Suppléante au profil atypique, Jamalat Abou Youssef participe à son
premier scrutin en France sous les couleurs du Nouveau parti
anticapitaliste. Après de nombreux combats en Palestine
Elle est née au milieu de la vigne et des vergers de prunes. À des
milliers de kilomètres du Lot-et-Garonne, à Halhoul, près d'Hébron en
territoire palestinien. Avant d'étudier la comptabilité à l'université
de Bethléem, Jamalat Abou Youssef a connu les travaux des champs sur
l'exploitation familiale.
En arrivant en France il y a cinq ans, où elle a suivi son Français de
mari, rencontré en Palestine lors de la seconde Intifada, Jamalat est
retournée aux champs, comme saisonnière agricole. Aujourd'hui, elle est
employée au planning familial d'Agen, « en contrat aidé. C'est le lot
d'une femme immigrée. L'accès au travail est difficile, limité à des
champs d'action très restreints comme le ménage ou les travaux
agricoles. »
Jamalat Abou Youssef a acquis la nationalité française il y a huit ans
et est une des rares représentantes des territoires à vivre en
Lot-et-Garonne : « Je connais une autre Palestinienne, à Agen. Elle est
médecin généraliste mais au chômage… »
Printemps arabes
Son parcours est complexe et riche de nombreux engagements militants, à
commencer par celui de la défense des paysans contre la confiscation de
leurs terres par les colons israéliens ou son travail au sein d'une ONG
palestinienne de défense des femmes travailleuses. Jamalat est une femme
de lutte et c'est tout logiquement qu'elle a aussi décidé de s'investir
localement en devenant suppléante de Vladimir Belmon, candidat du
Nouveau parti anticapitaliste (NPA) aux législatives sur la
circonscription d'Agen-Nérac.
Une suppléante pour le moins atypique si on la compare à ses homologues
engagés dans cette course. Jamalat sait pertinemment que le duo n'a
aucune chance de l'emporter. Mais qu'importe… « On ne fait pas campagne
pour gagner et le changement passe par la révolution des peuples, pas
par les urnes. » Des révolutions, elle en a suivi quelques-unes. Les
plus récentes datent du printemps arabe. Désormais, c'est la phase tout
aussi délicate des élections de l'autre côté de la Méditerranée qui la
préoccupe.
Jamalat se décrit comme « une militante internationale ». Elle est donc «
aussi concernée par les problèmes locaux : la jeunesse, le droit des
femmes, le chômage ou la crise due au système capitaliste » et rappelle
que « les questions internationales concernent aussi les Français ».
Paysans locaux
En parcourant les journaux, elle a été surprise de voir que la presse et
les partis politiques français consacraient si peu de place à ces
questions. C'est finalement dans l'hebdomadaire du NPA qu'elle a trouvé
son compte, des prises de position qu'elle partageait sur la
mondialisation ou la justice sociale. Longtemps membre de la gauche
palestinienne, elle s'était rapprochée du Parti communiste français
(PCF) mais n'a pas adhéré à « sa vision trop occidentaliste de la cause
palestinienne ».
Aujourd'hui, Jamalat Abou Youssef dit s'inquiéter pour l'avenir de son
enfant. « Ici, la situation est plus favorable, reconnaît-elle. Mais
comment ne pas penser à ceux qui souffrent en Afrique et dont personne
ne parle ? » Localement, en campagne, sa « première pensée va aux
paysans ». Du candidat Vladimir Belmon qu'elle soutient, elle se montre
assez admirative : « Il est responsable et se sent concerné pour la
jeunesse française et l'avenir de son pays. C'est un jeune (il a 20 ans,
NDLR) comme il y en a trop peu, un modèle qui travaille et se mobilise.
»
L'après législatives
Si elle a voté à la dernière présidentielle, « seulement au premier tour
», elle n'attend donc pas grand-chose de ces législatives mais apprécie
qu'elles permettent de porter le débat sur des questions trop souvent
absentes à son goût. La « situation catastrophique » que connaît
aujourd'hui le peuple palestinien, sous la contrainte « d'une occupation
sioniste » dont l'emprise grignote le territoire de son, enfance, la
révolte toujours autant.
