Afrique du Sud : la police tire sur les mineurs en grève, tuant 34 personnes
Le Monde.fr avec AFP et Reuters |
Trente-quatre mineurs ont été tués et soixante-dix-huit blessés dans
les affrontements, jeudi 16 août, entre grévistes et policiers à la mine
de platine Lonmin de Marikana, en Afrique du Sud, selon un bilan officiel de la police
nationale. Le syndicat des mineurs NUM a évoqué trente-six morts. Par
ailleurs, deux cent cinquante-neuf personnes ont été arrêtées, "pour
différents motifs, violence publique, meurtre, tentative de meurtre,
rassemblement illégal, possession d'armes dangereuses", a ajouté la chef de la police nationale, Mme Riah Phiyega.
Ces morts s'ajoutent aux dix survenues dans les
violences entre syndicats survenues depuis dimanche sur ce site minier,
où plusieurs centaines de grévistes réclamaient d'importantes
augmentations de salaire.
Le président sud-africain, Jacob Zuma, a annoncé la création d'une commission d'enquête pour faire la lumière sur cette fusillade. "Nous devons faire éclater la vérité sur ce qui s'est passé ici, c'est pourquoi j'ai décidé d'instaurer une commission d'enquête pour découvrir les causes réelles de cet incident", a déclaré le chef de l'Etat à Marikana, revenu précipitamment d'un sommet régional au Mozambique pour se rendre sur les lieux du drame.
Voir l'infographie : Une semaine de violences dans un conflit minier en Afrique du Sud
LA POLICE INVOQUE LA LÉGITIME DÉFENSE
Pour justifier son action, la police a montré des vidéos où l'on voit les forces de l'ordre tenter de disperser
les mineurs en négociant avec eux, puis en utilisant différents moyens,
dont des gaz lacrymogènes, des canons à eau, des grenades
incapacitantes et des balles en caoutchouc. On y voit aussi un policier supplier les mineurs de se disperser : "Nous ne sommes pas ici pour vous arrêter, notre seul problème, ce sont les armes."
Selon la chef de la police nationale, "les policiers ont dû faire usage de la force pour se défendre contre le groupe qui les chargeait". "La police a commencé par utiliser le minimum de force, conformément à notre politique et à la loi. (...) Ce n'est que lorsque cela n'a pas suffi à stopper
les manifestants que nous avons utilisé un autre moyen. Et je pense
profondément, nous pensons, que cela était justifié. Nous ne voulions la
mort de personne", a-t-elle assuré.
Selon Reuters, des policiers, lourdement armés et appuyés par des véhicules blindés, étaient en train de dresser
des barrages de fils barbelés quand ils ont été débordés par quelque
trois mille employés de la mine, située au nord-est de Johannesburg. Ils
ont alors tiré des rafales d'arme automatique sur un groupe de mineurs
qui surgissait de derrière un véhicule.
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Tiré de Fusillade en Afrique du Sud : début de l'enquête et déjà le temps des questions (Midi Libre)
C'est l'incapacité du gouvernement à gérer ce genre de crise,
et surtout à améliorer les conditions de vie de la classe ouvrière, 18
ans après la chute de l'apartheid, qui est largement dénoncée.
"Je ne crois pas qu'ils se rendent compte à quel point notre société est
devenue volatile", dit l'analyste Adam Habib, de l'Université de
Johannesburg, "cent ans après le début des mines en Afrique du Sud, les gens vivent toujours dans les mêmes conditions qu'au début du 20e siècle".
Pessimiste, M. Fakir prédit que ce type de catastrophe risque de devenir
récurrent en Afrique du Sud: "Ca va exploser de nouveau dans trois ans,
parce le gouvernement ne fait rien pour résorber les inégalités,
les différences de salaires, les conditions de travail, la santé et la
sécurité dans les mines, alors que ce sont les données de bases du
problème".