À la Une...

Eclairage sur le Secours Pop

 



Thibault, salarié du Secours Populaire Français de l’Hérault, a bien voulu répondre à nos questions. Qu’il en soit remercié !

Serge : Thibault, tu as été bénévole au SPF. Tu es salarié depuis quelques semaines. Peux-tu brièvement présenter tes activités au Secours populaire ?

 
Thibault : En tant que salarié, je suis dans ce qu’on appelle la coordination de Montpellier pour l’animation des antennes, faire en sorte que chaque antenne soit au courant de ce qu’il se passe sur le secteur de Montpellier, qu’elles puissent interagir et harmoniser leurs pratiques. Il existe plusieurs antennes, une dans le quartier de la Mosson, une dans le quartier de la Pompignane, une dans le quartier du Pas du loup qu’on appelle la Cité Paul Valéry, une dans le quartier Saint-Martin, plus ce lieu de distribution ici, le Marché Solidaire. Il existe aussi une antenne spécifique pour les étudiants à l’université Paul Valéry et une antenne pour le don de vêtements aux personnes accueillies à Figuerolles. Enfin, une antenne au Petit- Bard qui n’a pas pour mission l’aide alimentaire ou vestimentaire mais l’aide aux devoirs pour les enfants.


S : Quelles sont les valeurs du SPF ? En quoi le Secours populaire se différencie-t-il des associations caritatives ?

 
T : Les valeurs du SPF sont avant tout la solidarité, la tolérance, l’accueil inconditionnel dans nos antennes, le respect. L’indépendance est une valeur très importante au Secours Populaire. Nous ne sommes pas politisés, ne prenons pas parti sur des sujets politiques.
Nous ne sommes pas une association caritative mais une association de solidarité. On aime faire en sorte que les personnes accueillies portent cette solidarité, qu’elles en deviennent actrices. C’est en cela que nous nous démarquons beaucoup. Que ces personnes viennent pour un colis alimentaire, obtenir une autre aide, pour un séjour de vacances…, elles peuvent elles-mêmes prendre part à nos activités et développer des solidarités.


S : D’ailleurs, on parle de « personnes accueillies », pas de « bénéficiaires »…

 
T : Tout à fait.


S : Le SPF a pour principe d’ « agir sur les conséquences et non sur les causes ».Quelle en est la traduction concrète ?

 
T : On ne fait pas de politique. Si une personne a faim, on va lui proposer à manger. Si elle a besoin d’aide pour ses papiers, on va lui proposer de l’aider à rédiger ses droits pour obtenir ce qu’elle souhaite. On ne va pas creuser sur ce qui bloque, sur ce qui a amené ces personnes dans la pauvreté. L’idée, c’est d’agir sur les conséquences et de proposer une aide concrète aux personnes concernées.


S :Quels sont les champs d’intervention du Secours Populaire Français? Peux-tu nous parler aussi des campagnes nationales ?

 
T : Nous sommes des généralistes de la solidarité. On fait de l’accès aux droits, de l’accès à la culture, aux vacances, aux loisirs, bien sûr à l’alimentation, aux vêtements…Dès qu’on a la possibilité de créer des solidarités, on se lance. On n’a pas de carcan. Dès qu’on a un projet solidaire, on peut le faire au Secours populaire et ce, dans tous les domaines.
On a plusieurs campagnes nationales car le SPF est une association nationale constituée de plusieurs fédérations départementales elles-mêmes constituées de plusieurs comités et antennes qui sont autonomes dans leur gestion. Ces campagnes vont orienter nos actions sur plusieurs thèmes. Avant les vacances d’été, on entre dans la « campagne des vacances ». On récupère des dons pour faire partir en vacances des enfants, des familles, des personnes âgées…Ensuite, il y a la campagne « pauvreté précarité ». Nous faisons appel aux dons pour l’ensemble de nos actions contre la précarité. C’est aussi le moment où nous menons des enquêtes au niveau national pour faire remonter le taux de pauvreté en France. Puis c’est la campagne des « Pères Noël verts ». Les Pères Noël verts donnent un coup de main au fameux Père Noël rouge pour que tous les enfants puissent recevoir un cadeau à Noël, même les plus précaires. Puis vient la campagne « Dons action ». C’est une tombola au mois de mars avec des billets à 2 € et des lots extraordinaires. Ces 2 € sont alloués au fonctionnement du Secours populaire, pour acheter un camion, trouver des locaux… Ensuite, il y a la campagne du « Printemps de la solidarité ». On mène là des actions en faveur de la solidarité mondiale, pour intervenir en cas de catastrophes ou pour des projets de développement à la demande d’une association locale hors de nos frontières qui demande de l’aide. On travaille toujours avec les associations locales, on n’intervient jamais seul.


