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INTERVIEW

Il y a deux ans, François Hollande était élu président de la République. Deux années de réalisme économique ou de long désenchantement ? 

 

Eric Fassin sociologue, professeur à l’Ecole normale supérieure (ENS)


Il y a deux ans, François Hollande était élu président de la République. Deux années de réalisme économique ou de long désenchantement ? Sociologue, professeur à l’université Paris-VIII, Eric Fassin (1) dresse un sévère bilan de cette gauche au pouvoir qui aurait perdu, dès le premier jour, ses priorités et ses valeurs. Il vient de publier Gauche : l’avenir d’une désillusion.

Hollande, un Sarkozy à visage humain, dites-vous dans votre livre : il ne s’agit plus de savoir s’il est encore socialiste ou bien passé à la social-démocratie… Selon vous, il est le fossoyeur de la social-démocratie. Exagéré non ?

Le Président «s’assume» social-démocrate, et la presse applaudit, à commencer par Libération. Mais le pacte de responsabilité s’adresse au patronat, pas aux syndicats. Or la social-démocratie suppose un arbitrage entre capital et travail. Hollande a raison de refuser le terme «social-libéral» : son gouvernement n’est guère «social». En outre, il est vrai que «l’Etat prend l’initiative» ; mais c’est au service des entreprises, des banques et des marchés. C’est donc un Etat néolibéral et non libéral. «Hollande nous débarrasse du socialisme», jubile Alain Minc, comme «Mitterrand nous avait débarrassés du communisme».

L'entrevue complète


Extraits

Qu’ils soient plus ou moins à gauche dans le spectre de la majorité, les conseillers rencontrés témoignent tous d’un glissement progressif de la ligne de l’exécutif, vers le social-libéralisme, le libéralisme, ou même la droite. […]

« On a passé l’été 2012 avec la peur absolue de la sanction des marchés financiers. Il y a eu un combat de souveraineté par rapport à la dette française. On est même passé à deux doigts de la correctionnelle », dit un “ex” de Matignon. […]

À leurs yeux, c’est un mélange de renoncement et de choix idéologiques profonds qui a conduit au désastre annoncé. Ceux qui n’étaient pas hauts fonctionnaires ont découvert la puissance de la « noblesse d’État », celle des grands corps issus de l’Ena, qui ont trusté les postes les plus importants […]. « J’ai une impression, sans doute un peu naïve, de dépossession de notre victoire par les hauts fonctionnaires qui, dans le fond, ne sont pas de gauche », dit un jeune conseiller. 

Partout le même phénomène semble avoir sidéré les plus politiques des cabinets (ainsi que les députés). Ils parlent de « technos sans vision de transformation », d’un conformisme finalement assez libéral vu l’air du temps, d’un « ventre mou de hauts fonctionnaires avec l’obéissance et le conformisme chevillés au corps » qui renforce les renoncements de l’exécutif. Plusieurs évoquent un manque d’imagination, un petit monde parisien replié sur lui-même, coupé de la société. Voire de « médiocrité » – le mot revient souvent – dans un univers sans vision. « C’est là qu’est la banalisation de notre action. Tout est dépolitisé », dit un ancien collaborateur du gouvernement.  

Au fil des mois, les conseillers des ministères voient aussi « peu à peu la ligne Macron » s’imposer, du nom du secrétaire général adjoint de l’Élysée, social-libéral et ex de la banque Rothschild. […]

« C’est François Hollande, tout seul avec Macron et quelques patrons, qui décide [du "pacte de responsabilité"]. Le premier ministre n’est prévenu que quelques heures avant », rappelle un ancien de Matignon. « Matignon était très business friendly mais très vite, on a été mal à l’aise et c’est même devenu une souffrance », témoigne un autre. Un troisième confirme : « L’équilibre politique s’est rompu avec le pacte de responsabilité. »   […]

« C’est devenu dur au second semestre 2013. Puis en janvier, en février et en mars, cela devient insupportable. On pensait que le pacte était trop déséquilibré, qu’il y avait trop d’effets d’aubaines. L’Élysée au contraire nous demande de faire beaucoup plus encore en terme de baisse des charges », raconte un conseiller passé par Matignon. […]

« De toute façon, ajoute un autre “ex”, Hollande dit souvent qu’il faut faire la même politique que Nicolas Sarkozy, mais en douceur…  […]

« À chaque fois, c’est un conflit d’égos que le président règle avec une synthèse molle », ironise un conseiller parti s’occuper d’une collectivité. « Une synthèse du PS », dit un ancien de Matignon, blessé dans sa conscience de gauche depuis les propos de Manuel Valls sur les Roms. « J’ai eu honte une fois. Je me suis demandé ce que je faisais dans ce gouvernement », dit-il. Il se l’est demandé d’autant plus qu’il voit Hollande « trembler devant Valls », incapable de déjuger un ministre aussi populaire. […]

Les conseillers partis sont parfois taraudés par le doute. Leur inquiétude, palpable, se résume en une question : et s’ils avaient vécu l’ultime échec de cette gauche en laquelle ils croient ?


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