Alors, même si son enfant a une vie plus douce ici, une fois les
élections législatives passées, la petite famille retournera s'installer
en Palestine : « Ça bouge là-bas. Je serai peut-être plus utile. »
Illustration : jamalat.jpg
Agen. Vladimir Belmon, 20 ans, candidat aux Législatives (La Dépêche)
Candidat à 20 ans
Vladimir Belmon, Agenais de 20 ans, et militant au NPA, est
le plus jeune candidat aux législatives en Lot-et-Garonne. Avec le
double intérêt de porter «la voix des jeunes» et de «combattre le
capital».
Vingt printemps à peine et déjà sous les feux de la rampe.
L'Agenais Vladimir Belmon, investi par le Nouveau Parti anticapitaliste
(NPA) sur la circonscription d'Agen-Nérac, est le plus jeune candidat
pour le scrutin législatif sur le département.Le jeune homme aura pour
suppléante Jamalat Abou Youssef, de trente ans son aînée. On pourrait
penser que l'idée de se présenter au suffrage du peuple face à un député
sortant, un ancien député-maire et la patronne du Parti socialiste
empêcherait le jeune homme de dormir… Mais le benjamin des candidats
n'est pas dans ce registre, lui qui veut juste montrer que « les jeunes
eux-mêmes sont les mieux placés pour savoir ce dont ils ont besoin. Et
qu'il faut « renverser le système ».
« Je suis dégoûté quand j'entends dire que les jeunes ont voté en
majorité pour le FN, lâche Vladimir. ça me rend malade, mais la riposte
doit être politique. Il ne s'agit pas de se dire qu'on va se taper avec
les méchants rasés (sic), mais porter une autre voix, exprimer une
conscience »
Alors lycéen à Palissy, l'Agenais a été très tôt « interpellé par des
idées ». « Mais à 15-16 ans, on a envie de faire tout et n'importe
quoi, on part dans tous les sens, au moindre signal ». Plus impliqué
dans ses premiers combats que dans ses études, le jeune homme avoue ne
pas avoir été vraiment un bon élève. « J'étais pas mal à l'oral, mais
je ne travaillais pas ». Pour cause d'un fort absentéisme, c'est en
candidat libre qu'il obtint son bac ES. Mais c'est bien à l'époque du «
bahut » qu'il signa ses premiers engagements politiques avec, en 2007,
la création à Agen d'une section de la Jeunesse communiste
révolutionnaire. Probablement influencé par le cercle familial, avec un
grand-père, Pierre, qui fut candidat pour le PS et une mère, Valérie, «
proche des idées socialistes même si elle votait Laguiller », Vladimir a
certes baigné dans un milieu de gauche. Mais il lâche, avec l'insolence
de ses 20 ans : « Pour qualifier l'engagement de ma famille en
politique, je dirais : peut mieux faire ! »
Il ajoute : « J'ai très tôt été dégoûté par les injustices et je me
suis très vite dit que rester passif devant elles c'était les
cautionner. Or, n'y a que l'extrême gauche qui propose d'agir vraiment,
qui veut changer ce système ». Avant de tacler : « Aujourd'hui, le PS
n'a rien de socialiste ».
Amateur de «toutes les musiques », de cinéma et de jeux vidéos,
occupé par des petits boulots, puis mobilisé par une année de service
civique à la communauté agenaise d'Emmaüs, le garçon envisage de
s'inscrire à la rentrée en fac d'histoire. « La culture et le savoir,
c'est la liberté. Alors, je fais en sorte d'être libre ». Les miettes de
pourcentage qu'il grappillera au scrutin de juin ne le décourageront
pas de poursuivre son chemin....Le dissuaderont-t-il de ses illusions ?
». Le jeune candidat ne se démonte pas : « Mais croire qu'un bulletin
de vote peut remplacer les luttes sociales, c'est cela l'illusion ! ».
Illustration : 201205152050_zoom.jpg
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