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Vote utile, vote utile ... est-ce que j'ai une gueule de vote utile ?


Ce n'est pas Le Pen de se farcir Macron !

A lire ci-dessous Point de vue : Macron/Le Pen, jeu truqué ... on le sent bien, mais finissons de le déconstruire ! (Antoine)
 

[…] "L'enjeu de cette élection présidentielle n'est pas de savoir si Le Pen sera élue ou non -elle ne le sera pas- mais de savoir qui sera l'autre qualifié pour le second tour, qui sera élu deux semaines plus tard".

Loin de sous-estimer les chances de Le Pen d'être élue, je pense donc que les électeurs sur-estiment les chances de Le Pen qui sont en réalité proches de zéro. J'ajoute que cette opinion, reposant à titre principal sur les résultats des élections régionales en Haut-de-France et en PACA, est confortée par toutes les enquêtes d'opinion. Après avoir écrit le commentaire précité, j'ai effectué une vérification : sur plus de 200 sondages effectués depuis 2012, Le Pen a été donnée gagnante une seule fois. 

C'était au cas, non corroboré par les résultats du premier tour du sondage lui même, où Hollande lui serait opposé au second tour, au moment ou ce dernier touchait le point le plus bas de sa cote de popularité. Il en disait davantage, comme la suite l'a démontré, sur les chances de Hollande que sur celles de Le Pen... Dans tous les autres sondages, Le Pen est donnée battue au second tout, et ce, très largement. Cliquer ici

Point de vue
Macron/Le Pen, jeu truqué ... on le sent bien, mais finissons de le déconstruire !

Le billet ci-dessus prend délibérément à rebrousse-poil la tétanisation à laquelle on cherche à soumettre notre positionnement concernant la prochaine, très prochaine, élection présidentielle. Nous l'avons écrit ailleurs (lire ici), Marine Le Pen sert avant tout d'épouvantail permettant au système de rabattre vers ce qui reste son option utile de domination aujourd'hui et qui passe par la reconduction de ce qui est désormais, depuis le basculement intégriste, avec Hollande, du PS dans le social-libéralisme, le tandem des droites autoritaires : PS/LR. Le candidat des LR, François Fillon, étant, contre toute attente, carbonisé, c'est du côté du pôle PS que se passe probablement l'essentiel des manoeuvres pro-système.

 De l'huile dans les rouages électoraux ce n'est pas mieux...


Il faut commencer par relever que ledit système (où jouent un rôle décisif les médias dominants largement (re)pris en main par des figures majeures du patronat) est largement conscient que les exigences de sa perpétuation des rouages capitalistes provoque la décrédibilisation des gouvernants. Tout à sa capacité économique à se réajuster en permanence, il a réussi à faire monter, paradoxalement de l'intérieur de l'édifice qui est en train de s'écrouler, le PS, celui qui est chargé d'incarner la relève. On notera la prouesse qui consiste à parer de l'aura de la nouveauté en politique celui qui, de fait, est l'un des promoteurs clés de la politique économique...défendue par ce PS depuis 2012. Macron, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est le produit d'une opération, dont il n'est pas nécessaire de penser, de façon complotiste, qu'elle est "programmée" par une entité occulte, de balisage de l'alternative à la politique ... en marche.  D'une alternative (au PS)...pour l'alternance donc dans la continuité des choses ! 

Notre jeune "banquier" n'a d'autre fonction que de permettre au PS de renaître de ses cendres, étant entendu que le PS, au sens classique d'une social-démocratie parvenant à faire oublier qu'elle était largement gagnée au social-libéralisme depuis les années Mitterrand, est mort depuis fort longtemps ! Cette renaissance macronisée de ces cendres c'est celle des "blairistes", des morts-vivants de la bande organisée autour de Hollande, Valls, Le Drian et tant d'autres qui ont usé (usurpé) tant qu'ils ont pu de la fiction qu'ils étaient de gauche. Avec cinq ans de hollando-vallsisme (la séquence Ayrault est une parenthèse de transition si l'on peut dire) et l'apothéose d'une Loi "travail" directement connectée au siège du Medef et d'un état d'urgence reconduit policiarisant comme jamais (enfin on se comprend) l'Etat, le PS a perdu tout ressort de légitimité de gauche mais aussi tout simplement de légitimité politique. Macron, infiltré puis exfiltré à temps du gouvernement, participe d'une action de marketing politique assez réussie à la façon lampédusienne du "tout changer pour que rien ne change" : il s'agit, mot pour mot, de donner le change auprès d'un électorat déboussolé, tenté, en particulier dans les couches populaires, de se réfugier dans l'abstention, voire pour certain-es dans le FN, mais il s'agit aussi de récupérer tout ce qu'il est possible de récupérer du personnel du moribond PS car on n'improvise pas une politique de classe capitaliste, en si peu de temps. 


