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Montpellier. Conférence de la Société Louise Michel : interroger ce qu'est la ville, interroger ce qu'elle devient...

 
... au miroir de l'exclusion, de la métropolisation et de la mise en compétition des territoires
 

Nous vous invitons à une conférence de Daniel Bartement, géographe, Maître de conférence à l'université Paul Valéry,
le mardi 27 mai à 19h, à la brasserie le Dôme, 2 Bd Clémenceau, entrée libre.

L'urbanisme, technique de maîtrise du champ de la guerre sociale

Voilà, dès le titre, c'est dit! Je ne viens pas en "spécialiste", pire en "expert" vous entretenir des "problèmes urbains", des "enjeux de la métropolisation", même si, universitaire travaillant depuis de nombreuses années à saisir les stratégies de décomposition de la ville, à Montpellier, Venise, Istanbul, je suis dépositaire d'un savoir sur ces questions. Mais je considère que le constat sur ce que deviennent nos territoires est partagé, que nous pouvons facilement nous accorder sur les causes également de cette destruction - esthétique et politique - des territoires. Le temps du "Que faire en commun?"[1] est là, la riposte doit être à la hauteur de la guerre qui nous est faite. Et la Société Louise Michel qui a la belle ambition de permettre à l'"intellectuel collectif" de se construire offre de fait une première réponse, réoccuper l'espace public, ici métaphorique, celui de la réception, discussion, négociation du sens. Ce n'est pas rien en ces mauvais temps de fin de l'homme public. 

Le Droit à la Ville! 

Henri Lefebvre lançait cette revendication il y a déjà 40 ans, alors que les ravages des "30 glorieuses" rendaient de plus en plus visible les dégâts de l'urbanisme, et que la ville "socialiste" encasernait la classe ouvrière à l'Est. Si la "Question du logement", vieille revendication du mouvement ouvrier, formulée par Engels continue à être la porte d'entrée pour appréhender la question urbaine - et pourquoi s'en étonner, tant la folie qui consiste à laisser au "marché" l'habiter est au cœur de la "crise"? - il semble urgent aujourd'hui pour un "intellectuel collectif" de remettre en perspective ce qu'est une ville, ce qu'elle devient. Et de réaffirmer que le "droit à la ville" est inséparable du combat émancipateur. 

Les trois faces de la ville, Urbs, Civitas, Polis. 

Accumulation d'édifices, structure sociale, gouvernement de la ville, telles sont les trois faces de la ville. Mais elle est avant tout communauté historique et pratique, ne se laissant pas réduire à une somme d'objets techniques issus d'une division mutilante. Je vous propose, en guise d'introduction au débat, de vous fournir quelques éléments de réflexion issus de travaux de terrain et de participation à des luttes urbaines. 

Métropolisation et exclusion. 

Le second terme renvoie explicitement, même si cela est un peu oublié aujourd'hui, à la construction d'un nouveau rapport au monde social, une vision topographique tourainienne de la société. Soit une représentation proprement géographique de la Terre mise en place à travers le triptyque exclus/ inclus/ reclus. Destiné à se substituer à la vision d'une société divisée en classes, résumée par l'assertion sartrienne : "le marxisme est l'horizon indépassable de notre époque". Avec Alain Touraine, le chaos social prétend à prendre une forme, une forma urbis, et son nom est métropole. Si c'est une banalité, pour un géographe conscient des enjeux de la nomination, de rappeler que les mots participent de la construction de la réalité sociale, la métaphore spatiale utilisée par une sociologie qui découvre des "travailleurs pauvres" - mais a-t-on vu, de mémoire de sociologues, des travailleurs riches ? - pose question : celle essentielle des limites, et partant, donc, des principes qui les définissent. Il est de bon ton, aujourd'hui, de prétendre abolir les limites. Montpellier unlimited™ nous fournit l'occasion d'en disputer. Abolir les limites, supprimer l'horizon reviendrait, selon Pierre Legendre, à jeter, projeter au loin, étymologiquement diabolein, à glisser sur le versant sombre du pouvoir. Que l'on se rassure, l'exclusion, sociale, topographique, mémorielle et historique, serait le produit de la dynamique métropolitaine. C'est le rôle du langage des représentations géographiques dans la naturalisation et la légitimation de l'exclusion que nous voulons interroger ici à travers l'exemple modeste de Montpellier où la rhétorique des pouvoirs, municipal, d'agglomération et régional, multiplie les termes de métropole, d'éco-quartier, de compétitivité des territoires. Et cela à un moment où le passage de la triarchie état-nation, département, commune à celle d'Europe, région, communauté d'agglomération laisse le citoyen sans voix.

Daniel Bartement

Géographe, Maître de conférences à l'Université Paul-Valéry (et non Sud de France™) Montpellier III (et non Montpellier unlimited™).


[1]A titre d'exemple, pour la France, Pierre Dardot, Christian Laval, Commun. Essai sur la révolution au XXI° siècle, La Découverte, 2014. Et en Italie, Salvatore Settis, Azione Popolare Cittadini per il bene commune, Einaudi, 2012.

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