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À tous les déçus par le peuple...


 "Ma capacité au dégoût s’épuise depuis Cahuzac et Guéant, depuis Balkany et Strauss-Kahn, depuis Copé et Guérini…"

A lire, à la suite de l'article ci-dessous,  A mon avis...

 

Après avoir regardé toutes les chaînes de télévision le 25 mai de 19 heures à 21 heures, j’ai noté :

Quel étrange spectacle que de voir tous ces gens propres sur eux, bien maquillés, généreux et si ouverts à toutes les transformations du monde, à toute la « modernité », à toutes les réformes dites sociétales… De voir tous ces gens aisés et si à l’aise pour clamer leur tristesse, leur amertume au lendemain de ces élections… Pour clamer leur déception.


Mais qui les avait déçus ? Le peuple bien sûr, au sens « la plèbe » évidemment. Mon Dieu, le peuple ne vote plus, ou alors il vote pour le Front national ! Que peut-on faire ? Le dissoudre comme disait Brecht ou plutôt dissoudre l’Assemblée comme le dit Marine Le Pen.

Moi, si je pouvais, je dissoudrais le Parti dit socialiste. Cela obligerait peut-être la centaine de députés râleurs, frondeurs, rebelles, bref la centaine de députés restés socialistes dans son cœur et son cerveau à créer un nouveau parti.

A mon avis...

Le coup de gueule de Guédiguian est salutaire surtout en ce que, ciblant les coalisés du système, qu'ils soient de "gauche" (Guédiguian aussi n'a d'autre recours que de mettre les guillemets) ou de droite, il revendique le peuple. Ce peuple que l'on vilipende si fort, y compris parfois très à gauche, car il dépasserait les limites ! La limite... la limite paradigmatique : celle du vote Le Pen. En effet un tel geste ne saurait être que celui d'un-e bien limité-e dans sa petite tête. Vous vous rendez compte, non mais, voter "facho" (va pour les guillemets aussi car le terme n'est probablement pas le bon, mais quand même)  ! 

Oui, mais voilà, nos stigmatiseurs du populo  qui déconne (mais n'exagérons pas, déjà lesdits "fachos" ne sont "que", même si c'est bien sûr trop, 10% des inscrits, en recul de près de quatre points par rapport à la présidentielle. Lire ici), oublient une chose que Guédiguian met parfaitement en évidence : le peuple se donne à voir au miroir, inversé en temps de crise surtout, des politiques installés dans le système ! Je sais que dire cela ne console pas car, après tout, cela pourrait confirmer que, oui, décidément tous pourris : le peuple, les politicards, tous à l'unisson... Tous ? Erreur, il y aurait toujours, et là bien sûr je me tourne vers ceux qui me sont proches, la minorité éclairée-scandalisée se posant en centre immaculé, en tout cas splendidement surplombant toute cette dégénérescence, politique et sociale et qui, après s'être justement répandu contre les Hollande, Copé, etc., aurait le courage d'aller dire à l'ouvrier, à l'employé, à l'étudiant, au retraité, au sans-travail... ses quatre vérités ! 

Alors peut-être faudrait-il commencer par poser la question "qui t'a fait roi ?" qu'en bonne gauchitude on pourrait reformuler en un "qui t'a fait juge", juge du peuple dont par ailleurs, gaucho de mon coeur, tu dis tenir que tu le... représentes, qu'en tout cas, tu le défends (donc pour le coup contre lui, selon l'inusable adage de "qui aime bien..."), que tu veux le libérer, mieux encore, qu'il se libère... Allez, pour la faire bref, ce que m'inspire ce beau texte de Guédiguian, c'est qu'une partie de la gauche radicale, spécialement sa fraction qui n'a que condamnation à adresser aux salauds qui votent FN, devrait descendre de la hauteur où elle se perche et ... réintégrer le peuple : le peuple qui s'abstient alors que le feu facho est aux portes, le peuple qui "fachise", le peuple qui vote à droite (PS ou UMP), etc. Le peuple en somme, qui ne sait pas ce qu'il fait et qui sûrement ne sait pas que, nous, la gauche-sans guillemets, nous savons ce que nous faisons. 