Il faut simplement mettre les formes: en l'occurrence mettre sur orbite "un homme nouveau" transcendant le "vieux" clivage gauche/droite, en en disant le moins possible sur ce que sera ... la continuité de sa politique avec celle de ses prédécesseurs, soit, en premier lieu la sienne ! En assumant de tourner, il faut le faire, à vide ou plutôt essentiellement sur l'image pour faire oublier la politique. Macron est de ce fait même une tentative totale de dépolitisation qui convient tout à fait à l'idéologie intrinsèque du capital : le développement libre de la marchandise, quels que soient, au fond, les moyens d'y arriver ! Là, paradoxe des paradoxes, on nous "vend" ... gratuitement le produit Macron dont, en réalité, le coût n'est que différé : on paiera cash, et cela sera douloureux, après, en une sorte de crédit à solder, le crédit qu'on aura politiquement bien voulu accorder au bonhomme. Ce qui se paiera ce sera le relookage du vallso-hollandisme, qui était un sarkozysme à peine déguisé, où sera parachevée l'attaque contre les droits sociaux et les libertés.

Marine Le Pen dans tout cela ? Elle n'a pas été oubliée car elle est l'autre face du dispositif visant à adapter le mode de domination aux circonstances inévitables de la délégitimation des gouvernants en place. 

Conscients que l'opération Macron est fragile, les promoteurs de cette opération n'hésitent pas à user étonnamment d'une vieillerie idéologique, signe que le système n'a pas d'idéologie autre que celle, que nous avons évoquée plus haut, de la marchandisation, laquelle comme l'argent qui lui est intrinsèquement associé, n'a pas pas d'odeur ni de valeurs... éthiques (pardon pour la redondance, il faut distinguer de la valeur qui fait loi économique dans l'ordre du capital). Cette vieillerie, c'est l'antifascisme : rien de tel qu'instrumentaliser la menace d'un "heil Marine" pour que le frisson parcoure l'échine de nombre de gens, souvent très à gauche qui sont prêts à faire tout (soit n'importe quoi au double sens de l'expression) pour conjurer cette menace, en votant Macron ! Et tant pis si pour cela il faut s'aligner sur celui qui, en récupérant la veine antifasciste mais, attention, sans avoir l'air d'y toucher, l'image ne le supporterait pas, jette par-dessus bord tout l'outillage émoussé de "la gauche" et surtout sur celui qui, par sa politique économique radicalement antisociale est l'un des activateurs essentiels de la montée des désespoirs dont s'alimente, pour partie, le FN ! Circularité infernale de l'impuissance du vote utile qui, se voulant vote du moindre mal, travaille toujours au pire (dans l'immédiat le macronisme à venir).

Voilà pourquoi, sans tout approuver de ce qui y est dit, nous pensons que le billet qui ouvre cette page est une bonne prise d'appui pour dénoncer la supercherie, inscrite dans la promotion du produit Macron, du danger que Marine Le Pen soit élue. A lui seul, le dépoussiérage macronien de la gauche "socialiste" et corrélativement la captation de pans du centre et de la droite séduits par sa capacité à tirer l'essentiel de l'attelage de la gauche de droite plus à droite encore, reste aléatoire. Rien ne vaut l'agitation de l'épouvantail fasciste pour resserrer les rangs. Mais la gauche qui était censée antan être le noyau dur de ce resserrement est aussi évanescente que ne l'est le danger fasciste lui-même ! Et cet antifascisme de pacotille car foncièrement électoraliste, ne servirait qu'à redonner du souffle à une politique que pourtant l'on condamne et qui, le renoncement de Hollande à être candidat ainsi que l'échec de Valls à suppléer à cette défaillance le prouvent, était à la recherche de l'homme providentiel pouvant la continuer.

