Le 30 juin aura lieu la marche des fiertés à Paris. Cette
année, le thème en est « L’égalité n’attend plus ». Entretien avec
Arthur Vuattoux , vice-président d’Act-up, qui rappelle que l’égalité
est encore loin d’être acquise.
L’an
dernier, le thème de la marche était « En 2011 on marche, en 2012 on
vote ». Cette année, c’est « En 2012 l’égalité n’attend plus ».
Penses-tu que les droits des LGBT pourront avancer avec le PS au pouvoir
?
Les promesses faites aux LGBT pendant la campagne, notamment
l’accès au mariage pour les couples de même sexe, sont évidemment une
avancée, mais beaucoup trop tardive... Il faut quand même rappeler que
le PS était au pouvoir au moment du Pacs, et que les droits qui ont été
mis en place à cette époque-là sont discriminatoires. Le Pacs est un
contrat amoindri, qui confère des droits différents de ceux du mariage.
Nous sommes donc méfiants, vigilants et sceptiques par rapport à cette
idée que « l’égalité n’attend plus », qui semble vouloir dire que
désormais tout est possible. Nous connaissons les limites idéologiques
du Parti socialiste, et notamment sa volonté de ménager dans ses
propositions un électorat parfois mitigé vis-à-vis des questions LGBT.
Va-t-on enfin ouvrir le débat sur l’homoparentalité et
l’éventualité d’un recours à de nouvelles méthodes de procréation
assistée ? Va-t-on continuer à accorder d’un côté des droits aux LGBT
tout en précarisant toujours plus certaines parties de la communauté, et
notamment les travailleurs du sexe, en pénalisant leurs clients ? Quelles sont selon toi les priorités ?
Les priorités, maintenant que les propositions générales
semblent intégrées au calendrier politique, sont de plusieurs ordres.
D’abord, il faut rappeler que cet acronyme, LGBT, est trop souvent
réduit aux L (lesbiennes) et aux G (gays), qui polarisent l’attention
politique. Pour autant, les trans’ sont souvent les grands oubliés de
ces débats. Aujourd’hui, en France, et contrairement à un pays tel que
l’Argentine, les trans’ qui ne sont pas allés jusqu’au bout de leur
transition (chirurgie, stérilisation, psychiatrisation...) ne peuvent
pas changer d’état civil, et cela conduit à des situations parfois
dramatiques pour les personnes dans leur quotidien. De même, n’oublions
pas la précarité sociale et économique qui frappe aujourd’hui encore les
LGBT : taux de suicide toujours beaucoup plus élevé chez les LGBT qu’en
population générale, taux de chômage plus important, poids du sida dans
une communauté pédé où les contaminations augmentent depuis plusieurs
années. Aujourd’hui, par exemple, un pédé sur cinq est contaminé à
Paris : cette situation est grave, et ce sera d’ailleurs le mot d’ordre
d’Act Up-Paris dans cette marche. « 1 sur 5 », on n’en est
pas fier et c’est notre rôle de le rappeler dans la marche, d’autant
que les marches des fiertés parisiennes n’ont jamais pris pour mot
d’ordre le sida. Il y a un vrai déni, une vraie invisibilité de cette
question à laquelle il faut remédier, l’épidémie n’est pas une fatalité,
elle est affaire de volonté politique.
À ton avis, la marche des fiertés est-elle un événement militant qui fait avancer les droits ?
À ton avis, la marche des fiertés est-elle un événement militant qui fait avancer les droits ?
Oui, si on s’en donne les moyens. Faire en sorte qu’on ne
réduise pas cette marche à une grand défilé convivial, même si la
convivialité c’est important également. Il faut en profiter pour porter
des projets politiques, dénoncer l’insuffisance des politiques publiques
à destinations des LGBT, rappeler que le sida est toujours là, et que
faire la fête ne signifie pas oublier nos combats. Pour cela, il faut
des messages clairs, une marche respectueuse de touTEs, qui n’exclut
personne. C’est pour cela que nous avions dénoncé le mot d’ordre « En
2011 je marche, en 2012 je vote » : une marche des fiertés doit inclure
les étrangerEs, sans-papiers, ceux qui ne votent pas par choix ou de par
leur statut. Une marche des fiertés doit inclure tous ceux et celles
qui souhaitent faire valoir leurs droits en tant que minorités
sexuelles, sans restriction...
Propos recueillis par Dominique Angelini
Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 155 (28/06/12)
Propos recueillis par Dominique Angelini
Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 155 (28/06/12)
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