Sanofi ou la marchandisation accélérée de la santé : des licenciements pour des alicaments, un ciblage des consommateurs aux dépens des malades !
Sanofi se met à la boisson minceur (Bakchich, 18 septembre 2012)
Lire ci-dessous le communiqué unitaire de soutien aux Sanofi par les partis de gauche de Toulouse
Le géant mondial de la pharmacie veut se séparer de 1500 à 2500 salariés en France, dont de nombreux chercheurs...et s'apprête à lancer sa gamme de boissons bien-être. Un peu plus rentable que la recherche contre le cancer?
Dans le concert de diatribes qui accompagnent les plans sociaux du début de quinquennat socialiste, une grande entreprise est parvenue à ne pas (encore) cristalliser un ressentiment national.
Discret durant l'été, dans l'ombre des feuilletons PSA, Arcelor ou Air France, le géant pharmaceutique mondial Sanofi (28 000 emplois en France) ne fait que depuis la rentrée un peu d'actualité. Et c'est le Figaro, jamais plus apprécié que dans l'opposition, qui a tiré la sonnette d'alarme. 1500 à 2500 postes menacés lors d'une restructuration.
Le centre de Toulouse menacé
Principaux métiers visés : la recherche et développement du fabricant de médicaments, avec un soin tout particulier apporté à raboter le domaine de l'oncologie (cancer) ; le centre de Toulouse, avec ses 600 chercheurs spécialisés, étant tout bonnement menacé de fermeture.
La société se porte fort bien (9 milliards de bénéfice en 2011), n'est pas menacé par la crise, ni par une perte de compétitivité. La cause profonde du changement est à chercher dans une réorientation stratégique profonde, et préparée de longue date.
Sanofi mise de plus en plus sur les alicaments, ces nouvelles gammes de boissons et nourriture appelé à améliorer le bien-être du consommateur (et non du malade) tout en s'affranchissant de la lourdeur administrative des autorisations de mise sur le marché ou des prescriptions médicales.
2009 : Le tournant Oenobiol
La genèse de la transformation peut être datée de 2009, quand le géant pharmaceutique s'éprend d'Oenobiol. Fabricant de compléments alimentaires destinés à ralentir l'apparition de cheveux blancs, maigrir en dormant, bronzer plus simplement etc…
Leur gamme de produits va, très prochainement, s'enrichir d'un nouveau concept phare, Oenobiol Beautific. Tout simplement des boissons visant à améliorer l'énergie (Energie +), les cheveux et les ongles (Cheveux et Ongles), le bronzage (Solaire Intensif) ou à favoriser l'amaigrissement (Activateur Minceur).
Pour agrémenter d'un peu de goût ces breuvages, Sanofi s'est associé au maître des boissons sucrées, The Coca Cola Company, pour faire naître le projet «Paris». « Le goût avec l'expertise en boissons de Coca Cola, le bénéficie beauté avec la garantie de santé de Sanofi » résume un mémo interne, que Bakchich a pu consulter.
La cible est toute trouvée, les femmes entre 25 et 45 ans, décrivent les marketeux de la boîte. La presse féminine sera bientôt inondée des pubs, à en croire le plan interne auquel Bakchich a pu accéder. «Beautifc Oenobiol, une nouvelle façon d'être belle, boire et se faire du bien quand et où vous voulez», clame le slogan. Même au chômage?
L'article sur le site de Bakchich
Illustration : 391689_des‑salaries‑du‑groupe‑pharmaceut
Genzyme, un laboratoire Américain, produisait sous le nom commercial de Campath, un médicament (alemtuzumab) efficace pour une maladie peu fréquente, la leucémie lymphoïde chronique.
Puis, on découvrit que la molécule d'alemtuzumab était efficace dans le traitement de la sclérose en plaque (SEP), pour un coût quatre à cinq fois moins cher que les autres médicaments actuellement sur le marché. Le géant Sanofi-Aventis lança alors une OPA pour racheter (plus de 20 milliards de dollars) le propriétaire de cette fabuleuse molécule, en 2011.
