentation française établi sous
 l’autorité du député UMP Warsmann. 
Que disait ce rapport à propos des courtes peines : «La maison d’arrêt est la bonne réponse pour les individus dangereux, car elle remplit sa fonction de mise à l’écart. Mais
 pour tous les autres, elle n’est pas la solution adaptée : elle 
méconnaît la valeur du travail et fait perdre son emploi à celui qui en 
avait un ; elle n’offre que peu d’activités et signifie souvent 
l’oisiveté pour les détenus dans des conditions peu idéales. De plus, 
elle ne garantit pas les intérêts de la société en ne permettant pas de 
lutter contre la récidive par une préparation de la sortie. Enfin, la 
maison d’arrêt est la forme la plus coûteuse de détention : environ 60 
euros par jours. La semi-liberté coûte de 20 à 30 euros par jour. Le 
placement sous surveillance électronique dans la phase actuelle de 
lancement coûte 22 euros par jour. Incarcérer un condamné en maison 
d’arrêt, c’est dépenser beaucoup d’argent pour l’isoler et pour le plus 
souvent le condamner à l’inactivité.»
Le député UMP WARSMANN proposait alors la création massive de centre 
de semi liberté mais  à la place nous avons eu droit au délire 
sécuritaire de Rachida Dati qui courrait après les idées du Front 
National avec les peines planchers ..(.http://prisons.free.fr/rapport%20Warsmann.htm).
Faudra t-il attendre encore longtemps pour arrêter de suivre les 
sornettes d’une droite en pleine déconfiture qui n’envisage comme projet
 de société que le gourdin à défaut d’un avenir viable pour notre 
jeunesse...
Semi-liberté, suivi en milieu ouvert, politique de prévention et de 
santé ( notamment des addictions) seront autrement plus efficaces...Il 
semble qu’une présidence normale devrait comprendre l’enjeu de ces 
mesures et se détourner de l’hystérie sécuritaire de ces dernières 
années. 
Enfermement : L’esprit fermé des naïfs de droite 
Les centres éducatifs fermés à leur juste place (481) par
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Les centres éducatifs fermés à leur juste place (481) par
"La prison est toujours l'école du crime" (Le Monde du 11 août 2012)
Xavier Lameyre, 56 ans, vice-président chargé de d'application des 
peines au tribunal de grande instance de Paris, enseigne la criminologie
 et la pénologie à l'université Paris-II depuis douze ans. Il est 
l'auteur de l'ouvrage Le Glaive sans la balance (Grasset, 224 p., 17 euros), un petit livre incontestable qui rassemble toutes les données chiffrées de la politique pénale du dernier quinquennat et s'inquiète de sa "démesure pénale". Il clôt sa réflexion en citant Corneille : "Votre sévérité sans produire aucun fruit / Seigneur, jusqu'à présent a fait beaucoup de bruit."
Justice des mineurs, la position du NPA 
Une avancée pour la justice des mineurs
vendredi 1 juin 2012
L’annonce par Taubira de  la suppression des tribunaux 
correctionnels pour mineurs est une bonne  nouvelle pour l’ensemble de 
la profession. Il faut aller plus loin en  réduisant le nombre de 
centres fermés.
Les professionnels de la justice des mineurs ont accueilli avec  
soulagement l’annonce par la nouvelle ministre de la Justice, Christiane
  Taubira, de la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs 
et  des peines plancher. Évidemment, la droite est tout de suite montée 
au  créneau, dénonçant ce projet. Les propos très violents tenus à  
l’encontre de Christiane Taubira ont des relents sexistes et racistes.
On aurait aimé un soutien plus rapide et plus ferme du gouvernement Ayrault.
Abrogation de la loi Mercier
Abrogation de la loi Mercier
Symboliquement Christiane Taubira a donné le ton sur la justice des mineurs en annonçant l’abrogation des mesures de la loi Mercier du 10 août 2011. Elle s’est rendue dès le 20 mai à la permanence éducative du tribunal pour enfants de Paris où l’avocat de permanence pour les mineurs déferés était Pierre Joxe ! Dans un livre récent, écrit à partir de son expérience d’avocat à l’antenne des mineurs du tribunal de Paris, il dénonçait de façon assez virulente l’abandon des réponses éducatives pour les mineurs auteurs de délits.
Les mineurs délinquants étaient dans le collimateur de Sarkozy qui 
n’a  eu de cesse pendant son quinquennat de casser la justice spécifique
 des  mineurs.
Création d’établissements pénitentiaires pour mineurs  (EPM), 
création de centres éducatifs fermés (CEF), et suppression des  centres 
d’insertion et des foyers éducatifs ont précédé la création de  
tribunaux correctionnels pour mineurs.
Ceux-ci, composés de trois juges dont un juge des enfants, peut juger
  des mineurs de plus de 16 ans en état de récidive et risquant une 
peine  d’emprisonnement d’au moins trois ans. Ils peuvent juger aussi 
des  majeurs. 
Approche éducative
Approche éducative
L’objectif était de diminuer le poids du magistrat spécialisé, le juge des enfants, qui a une approche plus éducative qu’un magistrat non spécialisé. Le résultat escompté était que les mineurs soient condamnés comme des majeurs.
Le tribunal pour enfant est lui présidé par un juge des enfants, 
entouré  de deux accesseurs choisis au sein de la société civile pour 
leur  connaissance de l’enfance ou de l’adolescence.
La mise en place de  ce nouveau tribunal correctionnel a varié selon 
les juridictions : soit  le choix a été de mettre deux juges des enfants
 et un juge correctionnel  pour contrecarrer l’esprit de cette loi, soit
 il n’y avait qu’un seul  juge des enfants.
