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Sanofi. Manif parisienne réussie. Ouverture des livres de comptes, pas un seul licenciement !



"La seule logique de la direction de Sanofi, c'est le fric"

(NouvelObs 03-10-2012)
Plus de 900 salariés de Sanofi ont défilé à Paris pour dénoncer les suppressions de postes prévues par la direction. Reportage.

Une heure avant le départ du cortège à 14h, selon la préfecture, ils étaient déjà plus de 900 salariés de Sanofi rassemblés devant le siège du groupe pharmaceutique, rue de la Boétie. (L. M. - N.O.)
Une heure avant le départ du cortège à 14h, selon la préfecture, ils étaient déjà plus de 900 salariés de Sanofi rassemblés devant le siège du groupe pharmaceutique, rue de la Boétie. (L. M. - N.O.)

  "Dégage Viehbacher !", scandent les salariés de Sanofi venus manifester à Paris mercredi 3 octobre. Une heure avant le départ du cortège à 14 heures, selon la préfecture, ils étaient déjà plus de 900 rassemblés devant le siège du groupe pharmaceutique, rue de la Boétie. De Toulouse, de Montpellier, de Romainville, et d'autres sites d'Ile-de-France, ils sont venus réclamer le retrait du plan de restructuration du groupe qui prévoit la suppression de 914 postes d'ici 2015. "900, c'est de la poudre aux yeux, en fait ce sera beaucoup plus. Pour le moment ils ne parlent pas de Toulouse mais ils comptent bien le fermer aussi : ça fait encore 600 emplois en moins", prévient Nilsen, agent de maîtrise à Romainville.

De fait, l'avenir de Toulouse n'est toujours pas évoqué par la direction de Sanofi, même pas dans le plan qui a circulé mardi soir, à la veille du comité du groupe France à Gentilly. "Ils disent qu'ils étudient le dossier mais, en fait, ils peuvent se désengager à tout moment", estime Noëlle, chercheuse depuis 15 ans à Toulouse. Pour Isabelle, 30 ans d'ancienneté, la volonté de fermer Toulouse ne fait aucun doute. Elle fait partie des rares anciens du site : "Ils ont déjà fait un gros ménage il y a trois ans". Une restructuration faite sur la base du volontariat et des départs en retraite mais qui a fortement désorganisé le travail.

Se débarrasser de la recherche

 

A leurs yeux, le manque de transparence de la direction ne parvient pas à masquer la stratégie : "Ils veulent tout simplement se débarrasser de la recherche", prévoit Noëlle. De plus en plus, Sanofi achète des produits à l'extérieur à de petits laboratoires qui savent bien vendre leurs molécules. Mais lorsque ces produits sont réévalués par les chercheurs de Sanofi - dont ceux de Toulouse -, ils sont bien souvent abandonnés car inefficaces, voire toxiques. Cela a récemment été le cas avec Palumed ou CureDM : achetés, évalués et finalement jetés, au détriment de la recherche interne. "C'est de l'argent jeté à la poubelle", se désole Noëlle.



Ce désengagement de la recherche se traduit aussi par l'abandon de découvertes du groupe. "Nous avons mis au point le Xa IIa – prononcez 10 a 2a -, un anticoagulant. Sanofi n'en a pas voulu alors nous l'avons vendu. On vend nos produits à des pays comme la Chine qui vont ensuite venir vendre les médicaments en France", enrage Sandrine, 43 ans dont 12 de recherche pour Sanofi. Les chercheurs se sentent méprisés, déconsidérés.

Sanofi estime que ce secteur ne fonctionne pas. "C'est injuste et faux de dire ça. Surtout trois mois après avoir déclaré que nous étions un site d'excellence !", regrette la chercheuse. Elle rappelle que Sanofi vient de mettre en développement deux produits mis au point à Toulouse : le P75 Périphérique contre l'incontinence et le VEGFR3 Inhibiteur qui agit sur le cancer du foie. "On continue les projets. Nous sommes des chercheurs, nous croyons à ce que nous faisons. Je fais ce métier pour soigner les gens, pas pour Sanofi", précise Sandrine.

Moudenc : "Sanofi rémunère le capital de manière déraisonnable"

 

Les salariés aimeraient que Sanofi retrouve une logique entrepreneuriale : "Pour le moment, leur seule logique, c'est le fric", comme tous le regrettent, des salariés aux politiques venus les soutenir. Jean-Luc Moudenc, député UMP de Haute-Garonne, est là. "Je viens naturellement apporter mon soutien. Je suis heureux de voir l'unité des différents sites : ils parlent d'une seule voix alors que la direction tente de les diviser", constate l'ancien maire de Toulouse.



Jean-Luc Moudenc juge inacceptable la stratégie de Sanofi : "Ils n'ont pas de réelles difficultés. Ils ne font que rémunérer le capital de manière déraisonnable". De là à soutenir le projet de loi sur les licenciements boursiers, il y a un pas que le député UMP n'est pas encore tout à fait prêt à franchir : "J'attends de voir le texte".

Cette loi, Olivier Besancenot n'y croit pas non plus. "Le gouvernement ne manque même pas de courage, c'est pire que ça, il a choisi son camp. Regardez ce qui s'est passé chez Sodimédical : rien n'obligeait à plaider la liquidation", lance la figure emblématique du NPA. Le militant anticapitaliste voit le projet de Sanofi comme l'exemple caricatural des plans de licenciement "avec un patron qui a un profil de séquestrable à souhait".



"Ce groupe dégage des milliards de bénéfices, il s'est gavé de subventions publiques et maintenant il licencie !", estime Olivier Besancenot pour qui le gouvernement doit porter plainte pour détournement de subventions publiques. Le NPA réclame une loi globale sur l'interdiction des licenciements ainsi que la publication des livres de comptes des grandes entreprises. Et d'ajouter : "Si ces boîtes ne jouent pas le jeu, nous voulons leur mise sous contrôle public pour que l'activité continue".

"Ils nous traitent comme des mauvais alors qu'on les fait manger"

 

Peu avant 14h, le cortège s'ébranle vers l'Assemblée nationale. Les contrats à durée indéterminée (CDI) sont mobilisés, les précaires aussi, même, comme Younes, ils le savent : "Ca fait huit ans qu'on me balade entre Vitry et Romainville, huit ans qu'on me fait passer de CDD en intérim, alors, fin 2013, je le sais, ce sera 'bye bye'. Je n'aurai plus qu'à aller sur le marché de l'emploi". Car le secteur chimie de Sanofi se sait déjà condamné par le plan 2010 qui a prévu la fermeture de Romainville, 220 postes, ou de Neuville-sur-Saône, 900 personnes, pour 2013. Dans cette branche, Sanofi pousse au départ et recourt massivement aux contrats précaires, au moins 20% des salariés. Selon Nilsen, l'agent de maîtrise de Romainville, la logique du groupe de fermer la chimie en France est simple : "Sanofi fait maintenant fabriquer les molécules dans ses usines à l'étranger, en Chine ou au Mexique, là où la main d'œuvre est plus souple et moins chère".
La manifestation avance, déterminée. Beaucoup de colère, de la tristesse aussi. Isabelle la toulousaine est assez pessimiste : "Pour le moment, tout ce qu'ils ont projeté, ils l'ont déroulé jusqu'au bout". Pessimiste mais la rage au ventre : "On nous traite comme des mauvais alors que jusqu'à maintenant, c'est nous qui les avons faits manger !"


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