Législatives : victoire socialiste contre la droite… et le reste de la gauche. Front de Gauche : et maintenant ?
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Les socialistes ont remporté la majorité absolue des sièges à l’Assemblée nationale, ce qui leur permet de mettre en place la politique qu’ils souhaitent sans se préoccuper de leurs divergences avec Europe Écologie-Les Verts et le Front de Gauche.
Les
socialistes sont contents. Ils ont la majorité absolue à l’Assemblée
nationale, pour la première fois depuis 1981, avec 278 députés, plus
leurs appendices habituels, 22 « divers gauche » et 13 radicaux de
gauche. Soit 313 députés sur 577, 52 % des sièges. Ils avaient eu 58 %
des sièges en 1981, 48 % en 1988, 42 % en 1997.
Certes, l’abstention a été massive. Un électeur sur deux ne
s’est pas déplacé : l’enthousiasme populaire pour le nouveau pouvoir
socialiste est limité. Selon un sondage Ipsos, 41 % des ouvriers
auraient voté (contre 59 % des cadres), et 37 % des 18-24 ans, 44 % des
25-34 ans (contre 73 % des plus de 60 ans) ! Si le PS obtient la moitié
des députés à lui seul, seulement 16, 4 % des inscrits ont voté pour lui
au premier tour des législatives. Mais qu’importe l’abstention pourvu
qu’on ait l’ivresse de la victoire, même si elle est rendue encore plus
éclatante par les mécanismes antidémocratiques du système électoral de
la ve République.
Or, c’est précisément ce système qui permet aussi aux socialistes d’imposer leur hégémonie sur leurs alliés et concurrents à gauche. Europe Écologie-Les Verts (EÉLV) et le Front de Gauche ne sont pas indispensables aux socialistes pour avoir la majorité. Pour le député PS Bartolone, « François Hollande et Jean-Marc Ayrault ne se lèveront pas chaque matin en se demandant si tel ou tel groupe de députés le soutiendra. […] La porte du gouvernement ne leur est pas fermée, mais ils ne peuvent pas venir menacer le besoin de cohérence qui a été exprimé dimanche par les électeurs. Ils ne peuvent pas venir en posant leurs conditions. C’est la situation idéale. » C’est-à-dire celle qui permettra aux socialistes de mener plus facilement leur politique d’austérité !
Or, c’est précisément ce système qui permet aussi aux socialistes d’imposer leur hégémonie sur leurs alliés et concurrents à gauche. Europe Écologie-Les Verts (EÉLV) et le Front de Gauche ne sont pas indispensables aux socialistes pour avoir la majorité. Pour le député PS Bartolone, « François Hollande et Jean-Marc Ayrault ne se lèveront pas chaque matin en se demandant si tel ou tel groupe de députés le soutiendra. […] La porte du gouvernement ne leur est pas fermée, mais ils ne peuvent pas venir menacer le besoin de cohérence qui a été exprimé dimanche par les électeurs. Ils ne peuvent pas venir en posant leurs conditions. C’est la situation idéale. » C’est-à-dire celle qui permettra aux socialistes de mener plus facilement leur politique d’austérité !
Pourtant ravalés au rang de godillots d’appoint, jamais
décisifs, les responsables d’EÉLV sont tout de même bien contents, eux
aussi ! Ils passent de trois à dix-huit députés. « C’est une grande et
très belle date dans l’histoire des écologistes », a dit la ministre
Cécile Duflot. Mais dans celle de l’écologie ? Car pour obtenir ces
députés et un groupe « indépendant », les Verts ont renoncé à leur
indépendance politique en signant avec le PS un accord qui garantissait,
dès le premier tour, l’investiture commune PS-EÉLV à 63 de leurs
candidats, en échange de l’acceptation du nucléaire et d’un ralliement à
l’essentiel du programme socialiste. Daniel Cohn-Bendit, pourtant
favorable à cette capitulation complète, s’en inquiète un peu : « À long
terme, le danger c’est qu’on devienne les radicaux de gauche : on a
quelques ministres et beaucoup de députés, mais on n’existe pas dans la
société. »
C’est ce qui explique le sort si contraire d’EÉLV et du Front
de Gauche. EÉLV a dix-huit députés après avoir fait 2, 3 % des voix à la
présidentielle, le Front de Gauche en a dix (il perd neuf élus par
rapport à 2007) en ayant fait 11, 1 % avec Mélenchon, et en ayant
progressé au premier tour par rapport aux législatives de 2007 (6, 9 %
contre 4, 3 % au seul PCF).
Le communiste Pierre Laurent n’a pas tort de dire que « le
Front de Gauche paie ainsi le prix de son indépendance ». Mais quelle
indépendance exactement ? Car s’il est à peu près certain que ni le PCF
ni le PG n’entreront au gouvernement, ils entretiennent une grande
ambiguïté à l’égard du nouveau pouvoir. « Ni dans la majorité ni dans
l’opposition » dit Mélenchon. Quelle perspective le Front de Gauche
peut-il alors offrir aujourd’hui, pour résister à l’austérité de
gauche ?
Alors maintenant ? On attend les prochaines élections, ou on
prend des initiatives politiques sur le terrain de la lutte de classe ?
Yann Cézard
Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 154 (21/06/12)
Le second tour des législatives a confirmé pour le Front de
Gauche ce que laissait supposer le premier. Des résultats insuffisants
pour marquer un saut qualitatif, et même un recul du nombre de députés
élus.