Le SNPES-PJJ/FSU, syndicat majoritaire, avait appelé à la grève le 6 
 avril contre cette loi et le tout-répressif appliqué à la justice des  
mineurs. L’Association des magistrats de la jeunesse, le Syndicat de la 
 magistrature, le Syndicat des avocats de France et Pierre Joxe 
s’étaient  joints à la conférence de presse qui avait permis de 
médiatiser le  rejet commun de ce nouveau tribunal correctionnel.
Par ailleurs, de nombreuses lois sécuritaires (lois Perben, Sarkozy) 
 créant de nouveaux délits et durcissant les peines ont touché les  
mineurs, notamment en accélérant les procédures de comparution (création
  notamment du jugement à bref délai, qui juge entre quinze jours et un 
 mois après le délit) ne laissant plus de place « au temps éducatif ».  
Supprimer ce temps éducatif qui permet de mieux appréhender la  
problématique des adolescents, c’est nier la possibilité à l’adolescent 
 d’évoluer et c’est ne plus le considérer comme un être en devenir.
Déjà au tribunal pour enfants, les mineurs sont de plus en plus  
condamnés à des peines de prison assorties de sursis et de mesures de  
probation, parfois dès le premier délit, par des juges pour enfants,  
sous pression permanente du parquet. Dans cette logique de pression du  
parquet, on peut imaginer qu’à long terme, les tribunaux correctionnels 
 pour mineurs se seraient rapprochés des chambres correctionnelles de  
comparution immédiate. Dans cette juridiction expéditive, pour un délit 
 équivalent, les peines prononcées sont en moyenne supérieures d’un 
tiers  à celles rendues dans un tribunal correctionnel classique. 
Mobilisation
Mobilisation
Si les professionnels de l’enfance en danger se réjouissent des propos de la ministre de la Justice qui dit vouloir revenir à l’esprit éducatif de l’ordonnance de 1945, et attendent rapidement l’abrogation de la loi Mercier, ils sont opposés à la multiplication des centres fermés contenus dans le projet du Parti socialiste.
Les récents propos de Manuels Valls sur le rapprochement 
police/justice  concernant la justice des mineurs montrent qu’il faudra 
se mobiliser  pour que l’éducatif, mis en avant aujourd’hui par 
Christiane Taubira,  l’emporte.
Anne Leclerc
Illustration : image_68932702.jpg 
Et aussi
Depuis trente ans, les actes violents sont de moins en moins nombreux et pourtant...
Réformer le parquet, instrument judiciaire de l’arbitraire gouvernemental, par Matthieu Bonduelle (La Revue des livres)
De fait, en dépit des dénégations générales des représentants de 
l’exécutif et de la haute hiérarchie du parquet, les intrusions du 
pouvoir politique dans la sphère judiciaire en vue de contenir, entraver
 ou faire avorter des procédures pénales susceptibles de l’embarrasser 
ne sont pas rares. Le ministère public constitue alors bien souvent un 
relais efficace
Réformer le parquet, instrument judiciaire de l’arbitraire gouvernemental, par Matthieu Bonduelle (La Revue des livres)
Extraits : Le texte qui suit a été initialement publié dans Contre l’arbitraire du pouvoir. 12 propositions
 (La Fabrique, 2012) et est reproduit ici avec l’aimable autorisation de
 l’auteur et de l’éditeur. Question à première vue technique et 
secondaire, la réforme du parquet apparaît grâce à la précision 
pédagogique et à la vigueur politique de l’analyse développée par 
Matthieu Bonduelle, juge d’instruction à Bobigny et président du 
Syndicat de la magistrature, comme ce qu’elle est : un enjeu essentiel 
pour toute politique démocratique progressiste. [...]
La situation du ministère public français relève du paradoxe : à un 
accroissement tendanciel de ses prérogatives correspond une inféodation 
croissante, qui résulte de l’évolution du droit et des pratiques.
Une telle configuration soulève deux problèmes démocratiques majeurs,
 empiriquement vérifiés : le traitement par le parquet des affaires 
dites « sensibles » et le rôle dévolu au ministère public en matière de 
protection des libertés. [...]
Sociologiquement, le choix des procureurs dans les grands tribunaux est 
crucial pour le pouvoir en place. Il est clair que ce choix se fait en 
fonction de la docilité, réelle ou supposée, du magistrat en question. 
Les pratiques illégales risquent alors d’être acceptées par des 
magistrats qui craignent de « rater leur carrière » : tout est fait pour
 que, chacun à leur niveau, ils acceptent de prendre l’avis de leur 
hiérarchie avant toute décision dans les dossiers sensibles. 
Cela constitue pourtant un détournement du texte prévoyant que le garde 
des Sceaux et le procureur général peuvent enjoindre de 
poursuivre par écrit dans un dossier classé sans suite. Le but de cette 
pratique est de dissimuler que la décision vient « d’en haut »…
Par conséquent, les procureurs acceptent les injonctions de 
poursuivre sans ordre écrit de la hiérarchie, et la même logique les 
conduit à accepter les injonctions de classer sans suite.
Dès lors, l’insuffisance des garanties concernant, d’une part, la 
nomination des magistrats du parquet et, d’autre part, les pouvoirs 
respectifs des procureurs et de leurs substituts, sont deux facteurs 
essentiels qui rendent possibles des pratiques illégitimes, voire 
illégales, et un contrôle de la plupart des décisions sensibles par le 
pouvoir exécutif.