Restent Mélenchon et Hamon. Brièvement, le premier est une branche du vieux socialisme qui, comme c'est à l'oeuvre autour de Macron, casse, mais à sa façon tonitruante et soi-disante radicale, avec l'arbre (y compris, mais c'est compliqué, avec le rejeton communiste qui avait fini par s'y greffer). Quitte à se greffer lui-même sur un autre arbre, le vieil arbre républicain national assez mal en point car lui-même ravagé par les impacts "modernistes" de la mondialisation et lesté par une histoire enracinée dans l'ordre bourgeois forgé par la colonisation et la répression du mouvement ouvrier... socialiste (et anarchiste) ! La tentative de revitaliser la République par un bonapartisme cherchant une légitimité à gauche (abrogation de la Loi "travail") tout en prospectant bleu-blanc-rouge à droite et à l'extrême droite (appui aux policiers descendant dans la rue pour exiger plus de répression et de condamnations que l'état d'urgence ne leur en a accordées !) ajoute à la confusion et à la désorientation que le macronisme suscite sur les moyens de se sortir de l'ornière politique et sociale qui signe la panne de "l'alternative", au plein sens du mot.

Hamon, lui, est totalement sur la défensive car il n'est pas en phase avec ce que sont les tréfonds du parti dont il est devenu le candidat. Il est l'homme du contretemps dont on peut dire qu'en restant prisonnier d'un parti qui ne veut pas de lui, il invalide le projet fou de faire revenir celui-ci à la séquence d'avant : avant Hollande et Valls (et Macron) quand on pouvait faire social-libéral en conservant le masque de la social-démocratie. Hamon est la pitoyable incarnation qu'il est impossible de faire revenir le PS de son basculement dans le thatchérisme...

Hamon et Mélenchon se condamnent probablement à faire de la figuration dans la mécanique rodée décrite ci-dessus, avant tout par électoralisme mais aussi par leurs projets articulés à des schémas cherchant à mobiliser, sans ruptures décisives avec l'existant, du neuf avec du vieux.


En conclusion, on notera ceci qui manque au billet, au demeurant pertinent sur la démystification du danger frontiste et du vote utile dont il est le levier : ce vote utile, il faut le situer, comme nous avons essayé de le faire ici, plus fortement qu'il n'est fait dans ledit billet, avec ce que porte Macron. Le Pen sans Macron, cela n'a pas de sens ! Par ailleurs, tout ceci légitime notre option défendue par Philippe Poutou : celle de refuser évidemment d'entrer dans une quelconque tactique de vote utile, ni au premier ni au deuxième tour. Nous défendons un contrefeu à ce que le matraquage politique sur le doublet du danger Le Pen/la solution Macron impose comme dépolitisation des enjeux et comme apolitisme par lequel, s'ils gagnaient les esprits, le capitalisme est assuré d'engranger une victoire de plus.

Mais ce qu'il faut retenir, plus au fond, de l'inanité du vote utile c'est qu'il s'agit d'une inanité ...utile à quelque chose : à légitimer ce qui n'est qu'une vaste mascarade politicienne, l'élection présidentielle. Celle-ci, dans sa logique interne, sert à reconduire, sous l'affabulation qu'elle pourrait rebattre les cartes politiques, l'ordre dominant, des dominants. L'ordre capitaliste qui, malgré sa crise, ou plutôt grâce à son pouvoir de mettre en crise la représentation politique des dominé-es, fait la preuve de son grand atout : il est capable de tout, de faire passer Macron pour un homme de gauche tout en le validant à droite, et même en le susurrant comme l'antifasciste moderne. L'ordre capitaliste pourrait être capable de tout, en optant pour Marine Le Pen, mais, dans l'immédiat, en particulier de par la logique européiste du patronat et de par l'inexistence d'un danger menaçant du côté des opprimé-es, cette option n'est pas d'actualité. Mais elle est utile pour faire peur (et pour continuer à diviser entre "nationaux" et étrangers et ainsi à accroître la crise de représentation politique des couches populaires*) et rabattre électoralement les peurs vers le gentil Emmanuel ! Macron-Le Pen, même combat ! Hamon-Mélenchon, même défaite !

Avec Philippe Poutou nous proposons de donner un grand coup dans cette fourmilière travaillée par un grenouillage où les salarié-es et l'ensemble des couches populaires ont tout à perdre. Desserrer l'étau électoraliste constitué par le couple des frères ennemis Macron vs Le Pen, passe par voter ...utile, voter Philippe Poutou : lequel ne s'engage dans ce jeu truqué que pour en dénoncer le trucage et, de façon totalement antiélectoraliste, en appeler à quitter la scène électorale et à retrouver la mobilisation sociale. Dans le pari que c'est là que se construisent les seules orientations politiques pour le peuple (dans ses articulations de classes assumées) parce qu'elles sont portées par le peuple ! Mais dernier des paradoxes convoqués dans ces lignes : en apportant le maximum de voix à la candidature de Philippe Poutou, vous enverrez le signal fort sur le terrain même de l'ennemi, les élections, que c'est ailleurs que vous allez porter le fer, celui d'un anticapitalisme qui doit redevenir l'horizon indépassable de notre temps !

