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Etat espagnol. Percée de Podemos, le bipartisme chancelle...


 Vérité politique au-delà des Pyrénées, vérité politique, mais à quelles conditions, en deçà ?

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Edito. A propos de pouvoir et de vouloir...des deux côtés des Pyrénées !

Après nos élections régionales si déprimantes venant s'inscrire dans la catastrophique onde de choc de la capitulation estivale de Syriza devant les créanciers et la logistique capitaliste-autoritaire de l'UE, Podemos est venu apporter ce dimanche, depuis l'Etat espagnol, une éclaircie des plus bienvenues. Histoire que ces fêtes (dont on ne peut oublier pourtant qu'elles signifient que ne sont pas à la fête tant des nôtres, migrants, SDF, femmes seules, habitants des quartiers, chômeurs, précaires, étudiants-travailleurs, salariés appauvris et surexploités mais aussi peuples du monde soumis à l'immonde mondialisation antisociale mais aussi guerrière, sans oublier les familles endeuillées ou les blesssé-es des horribles attentats de Paris...), histoire que ces fêtes donc ne  soient pas d'emblée sous le signe de la gueule de bois de la désespérance politique... En deux ans d'existence Podemos a réussi à surmonter bien des obstacles posés par un système rodé pour exploiter et opprimer impunément entre gens bien... de gauche comme de droite (où sont nichés encore des franquistes et leurs héritiers). Il aura réussi également à contourner (certes seulement contourner) ses propres insuffisances politiques qui lui avaient valu une volée de bois vert à l'élection de la communauté de Catalogne en septembre. 

Devenu la troisième force électorale du pays avec 69 député-es sur 350 et quelque 5 millions 200 000 voix (20,66%), il aura réussi à casser le jeu d'alternance complice du PP (droite) et du PSOE (socialistes) en renouant avec l'esprit de la révolte indignée des places de 2011 dont sa direction avait, quelque temps, perdu le fil par de calamiteuses tergiversations tactiques et surtout des carences (non réglées cependant) dans la vie interne. La forte réaffirmation d'une politique posant qu'elle est ouvertement en rupture avec l'échiquier politique bipartite sur lequel repose le système de domination espagnol et son cortège de chômage, bas salaires, de violences policières, d'expulsions de logements... est devenue une source d'espoir pour des millions d'Espagnol-es et de ceux/celles qui dans les nationalités récusent totalement ou partiellement cette assignation identitaire.

On sent bien qu'aussi, de ce côté-ci des Pyrénées, tout cela réchauffe des coeurs militants quelque peu tétanisés. On ne boudera pas notre plaisir d'avoir vu tant de gens reprendre les places, les rues, se presser en masse par milliers, enthousiastes, dans les meetings de campagne pour crier à l'unisson "oui, nous pouvons" ! Et avoir réussi à concrétiser dans les urnes  ce qui, comme le rappellent nos camarades d'Anticapitalistas, membres fondateurs de ce parti, devra impérativement faire jonction avec  des mobilisations précisément de rue, dans les quartiers, les lieux de travail. Histoire de contrer la très prévisible conjonction mortifère des directives des intégristes capitalistes de l'UE, en particulier, tiens donc, sur la dette, et les pièges des alliances pour faire majorité avec le faux frère, vrai ennemi, socialiste, ce pilier de l'ignoble bipartisme bourgeois monarchique !


Arrivés au stade des voeux de fin d'année, nous émettrons celui qu'en référence à ce que fait Podemos, sans céder cependant à aucun mimétisme mécaniste, mythificateur et acritique vis-à-vis de lui, nous mesurions ce qu'il en coûte ici de refuser la rupture avec le PS et de propager le mythe d'une unité de "la" gauche contre la droite...euh non, avec la droite, contre l'extrême droite. Podemos, malgré parfois quelques hésitations, a, jusqu'ici, gardé le cap du refus de se compromettre avec les homologues hispaniques de nos Valls et Hollande, acoquinés, aussi servilement que ceux-ci, pour la défense de l'ordre/désordre existant ! Méditons la chose à l'heure où, dans la foulée de ces régionales, au prétexte de faire barrage à un FN qu'"ils" alimentent, en parfaite circularité hypocrite, par leur politique antipopulaire, il n'est question que de réunir les républicains et démocrates (sic) à la Estrosi et Bertrand  avec "la gauche" ! Outre-Pyrénées ils/elles ont été plus de 5 millions à clairement exprimer que Podemos cela voulait dire aussi "nous ne pouvons pas " faire avec "eux", ce "eux" de "gauche" comme évidemment de droite ! Le Front de Gauche, derrière l'hommage aux turbulents radicaux de l'Etat espagnol, a fait, depuis le début, qui plus est désormais sur le mode "plus éclaté que moi tu meurs", de l'antiPodemos total. Il n'y a au demeurant pas de hasard dans le fait que, d'une part, Podemos ait rompu avec le Front de Gauche espagnol (Izquierda Unida) et que, d'autre part, une force anticapitaliste ait pu trouver, tout en exprimant normalement des divergences, une place à part entière en son sein... A méditer aussi par quelques camarades anticapitalistes ici ! Sans qu'il faille penser, redisons-le avec clarté, qu'il n'y a qu'à faire du Podemos à l'espagnole ici !