S : Et pour le SPF34, dans quels domaines agit-il ?

 
T : Dans tous ces domaines-là. Même à l’international, nous avons des projets en Grèce, au Nicaragua, au Sénégal sous forme d’aide financière ou concrète. Par exemple, des enfants d’ici ont envoyé des lettres et des peluches aux enfants des camps de réfugié.e.s en Grèce. Il y a plein d’exemples.


S : Qu’est-ce que le Saxo ? Quelles sont ses ressources ? Comment fonctionne ce Marché Solidaire ?

 
T : Le Saxo est le petit nom du Marché solidaire du Secours populaire qui a été monté à Montpellier en avril 2020 pour répondre à ce qu’on appelait « la crise sanitaire ». Cela s’est très vite transformé en crise économique pour les personnes à l’arrivée du Covid. L’idée a été de réquisitionner un bâtiment auprès du Conseil départemental pour continuer la distribution alimentaire qui s’effectuait jusqu’à présent dans les antennes mais celle-ci n’avaient plus la place pour accueillir dignement les personnes qui arrivaient en nombre de plus en plus important. On voit les chiffres. Il fallait aussi un espace pour respecter les gestes barrières, qui soit aéré. C’est un bâtiment qui a la forme d’un hangar qui permet la libre circulation, le libre choix pour les personnes accueillies qui composent leur colis alimentaire. Elles viennent toutes les deux semaines après avoir été inscrites et orientées par les travailleurs sociaux dans les antennes du SPF34. Elles sont ensuite orientées vers le Saxo. J’interviens aussi sur ce marché solidaire afin d’en assurer le fonctionnement avec plus de 70 bénévoles qui gravitent autour de ce lieu et qui permettent de le faire vivre.


S : Lesquel.le.s bénévoles peuvent être aussi des personnes accueillies d’ailleurs…

 
T :Tout à fait. Sur 70 bénévoles voire plus, plus d’un tiers sont des personnes accueillies qui, comme les autres personnes accueillies, récupèrent leur colis alimentaire quand elles en ont besoin.


S : Qu’en est-il du profil sociologique des personnes accueillies plus précisément depuis le début du confinement, il y a un an. Cette date marque-t-elle une explosion des demandes de colis alimentaires ?

 
T : Forcément, il y a eu de plus en plus de demandes de colis alimentaires. La crise économique qui arrive avec la crise sanitaire se fait ressentir. Tous les nouveaux profils qu’on reçoit depuis le 17 mars 2020, depuis le premier confinement, depuis que la France a un peu arrêté de travailler, sont des restaurateurs, des hôteliers, des intermittents du spectacle, des CDD ou intérimaires…qui se trouvent pour la première fois dans la précarité et qui font appel au Secours populaire. Ce n’est pas facile pour ces personnes-là car ce n’est jamais simple de franchir la porte du Secours populaire. On vient chercher un colis alimentaire parce qu’on est dans une situation compliquée. On essaie de faire un accueil sympa et chaleureux mais psychologiquement, ça reste difficile pour les personnes.
Le profil des personnes est très varié ; ça va du sans abri en passant par la famille qui vit sur un seul smic, un smic pour 6 personnes parfois… Il y a aussi beaucoup d’étudiant.e.s, de demandeur.euse.s d’asile, des sans papiers, des personnes seules, des retraité.e.s avec une toute petite retraite. Il faut savoir que le Secours populaire distribue un colis alimentaire à toute personne qui a moins de 10 € de « reste à vivre » par jour. C’est un savant calcul qui est effectué avant dans les antennes par des bénévoles spécialistes.