De l’aveu même de Pierre Laurent, le score du Front de Gauche aux législatives n'est « pas un bon résultat ». Avec dix élus (neuf issus du PCF et un du PG), le groupe perd neuf députés par rapport à 2007 qui comptait seize élus communistes et apparentés et trois élus du PG. De mauvais résultats qui ne permettent pas au Front de Gauche à l’heure actuelle de constituer un groupe parlementaire. L’objectif est donc de se rapprocher dans un premier temps d’élus d’outre-mer divers gauche, et s’ils n’y parviennent pas, de demander l’abaissement du seuil de quinze à dix députés.
Selon les principaux dirigeants du Front de Gauche, les explications de ces résultats sont multiples. Tout d’abord, selon Pierre Laurent, le mode de scrutin et l’inversion du calendrier électoral favorisant les deux principaux partis, mais aussi pour Jean-Luc Mélenchon le choix de leur stratégie d’autonomie par rapport au PS. Stratégie qui sera sans aucun doute rediscutée dans les mois qui viennent dans le Front de Gauche, notamment à la lumière des résultats d’Europe Écologie-Les Verts qui a fait fructifier son accord électoral avec le PS.
Au-delà du résultat, les militantEs du Front de Gauche comptent faire entendre leur voix, en étant « les porte-parole des attentes du mouvement social, sans concession, ni naïveté, ni impatience ». À la fin de cette séquence électorale, la première question posée au Front de Gauche semble d’ores et déjà résolue : après la consultation des militantEs du PCF, ils n’entreront pas au gouvernement puisque ce dernier ne veut entendre parler que du programme du Parti socialiste. Mais dans le même temps les principaux dirigeants du PCF veulent que « réussisse le changement de gauche ». Seront-ils donc dans l’opposition ? C’est là que les divergences se font entendre. Du côté du PG, on semble plutôt pencher pour un « ni-ni » très flou : ni dans la majorité ni dans l’opposition. Par contre, au sein du Parti communiste, on est beaucoup plus clair, en particulier Marie-George Buffet affirmant dès le lendemain du second tour dans les colonnes de l’Humanité : « Nous ne sommes pas dans l'opposition mais dans la majorité de gauche de façon constructive, pour réussir. »
Autrement dit, soutenir sans participer, une position déjà tenue par le PCF dans le passé. Position difficilement compréhensible pour le plus grand nombre et en tout cas bien insuffisante pour pouvoir résister aux politiques d’austérité à la sauce PS dès que les choses sérieuses vont vraiment commencer. Avec le gouvernement au sein de la majorité ou avec son opposition à gauche, il va vite falloir choisir.
Sandra Demarcq
Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 154 (21/06/12)
Front de Gauche : et maintenant ?
De l’aveu même de Pierre Laurent, le score du Front de Gauche aux législatives n'est « pas un bon résultat ». Avec dix élus (neuf issus du PCF et un du PG), le groupe perd neuf députés par rapport à 2007 qui comptait seize élus communistes et apparentés et trois élus du PG. De mauvais résultats qui ne permettent pas au Front de Gauche à l’heure actuelle de constituer un groupe parlementaire. L’objectif est donc de se rapprocher dans un premier temps d’élus d’outre-mer divers gauche, et s’ils n’y parviennent pas, de demander l’abaissement du seuil de quinze à dix députés.
Selon les principaux dirigeants du Front de Gauche, les explications de ces résultats sont multiples. Tout d’abord, selon Pierre Laurent, le mode de scrutin et l’inversion du calendrier électoral favorisant les deux principaux partis, mais aussi pour Jean-Luc Mélenchon le choix de leur stratégie d’autonomie par rapport au PS. Stratégie qui sera sans aucun doute rediscutée dans les mois qui viennent dans le Front de Gauche, notamment à la lumière des résultats d’Europe Écologie-Les Verts qui a fait fructifier son accord électoral avec le PS.
Au-delà du résultat, les militantEs du Front de Gauche comptent faire entendre leur voix, en étant « les porte-parole des attentes du mouvement social, sans concession, ni naïveté, ni impatience ». À la fin de cette séquence électorale, la première question posée au Front de Gauche semble d’ores et déjà résolue : après la consultation des militantEs du PCF, ils n’entreront pas au gouvernement puisque ce dernier ne veut entendre parler que du programme du Parti socialiste. Mais dans le même temps les principaux dirigeants du PCF veulent que « réussisse le changement de gauche ». Seront-ils donc dans l’opposition ? C’est là que les divergences se font entendre. Du côté du PG, on semble plutôt pencher pour un « ni-ni » très flou : ni dans la majorité ni dans l’opposition. Par contre, au sein du Parti communiste, on est beaucoup plus clair, en particulier Marie-George Buffet affirmant dès le lendemain du second tour dans les colonnes de l’Humanité : « Nous ne sommes pas dans l'opposition mais dans la majorité de gauche de façon constructive, pour réussir. »
Autrement dit, soutenir sans participer, une position déjà tenue par le PCF dans le passé. Position difficilement compréhensible pour le plus grand nombre et en tout cas bien insuffisante pour pouvoir résister aux politiques d’austérité à la sauce PS dès que les choses sérieuses vont vraiment commencer. Avec le gouvernement au sein de la majorité ou avec son opposition à gauche, il va vite falloir choisir.
Sandra Demarcq
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