Un coût moins cher raisonne mal aux oreilles des actionnaires. La cupidité étant la seule valeur morale du commerce, et des rumeurs de traitement de la SEP à base de Campath se faisant jour, les humanistes qui dirigent Sanofi décidèrent d'utiliser la ruse du maquignon andalou : convertir un vieux cheval en bel étalon en lui donnant un coup de teinture.
Dans le cas présent, cela se traduit en retirant Campath du marché pour le ressortir avec un dosage différent sous le nom de Lemtrada, et une nouvelle indication thérapeutique.
Bien entendu, le retrait du Campath permettra aussi à Sanofi d'ajuster le prix du Lemtrada pour le rapprocher de celui de ses concurrents dans le traitement de la SEP (4 à 5 fois plus cher, n'est-ce-pas ?).
Il faut dire que le traitement de la leucémie avec Campath n'avait rapporté que 76 millions de dollars en 2011, alors que le Lemtrada pourrait en rapporter 400 en 2018 avec sa nouvelle indication (et son nouveau prix). Tout ça vaut bien qu'on prive les leucémiques de leur traitement.
Les analystes financiers applaudissent... Il ne reste plus qu'à obtenir la nouvelle autorisation de mise sur le marché américain, et c'est un beau retour sur investissement qui se profile, en tout humanisme.
D'après Lutte Ouvrière, Capital Direct Matin
Infos sur le site de Toulouse transmises par le NPA 31
Le
soutien unitaire aux « Sanofi » d’un large éventail de partis
politiques vient de naître à Toulouse. Il répondra à leurs initiatives,
notamment lors des « jeudis de la colère ».
Sanofi,
c’est 3,5 des 8,8 milliards d’euros de bénéfices, de dividendes versés
aux actionnaires en 2011 et en 2012, des « réorganisations/adaptations » menaçant 640 emplois directs à Toulouse et deux fois plus en comptant les autres sites, la sous-traitance et l’intérim.
Avec
les salariés et leur intersyndicale, nous disons non à cette direction
motivée par le seul profit et alertons la population, l'Etat et les collectivités
territoriales sur le hold-up que constituerait l’utilisation ainsi
faite des centaines de millions de dégrèvements et autres subventions.
Nous
invitons gouvernement et parlement à envisager toute mesure de passage
des sites toulousain et montpelliérain de Sanofi en propriété publique
autogérée par ce personnel hautement compétent pour répondre aux besoins
de santé de la population… si la direction du groupe Sanofi ne renonce
pas publiquement à son projet de démantèlement.
Toulouse, le mercredi 19 septembre 2012
Premiers
signataires : Les Alternatifs, Alternative libertaire (AL),
Convergences et alternative (C&A / Front de Gauche), Fédération pour
une alternative sociale et écologique (Fase / Front de Gauche),
Mouvement des Objecteurs de croissance (MOC), Nouveau Parti
anticapitaliste (NPA)…
Une
délégation unitaire des partis et organisations signataires rencontrera
les salariés de Sanofi et leurs représentants syndicaux pour en
discuter jeudi 20, lors de leur 11e « jeudi de la colère ».
Par
ailleurs, nous sommes convenus de nous rencontrer, de nouveau, jeudi 27
septembre, à 18 h 30, toujours au local du NPA 31, deux jours après la
réunion du comité central d'entreprise de Sanofi où la direction devrait
dévoiler ses plans, pour actualiser le dernier paragraphe de la
déclaration unitaire (plus approfondie que le communiqué) de nos partis
et organisations et la publier en tracts à destination de la
population toulousaine.
Infos sur le site de Montpellier
Un communiqué unitaire de soutien est en train d'être mis au point entre divers partis de l'Hérault dont le NPA.
A lire aussi
Les Sanofi se sentent lâchés par Montebourg (L'usine nouyvelle, 18 septembre 2012))
Extraits : Alors qu’ils avaient réussi jeudi dernier à mobiliser 800 salariés venus de la France entière pour manifester contre les suppressions d’emplois de chercheurs à Toulouse et Montpellier et de fonctions support, les syndicats craignent de se faire "lâcher" par le ministre. "Nous avons l’impression qu’il dit à Sanofi : faites un plan le plus généreux possible, puis les syndicats accepteront et on verra", poursuit Laurent Ziegelmeyer. "Mais nous ne sommes pas là pour négocier le montant du chèque !"
