« Tu pars en prison. »
Sur le bureau de la greffière, juste à côté de la porte, l’imprimante vomit des pages et des pages. L’avocat tente de lire en passant l’intitulé, voir s’il lit les mot “détention provisoire” ou “contrôle judiciaire”, mais la greffière est une experte et attrape les feuilles en les recourbant pour que leur contenu reste invisible. Elle laisse au juge la charge d’annoncer sa décision.
Son regard se tourne vers le juge. Parfois un regard, un sourire donnent espoir. Mais là, rien. Il a les yeux baissés, et tripote quelques pages du dossier. L’avocat n’est pas dupe. Il a pris sa décision, il n’a plus besoin de lire quelque pièce que ce soit. Il ne veut pas croiser le regard de l’avocat ou du mis en examen. Cette petite pièce jaune blafarde pue la détention provisoire, c’en est suffocant.
La chaise du procureur restera vide. Il est venu, comme le diable jaillissant de sa boîte, requérir le placement en détention provisoire, mais n’a pas à être présent pour le délibéré, qui lui sera faxé, même si son bureau est à quelques couloirs de là, afin de connaître l’heure exacte de l’envoi, à la minute près, pour des raisons de délai.
Cliquetis de chaines ; le gendarme a ôté les menottes au mis en examen, qui s’assoit sur la chaise qu’on lui indique, la même qu’il y a une demi heure, quand le débat a eu lieu. Il a l’air de s’ennuyer un peu, regarde autour de lui, mais aucune décoration ne lui permet de distraire son regard. La fenêtre au-dessus du bureau du juge est noire : tiens, il fait déjà nuit. Il étouffe un bâillement machinal.
Les personnes poursuivies ou jugées pour des infractions commises avant l'âge de 18 ans relèvent de juridictions spécialisées (juge d'instruction des mineurs, juge des enfants, tribunal pour enfants, cour d'assises des mineurs). Ils peuvent être exceptionnellement incarcérés. Lorsqu'ils sont mineurs au moment de leur incarcération, ils doivent alors être affectés dans un établissement figurant sur la liste des établissements habilités à recevoir des mineurs. Ils bénéficient d'un régime de détention qui doit faire une large place à l'éducation. […]
Un mineur peut-il être placé en détention provisoire ?
Les mineurs âgés de 13 ans révolus et de moins de 16 ans ne peuvent être placés en détention provisoire que dans l'un des cas suivants :- s'ils encourent une peine criminelle ;
 - s'ils se sont volontairement soustraits aux obligations d'un contrôle judiciaire, qui comportait une obligation de respecter un placement en centre éducatif fermé.
 
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Extraits
Nous luttons pour la suppression des  Tribunaux  Correctionnels  pour  Mineurs,  mais  aussi  de  toutes  les  dispositions  qui,  ces dernières années, ont peu à peu aligné la justice des mineurs sur celle des majeurs. Le rapport de Jean-Pierre Michel, sénateur appartenant à la majorité, a le mérite de poser la nécessité politique d’une  réforme  se  référant  à  nouveau  aux  principes  fondateurs  de  l’ordonnance  de  45  et  de  la justice des mineurs. Cela va dans le sens de nos exigences. […]
De  façon générale, ce rapport réhabilite les fondamentaux de l’action éducative : l’individualisation des prises en  charge,  le  temps  du  jeune  et  de  l’accompagnement  éducatif,  la  continuité,  etc...  Autant  de  notions  qui ont été profondément disqualifiées au point d’introduire un doute profond chez les professionnels eux-mêmes quant à la valeur et l’efficacité de leur travail. Ainsi, dans un contexte politique désespérant et au regard des régressions passées, la réaffirmation dans ce rapport des fondamentaux de l’action éducative est  une  forme  de  réhabilitation  et  constitue  un  point  d’appui  pour  continuer  à  mener  les  combats indispensables. 
Cependant, si les convictions concernant la justice des mineurs et l’analyse des régressions subies  ces  dernières  années  sont  convergentes  avec les  nôtres  et  si  ce  rapport  contient  des préconisations qui se situent dans une logique de rupture avec les politiques précédentes, d’autres sont  ambiguës  ou  contradictoires  avec  des  principes énoncés  et  d’autres  rencontrent  notre profonde opposition.  […]
La généralisation des mesures de probation et de sûreté, issues du droit pénal des majeurs, a contribué à corseter l’action éducative dans  la menace de l’incarcération. Pour nous, l’action éducative n’est efficace que si elle est déconnectée  de  cette  menace, car  elle  se  base  essentiellement  sur  la  relation  de confiance  qui  est  à construire tout au long de l’accompagnement éducatif.
La détention
Nous retiendrons de cette partie du rapport une phrase qui jusqu’à maintenant relevait du tabou  ou,  selon  certains,  des  revendications  « idéologiques  et  incantatoires »  du  SNPES-PJJ  : « Faut-il conserver les EPM [Etablissement Pénitentiaire pour Mineur] ? ». Comme pour les CEF [Centres Educatifs Fermés], J.P Michel déplore qu’aucune étude n’ait été  faite  pour  analyser  la  situation  des  mineurs  après  leur  passage  en  EPM  pour  évaluer  leur efficacité  au  regard  du  nombre  très  important  de  personnels  de  la  PJJ  qui  y  travaillent  et  par conséquent  de  leur  coût.  Pour  notre  part,  depuis  la création  de  ces  nouvelles  prisons,  nous soutenons  que,  bien  que  nouvelles,  elles  restent  des  prisons.  A  ce  titre,  elles  ont  les  mêmes  effets destructeurs  que  toutes  les  prisons,  surtout  pour  des  mineurs.  S’il  faut  bien  entendu  tout  faire pour  limiter  ces  effets,  y  implanter  un  service  de la  PJJ [Protection Judiciaire de la Jeunesse]  n’est  pas  la  solution  et  l’expérience dorénavant  le  démontre. 
Si  J.P  Michel  avait  tiré  toutes  les  conséquences de  son  raisonnement,  il aurait proposé clairement une réorientation des moyens alloués aux EPM vers les structures éducatives (pour  créer  les  nouvelles  UEAJ [Unités Educatives d'Activité de Jour]  qu’il  préconise,  prendre  en  charge  des  mesures  civiles ou  soutenir véritablement  les  hébergements  éducatifs,  par  exemple...).  Mais,  prudent  ou  refusant  de  s’affranchir d’un contexte politique peu favorable aux décisions ambitieuses, il en reste à demander une évaluation de  leur  efficacité  et  l’amélioration  de  leur  fonctionnement.  Nous  nous  chargerons  donc  de  pousser  la logique jusqu’au bout pour contribuer à faire sortir la PJJ des EPM, dans l’intérêt des mineurs et dans le respect des droits des personnels. 
Le SNPES-PJJ/FSU
(1) quartier d'une maison d'arrêt réservé aux mineurs. 
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Nous  n'avons  aucune  garantie  sur l'ambition réformatrice du gouvernement et la volonté politique de mener à son terme un texte  progressiste.  Le  sort  réservé  à  la  réforme  pénale  des  majeurs,  vidée  de  sens  en même temps que d'une partie essentielle de ses dispositions, avant même son examen au parlement, n'incite pas à l'optimisme... 
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