S : Le SPF comme d’autres associations ne se substitue-t-il pas  aux pouvoirs publics sur la prise en charge des personnes en difficultés ?

 
T : C’est bien le problème. On a répondu à la crise, c’est un avis personnel mais je pense partagé par la plupart des personnes au Secours pop, on rappelle aux politiques, aux institutionnels qu’effectivement, on n’est pas là pour les remplacer. Sauf que  lors de l’arrivée du Covid, ce sont la Ville, la Préfecture, le Département qui se sont tournés vers nous pour nous demander si on avait la capacité de faire la distribution de l’aide alimentaire  pas pour l’ensemble de la ville de Montpellier, car ce serait impossible, mais pour les publics précaires notamment les publics des squats et des bidonvilles qui, à eux deux, rassemblent plus de 2000 personnes. Nous nous sommes retrouvés à faire des distributions sur ces squats et ces bidonvilles ou alors également sur ce marché solidaire avec 2000 personnes. On avait 4000 personnes qui arrivaient d’un coup toutes les 2 semaines qu’il fallait gérer pour une distribution. C’était une demande des institutions. Nous avons répondu que nous pouvions le faire à condition que tous les coûts au niveau logistique, au niveau alimentaire (achats, etc…) soient pris en charge par ces institutions-là. Elles ont joué le jeu. Cela a permis de faire la distribution.
En même temps, la veille du premier confinement, il y a eu une réunion au Ministère, je ne sais plus lequel, avec les grands pontes des associations de solidarité. Il y avait deux choix selon le Ministère pour la distribution alimentaire. : soit c’est l’armée, soit ce sont les assos…Les associations de solidarité ont unanimement répondu qu’elles ne laisseraient pas l’armée retourner dans les rues faire la distribution alimentaire, on n’est pas en guerre. On voulait éviter ça à tout prix. Du coup, on a accepté quelque part de prendre en charge cette problématique mais on n’oublie pas de rappeler régulièrement aux institutions avec lesquelles on travaille que toute cette précarité, elle n’est pas là pour rien et que ce serait bien qu’elles agissent pour la réduire. Le Secours populaire a également un rôle d’aiguillon des pouvoirs publics.


S : Comment peut-on soutenir l’action du SPF ?

 
T : C’est simple, il y a plusieurs moyens. Soit en devenant bénévole. En ce moment au marché solidaire, nous sommes déjà nombreux, on ne va pas faire appel à de nouveaux bénévoles sur ce lieu mais pour d’autres actions, l’accès aux droits, à la santé, l’accès à la culture, des actions qui peuvent se réaliser en comité réduit avec les gestes barrières, on peut s’adresser directement à la Fédération de l’Hérault du Secours populaire : contact@spf34.org ou benevolat@spf34.org
Il est toujours possible de faire un don. Le SPF est une association indépendante qui vit majoritairement grâce aux dons des particuliers et des entreprises. N’hésitez pas à faire des dons sur notre site internet. Le don peut être dédié au comité local proche du domicile du donateur ou à la fédération ou au national avec la possibilité de cibler une action précise. Le SPF est transparent sur l’utilisation des dons.

(réduction d'impôt égale à 75% du montant du versement)

 https://don.secourspopulaire.fr/b/mon-don

 

 

 

                                                                                      Interview réalisée le 18 mars 2021
                                                                                      Serge, correspondant NPA34
 


Consultez les articles par rubrique


CORONAVIRUS

LUTTES SOCIALES
FÉMINISME
ANTIRACISME ANTIFASCISME
>


SOLIDARITÉ MIGRANTS
ÉCOLOGIE
JEUNESSE ENSEIGNEMENT


POLITIQUE LOCALE
DÉBATS
POLITIQUE NATIONALE


INTERNATIONAL
RÉPRESSION
NPA