Selon des rumeurs, Arnaud Montebourg aurait rencontré ce matin la direction du groupe pharmaceutique. Et devrait prochainement s’entretenir avec Martin Malvy, président de la Région Midi-Pyrénées, Pierre Cohen, maire de Toulouse, et Pierre Izard, président de la Haute-Garonne. Un rendez-vous "plus que jamais nécessaire pour évoquer l’avenir du centre de recherche de Sanofi à Toulouse, qui emploie plus de 600 personnes et qui est le point d’appui de l’Oncopôle Toulouse-Langlade, centre d’excellence de la recherche contre le cancer en Midi-Pyrénées ", justifie Martin Malvy dans un communiqué.
Un plan plus large que prévu dévoilé le 25 septembre ?
Le 5 juillet, la direction de Sanofi avait annoncé une réflexion sur sa réorganisation dans la recherche (avec les sites de Toulouse et Montpellier), la production de vaccins et les fonctions support. La restructuration serait-elle finalement plus large ? Les syndicats disent avoir reçu des convocations pour 5 comités centraux d’entreprise (CCE) organisés le 25 septembre. La recherche, les vaccins, les fonctions support, mais aussi l’activité vétérinaire (Merial) et des fonctions industrielles secondaires seraient concernées. Problème, le personnel dit n’avoir reçu toujours aucun document de travail pour préparer ces réunions.
Sur Sanofi, Montebourg ménage la chèvre et le chou (Libération, 17 septembre 2012)
Le mouvement des salariés de Sanofi s’amplifie, débrayage d'une heure à Strasbourg (Dernières Nouvelles d'Alsace, 13 septembre 2012)
Extraits : Le mouvement [du 13 septembre] a aussi touché de nombreux autres établissements de Sanofi. Environ 200 personnes se sont réunies devant le site de Montpellier, à Strasbourg la moitié des 70 salariés ont débrayé pendant une heure.
A Vitry/Seine-Alfortville (plus de 1.300 salariés), quelques 120 salariés ont débrayé à la mi-journée et manifesté sur les quais de Seine.
A Chilly-Mazarin (Essonne) ils étaient environ 200 à débrayer, 120 à Sisteron (Alpes de Haute-Provence), de même qu’à Aramon (Gard) ou Neuville/Saône (Rhône), selon Thierry Bodin, coordonnateur adjoint CGT.
La CGT-Sanofi somme le gouvernement d'intervenir «ou d'aller se coucher» (LibéToulouse du 13 septembre 2012)
Extraits : Selon l'intersyndicale, ce qui se passe sur le site toulousain est «l'exemple même de ce que subissent les salariés du fait de la financiarisation de l'économie». Mordant un cran plus haut, la CGT indique que si le gouvernement n'intervient pas sur un cas pareil, «il n'a plus qu'à aller se coucher»
[...] Sacrifiant ses pôles de recherche de Toulouse et Montpellier, Sanofi sacrifierait ainsi un pan de la santé publique, insiste le délégué central CGT Thierry Bodin.
Lequel cégétiste met en garde les élus de gauche présents comme lui à cette manifestation: «laisser Sanofi agir sans intervenir, reviendrait à ce que le gouvernement laisse la porte ouverte à toutes les manœuvres du Medef».
Région. Les licenciements menacent, Montebourg nous refile son clone !
Extrait : "Quand une entreprise fait cinq milliards de profits, comme c'est le cas dans Sanofi (...) elle a le droit de se réorganiser", a affirmé, dimanche, Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif lors de l'émission Capital sur M6 ? Comment comprendre cette ode au droit patronal à se réorganiser ? [...]
Le Monde (17 septembre),
comme souvent, trouve finalement les mots qui portent : hier dur parmi
les durs, Montebourg nous la joue désormais doux bellâtre bêlant...
A lire : nos dossiers Luttes, SANOFI