Antoine

* Cette fonction politique hic et nunc du FN, actuellement instrumentalisée par le système comme repoussoir en faveur de Macron, implique que nous menions le combat contre ce parti. Indépendamment du fait que ce parti puisse devenir une option de pouvoir, en fonction de la décomposition des autres options disponibles pour maintenir l'ordre des choses, à commencer par le macronisme. Ce qui, quoique les choses puissent s'accélérer, ne nous semble pas être d'actualité.

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27 mars. Point de vue. La victoire de Marine Le Pen n'est pas impossible, seulement improbable. Cela dépend du niveau d'abstention : Marine Le Pen, une faille de taille dans le plafond de verre (Libération)

26 mars. Les tractations débutent en vue d'une alliance PS-"En Marche !" 

L'extrait d'un commentaire par Sycophante des objections faites au billet qu'il a écrit et qui est recensé en tête de cette page.

[…] la comparaison avec les régionales est très pertinente : si Le Pen n'est pas capable de gagner dans une région où elle part de 41% et où le fait qu'elle gagne a des conséquences potentielles beaucoup moins graves que dans le cas de l'élection présidentielle, comment gagnerait-elle une élection présidentielle où elle part de beaucoup plus bas ? L'idée selon laquelle les abstentionnistes et les indécis peuvent se révéler être la cause d'un tsunami en faveur de Le Pen n'a pas de consistance : ces électeurs se répartissent dans tous les camps. Une plus forte participation qu'anticipée actuellement peut cependant jouer en faveur de Le Pen dans la mesure où elle est forte dans les catégories sociales où l'abstention est plus forte qu'en moyenne (classes populaires, jeunes) et plus faible dans la catégorie sociale où elle est plus faible (les plus de 65 ans). C'est pourquoi Le Pen peut faire entre 30 et 35% au premier tour alors que les sondages lui accordent aujourd'hui 26 à 28%.

[…] Si Fillon est éliminé une partie de ses électeurs se reportera en effet sur Le Pen pour empêcher Macron de gagner. D'autres voteront également pour Le Pen. C'est pourquoi Le Pen atteint au second tour entre 37 et 40% contre Macron. Mais il faudrait des circonstances très particulières et dévastatrices pour Macron pour que Le Pen atteigne 50%. C'est pourquoi j'estime que ce scénario a une probabilité d'occurrence proche de zéro.  

Aucun sondage n'a jusqu'ici donné Le Pen élue (à l'exception d'un seul, contre Hollande, indiqué dans le billet). Elle est toujours battue, et très sévèrement battue. Vous pouvez penser le contraire et qu'elle a une sérieuse chance de gagner mais sur quels éléments objectifs s'appuie cette conviction, à part la magie ? Vous dites : "C'est pourquoi on peut très bien élire MLP sans que personne ne l'ait collectivement voulu. C'est la magie de la machinerie électorale." 

Non, si Le Pen est élue c'est que plus de la moitié des suffrages exprimés se seront portés sur elle. 

Les taux de report que vous utilisez pour envisager le cas où Le Pen gagnerait ne correspondent ni à ceux que l'on a constatés lors d'élections passées où le FN était au second tour, ni à ceux qui apparaissent lorsque l'on pose la question aux électeurs. La matrice de reports que vous utilisez est très éloignée de ce que l'on sait des reports passés ou de ce que l'on peut pressentir des reports futurs. Un exemple : seuls 10% des électeurs de JLM disent pouvoir se reporter sur Le Pen. Or vous prenez près de 50% (6% sur 13%). Idem pour le taux de reports d'électeurs de Hamon vers Le Pen : il est en réalité proche de 5% au plus.. 

[…] Les sondages donnaient le Brexit...gagnant. Trump a été sous estimé de 2 points nationalement, ce qui était dans la marge d'erreur. Clinton a eu excactement le score que prévoyait la moyenne des sondages..L'élection de Trump était parfaitement envisageable. J'avais d'ailleurs écrit à la veille du vote qu'il avait environ une chance sur trois. Les sondages concernant les primaires sont beaucoup moins fiables que ceux des élections générales car la volatilité à l'intérieur d'un même camp est supérieure à la volatilité de l'ensemble du corps électoral.
 
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