Or, en une parabole assez cocasse, ce qui est signifié par ces "dingues" qui ne votent pas à gauche, je veux dire vraiment à gauche, c'est qu'ils savent une chose : ladite gauche n'est pas l'option, est à peine une ombre d'option pour qui se tape le chômage, les salaires et les pensions à la ramasse, des maladies de pauvres, etc. Et donc, la première chose que la gauche pour de vrai pourrait faire, au lieu d'aller titiller le prolo à la con qui fait n'importe quoi, c'est de se poser la question de son propre n'importe quoi qui lui tient lieu de politique ! En disant cela, je sais bien que je tords le bâton à l'excès et j'ai la faiblesse de croire que mon parti, le NPA, malgré bien des choses où il dysfonctionne, échappe, du moins dans son orientation majoritaire, à ces inexcusables façons de faire le procès en fascisme adressé à une partie du peuple. Rien à voir, par exemple, avec cette incroyable invitation, faite aux travailleurs par un Mélenchon larmoyant, à se "ressaisir" (Cliquer ici et ici). Se ressaisir, c'est qu'on le veuille ou non, du discours professoral à usage des élèves turbulents, à côté de la plaque. Misère du discours politicien qui se pose en "naturel" et obligé représentant, pour le coup dépassé par les évènements, d'un peuple infantile se laissant aller et, le hasard fait de ces choses, ne sachant pas se représenter lui-même tellement au fond il est imprésentable sur la scène politique : il ne sait pas se tenir dans les balises obligées d'une émancipation dont, au demeurant, il est décrété qu'elle ne peut se décliner en auto-émancipation populaire. Et donc voilà qu'il voterait FN alors que ce "il" est une minorité, voilà qu'en s'abstenant il, et là c'est souvent une majorité, ferait le jeu du FN...

Alors, puisqu'il faut bien conclure, cette méchante sortie envers les miens, envers ceux qui, à la gauche du PS, cherchent la voie de l'alternative, pourra apparaître injuste, cruelle, voire inadmissible car elle porterait la marque de cette horreur, la démagogie populiste. Accusation infamante par laquelle une élite d'éditocrates a coutume d'insinuer dans les esprits que toute proximité  avec le peuple contamine forcément à la déraison, à l'irrationnel, la preuve justement par le FN, car, voyez-vous, le peuple est par nature, par essence, primaire; c'est pourquoi il faut anticiper car, après, c'est trop tard, on l'a dit, après ce n'est pas gagné qu'il ... se ressaisisse. Et ça, ça rend Mélenchon malheureux. 