Dimanche 20 décembre 2015

Les résultats de Podemos sont les meilleurs dans les régions où il y a eu une ouverture aux mouvements sociaux, ce qui était l’orientation défendue par Anticapitalistas. En Catalogne, avec le mouvement Barcelona en comú. En Galice avec une plate-forme qui vient du mouvement des Indignés, des syndicalistes, des coalitions militantes sur le logement, l’eau, les services publics. A Valencia, la coalition était moins radicale, c’était une alliance avec une scission de Izquierda Unida, avec un discours centré sur l’opposition à la corruption. Cliquer ici

Communiqué d'Anticapitalistas 

Fêtons la percée électorale mais préparons-nous à continuer la lutte pour la rupture.
Nous continuons le combat.


Le rejet des politiques d'austérité budgétaire et d'agression des classes populaires qu'a initié le 15-M [le mouvement des Indigné-es né le 15 mai 2011] s'est aussi exprimé aujourd'hui dans les urnes. C'est une démonstration supplémentaire que nombreux sont les gens qui ne se résignent pas et qu'il existe une large base sociale pour continuer à oeuvrer en faveur d'un changement politique et social radical mettant fin aux expulsions de logements, aux abus des banques, à l'exploitation et à la précarité au travail, aux violences machistes, aux entraves mises au libre choix des peuples [des nations de l'Etat espagnol], à l'écocide.

Le PP [Parti Populaire, droite] a été le premier parti en voix mais a subi une grande baisse en sièges. Il existe à l'évidence une majorité sociale pour mettre ces gens-là dehors, qui ne veut pas que le parti de Bárcenas [l'ancien trésorier national du PP mis en examen pour corruption] et de l'affaire Gürtel [dans laquelle est impliqué ce personnage pour financement illégal de son parti] continue à gouverner. La corruption et le gouvernement en faveur des riches et contre les classes travailleuses se payent. Cela est une bonne nouvelle : derrière le changement politique, derrière la redistribution du pouvoir parlementaire, il y a une forte contestation sociale.

Le PSOE ne s'effondre pas et cela n'est pas une bonne nouvelle. Il baisse en voix et en sièges, mais sa résistance indique les limites du processus de changement : sans mobilisation, il est difficile de continuer à éroder le PSOE. Le défi qui nous est posé est la nécessité où nous nous trouvons de mettre dehors le PP sans que cela se traduise par une légitimation du PSOE, cette "gauche" qui applique des politiques néolibérales, qui a toujours gouverné en faveur des élites.

Le phénomène Ciudadanos [Citoyens] s'est avéré en dessous des attentes. Sa quatrième place est un rappel que les gens préfèrent l'original à la copie et que le centre, dans un contexte de polarisation politique, présente de sérieuses difficultés pour se développer. Son programme, un produit de la FAES [laboratoire d'idées du PP]  et d'autres laboratoires néolibéraux, a été incapable de devenir l'alternative [de droite] au bipartisme. 

Notre référent électoral, Podemos et les listes de convergence (En Marea, En Comú Podem, Compromis-Podem), se sont retrouvés à la troisième place, avec une importante poussée en voix qui recueille le fruit de ce qui a été accumulé par le 15-M et le cycle de luttes antérieur ainsi que le mécontentement social envers les politiques d'austérité, envers aussi les partis de la  gauche traditionnelle. Il convient de signaler qu'en Catalogne l'écrasante majorité de l'électorat s'est prononcée pour le droit à décider.

Nous avons des raisons de fêter le résultat, mais il importe qu'à partir de maintenant nous nous préparions pour demain, pour aller au-delà du possible ballet des pactes et des alliances. La Troïka va exiger, quel que soit le gouvernement, plus de coupes sombres, les expulsions de logements vont se poursuivre et le capital conserve intactes ses bases de pouvoir : voilà qui dit le combat qui nous attend et, à cet effet, il nous revient de nous renforcer par en bas (avec d'autres camarades, comme ceux et celles d'IU-Unidad Popular), sur tous les plans. Les urnes sont closes, la lutte de classes continue.

L'instabilité institutionnelle résultant de ces élections ouvre de nouvelles possibilités. Y compris pour ceux et celles qui, comme nous, font le pari que le changement politique débouche, non pas sur une nouvelle transition (1), mais  sur une nouvelle révolution démocratique qui permette le libre choix des peuples et la participation des citoyens dans toutes les prises de décision, ce qui implique d'oeuvrer pour lancer de nouveaux processus constituants; une révolution démocratique qui conteste l'actuelle répartition des richesses, les rapports économiques et de propriété, qui assure la prise en charge et le contrôle publics et démocratiques des sources d'énergie et des finances; une révolution démocratique enfin qui vise à construire une société libérée de l'oppression et de l'exploitation.

Fêtons la percée électorale mais préparons-nous à continuer la lutte pour la rupture. Continuons le combat.

Anticapitalistas, 21 décembre 2015 http://www.anticapitalistas.org

(1) Allusion à la Transition démocratique qui, après la mort de Franco (1975) a permis, avec l'implication du PSOE, du PCE et des syndicats, le recyclage des élites franquistes. Ce terme a perdu, depuis le mouvement des Indigné-es, l'aura qu'il avait conquise dans certaines couches de la population et qui légitimait le régime monarchique ainsi que le bipartisme. Le tout sur fond d'intégration radicale dans la logique capitaliste de l'UE, ce qui, avec l'explosion de la crise économique (2008), a débouché sur les ravages sociaux sur lesquels les Indigné-es puis Podemos construisent leurs réponses politiques. L'idée d'une seconde transition est rejetée ici par Anticapitalistas car, comme la première, elle est suspectée, à juste titre, de fonctionner comme désactivateur de l'idée de rupture avec le système, comme détournement du mécontentement social vers la perpétuation de l'ordre social et politique en place.

(traduction : Antoine)

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