Ce que je crois profondément c'est qu'à partir d'une modestie politique qui nous sauverait des impasses des avant-gardismes autoproclamés et le plus souvent hyperboliquement impuissants, à partir donc d'une abolition des distances théorico-intellectuelles, envers la "masse" (!), de ceux qui prétendent a priori détenir les clés de l'histoire, autant dire LA vérité, la gauche pour de vrai, doit... réintégrer le peuple qui est au Smic, en dessous du Smic, au chômage, en précarité... Elle doit le côtoyer au point d'"en être" et, dans cette proximité d'appartenance, seulement dans cette proximité d'inclusion, poser sa singularité qui lui fait dire que voter Le Pen c'est, hors de tout moralisme con-descendant, inadmissible mais pas au point qu'un qui vote FN soit, à nouveau par essence, FN ! Il est certes avant tout ce que le capitalisme et ses loyaux serviteurs, Hollande et Sarkozy, qui tiennent les commandes politiques, policières et sociales, le réduisent à être dans ce désastreux rapport de forces défavorable qui doit tant à ce que la gauche, partis et syndicats, a concédé au capitalisme; il est aussi ce que nous n'avons pas su ni pu lui montrer que nous pouvions lui apporter pour qu'il se construise en acteur autonome de son propre destin en solidarité avec tous ses semblables, y compris évidemment les immigrés. Et donc nécessairement contre Le Pen ! En somme, avec Guédiguian, on pourrait se mettre à la bonne vieille dialectique de la paille et de la poutre dans l'oeil de chacun tout en gardant le cap de se débarrasser du PS comme de tout ce qui à droite casse le peuple ! Mais sans oublier de commencer par nous débarrasser nous-mêmes de l'outrecuidance qui nous emprisonne dans cette pose du mauvais donneur de leçons antifascistes par quoi est rendu dérisoire et inopérant notre nécessaire antifascisme ! Un antifascisme qui, dans l'évaluation de ce que le peuple fait du FN (pas grand chose encore, on l'a dit), se paie le luxe insensé, chez certains, de cesser de maintenir opératoires les paramètres de la situation sociale, de la situation concrète des couches populaires toujours plus agressées par les mesures qui les ciblent. Cet antifascisme postule, contre les acquis de la psychologie et de la sociologie politique, que face à Le Pen, il n'y a plus de chômage, de misère, de désarroi qui tiennent : la bonne vieille raison doit pouvoir en tout lieu, en toute circonstance, tonner en son cratère car elle, elle est émancipée, délestée de tous les conditionnements psychosociaux ! Le positionnement politique pur de toutes scories sociales peut jouer à plein, tout ouvrier est un intello qui s'ignore et, avec un peu de volonté, le fainéant qu'il est devrait pouvoir mobiliser ses ressorts politiques antifascistes toujours bien tendus et prêts à l'emploi dans les tréfonds éthérés de sa conscience : du pouvoir de l'idée face au "fascisme" ! Il est fâcheux, pour qui dit s'opposer à l'ordre bourgeois du monde, que cette vision des choses relève du rationalisme idéaliste...bourgeois, vaguement moralisateur, n'ait rien à voir, pour ne prendre que cet exemple, avec Marx et enfin contribue à "dissoudre" les marqueurs d'une alternative anticapitaliste qui ne peut jamais faire l'économie, toute politique qu'elle soit, de faire référence au social dans ce qu'il a de plus prégnant dans la vie des individus.

Antoine

A ceux qui penseraient que cette charge contre le conformisme antifasciste de certains dans la gauche radicale est plutôt malvenue dans une page s'ouvrant sur un fort ciblage du PS : ma réponse est que diaboliser le votant lepéniste en "salaud" absolu décentre, quoi qu'on dise, du relatif, ici du rapport à la politique "socialiste" antisociale. Ce décentrement émousse la portée d'un antifascisme qui devrait comprendre (au sens d'être en compréhension analytique) qu' on puisse hélas, en l'absence d'une vraie offre de service en ce sens de la gauche, voter FN pour chercher à faire ce que Guédiguian voudrait : " dissoudre le PS", ce qu'Eric Fassin, de son côté, propose : "Se débarrasser du PS" (voir ci-dessous) et, au passage, de son faux-frère, vrai complice d'alternance au pouvoir, l'UMP.

Note : seule divergence avec Guédiguian, je n'ai aucune illusion sur ces élus socialistes qu'une dissolution du PS "obligerait" à créer un nouveau parti ! Je doute fort en effet que leur prise de distance du moment soit autre chose que cela, du moment ; je doute aussi que ce qui ne se traduit qu'en de dérisoires gestes d'abstention au moment de voter au parlement signifie qu'ils soient "restés socialistes dans leur cœur et leur cerveau" ! On voudra bien m'excuser de ne pouvoir oublier que l'histoire du PS est faite de ces sorties de quelques uns sur sa gauche qui ne servent qu'à poser une balise par où le PS peut se régénérer...pour "retomber à gauche", se refaire une santé et repartir de plus belle à droite ! Qu'on pense, en guise de métaphore illustrant ce processus, au Fabius pourfendeur sec du traité constitutionnel européen et occupant aujourd'hui un des postes clés de ce machin, capitaliste comme jamais, qu'est la Hollandie. Donc d'accord pour dissoudre le Parti dit "socialiste" mais, par pitié, pas pour espérer que se reconstitue une telle "ligue" dissoute, même seulement une de ses fractions. Elle porterait forcément le germe de la renaissance "socialiste". C'est tout autre chose qui doit être créé, par une dissolution en vraie solution de continuité, pour que l'on soit bien dans l'alternative et non plus dans le risque de relancer la mortifère alternance qui est la seconde nature du P"S".

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