Education. Les mesures annoncées restent prisonnières des choix budgétaires foncièrement libéraux du gouvernement !
Peillon "n'aborde pas la crise de recrutement des profs" (Snes Montpellier)
L'Hérault du jour du 21 décembre 2012
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Enseignants : la «revalorisation», sous condition, de Vincent Peillon
Mediapart. 10 décembre 2012 |
Vincent Peillon a enfin lancé la campagne de recrutement auprès des
étudiants ce lundi 10 décembre. Il était temps. L’objectif de pourvoir,
pour la seule année 2013, 43 000 postes, soit près de trois fois plus
que l’an dernier, tient en effet de la gageure. En 2012, plus de 700
postes au CAPES n’avaient été pourvus faute de candidats au niveau
suffisant. Malgré un petit sursaut dans les inscriptions aux derniers
concours (+7 %), la désaffection pour le métier d’enseignant, qui a
suivi, il est vrai, les suppressions massives de postes, a été très
sévère ces dernières années.
Il fallait donc bien une petite campagne de communication pour remobiliser les étudiants vers les carrières enseignantes. Et peut-être aussi, surtout, pour faire la pédagogie de la très complexe organisation mise en place cette année par le ministère avec l’organisation de deux concours la même année.
Il fallait donc bien une petite campagne de communication pour remobiliser les étudiants vers les carrières enseignantes. Et peut-être aussi, surtout, pour faire la pédagogie de la très complexe organisation mise en place cette année par le ministère avec l’organisation de deux concours la même année.
Pourtant, alors qu’il était invité dans la matinée de RMC, une phrase du ministre a malencontreusement fait dérailler ce beau lancement de campagne. Interrogé à plusieurs reprises par Jean-Jacques Bourdin sur la revalorisation du salaire des enseignants – sur laquelle il s’est maintes fois prononcé, expliquant qu’elle n’était pas envisageable pour l’instant –, Vincent Peillon a fini par annoncer qu’il « était prêt à partir de janvier 2013 à ouvrir la grande négociation (…) sur la refondation du métier d’enseignants » qui comprendrait « les carrières », « le temps de travail et bien entendu la question de la revalorisation ». Il a beau préciser qu’« il n'y aura pas de discussions salariales » au sens strict mais que « la conséquence d'une discussion sur le métier est évidemment une question salariale », la confusion s’installe.
Une alerte AFP un peu rapidement lancée et la machine médiatico-politique, d’ordinaire si frileuse sur l’éducation, s’emballe. Jean-François Copé, trop heureux d’ouvrir un contre-feu à la lamentable déconfiture de son parti, réclame que Jean-Marc Ayrault « recadre » son ministre dont les annonces seraient «en contradiction totale avec les arbitrages budgétaires » du gouvernement, affirmant même que ces déclarations sont « le couac gouvernemental de ce début de semaine ».
Le ministre a donc dû préciser dans la matinée, en plein lancement de la campagne de communication sur les recrutements à l’université Sorbonne nouvelle, que la question des rémunérations ne serait ouverte que « dès lors que sera possible une discussion sur les missions des enseignants ». Comme pour l’instant cette discussion ultra-sensible qui touche au temps de services, aux heures de présence dans l’établissement des profs, a toujours suscité une levée de boucliers du côté des syndicats, autant dire que le ministre ne s’est pas engagé à grand-chose. Au contraire, il a pour la première fois clairement posé qu’il n’y aurait pas de revalorisation « sèche » des profs hors de cette négociation préalable. Là est vraiment l’information.
Pour le ministre qui a tant de fois répété que les enseignants ne faisaient pas leur métier pour l’argent, cette désagréable péripétie médiatique lui aura au moins permis de mesurer combien il était difficile de lancer une campagne de promotion du métier de prof sans, à un moment ou un autre, parler salaire.
L'école en pleine crise de vocations
Mediapart. 25 juillet 2012 |
« Je demande à la jeunesse de France de s’engager avec nous dans
la refondation de l’école. Il y aura les postes nécessaires. Nous
cherchons les nouveaux Hussards noirs de la République ». Le ton de
Vincent Peillon à l’Assemblée nationale, ce 11 juillet, est des plus
solennels. La promesse de François Hollande de créer 60 000 postes dans
l’éducation se heurte en effet à une réalité difficilement surmontable :
de moins en moins de jeunes sont tentés par le professorat.
Dans la foulée de ce discours sonnant la mobilisation générale, le ministre a décidé, le lendemain, de rallonger jusqu’au 19 juillet
la date limite de dépôt de candidature aux concours de l’enseignement
pour permettre à plus d’étudiants de se présenter. À ce jour, le
ministère n’a toujours pas rendu public le nombre de candidats pour 2013
– un travail de vérification de plusieurs jours serait nécessaire pour
traiter les données brutes – mais il y a peu de chance que ce délai
supplémentaire ait réussi à inverser la tendance de fond. La pénurie
d’enseignants est bel et bien installée.
Il y a quelques jours, les résultats du Capes externe avaient révélé
l’étendue des dégâts. 706 postes (15 % de ceux offerts aux concours),
sont restés vacants faute de candidats en nombre suffisant. En maths, la
situation est plutôt critique avec près de 300 postes non pourvus,
suivent l’anglais (131 postes non pourvus) et les lettres classiques (95
postes non pourvus). Moins touché, le primaire a quand même vu le
nombre de postulants aux concours de professeurs des écoles baisser.
Les causes de cette désaffection sont connues. Parmi les nombreux
ratés de la réforme de la « masterisation » (suppression de l’année de
formation et concours accessible à bac +5), celui d’avoir fait
s’effondrer le nombre de candidats aux concours n’est pas le moindre. « La
masterisation Darcos a provoqué un tarissement du vivier du seul fait
qu’il y a 300 000 licenciés pour seulement 100 000 étudiants en master
et tous, bien évidemment, ne se destinent pas à l’enseignement »,
estime Christian Chevalier secrétaire général du SE Unsa. Les conditions
acrobatiques de préparation des concours où, la même année, l’étudiant
doit valider un Master 2 et préparer un concours aux contenus
entièrement différents, ont aussi certainement eu raison de bien des
vocations. Sans parler de l’image désastreuse d’une entrée dans le
métier sans aucune formation pratique.
Au-delà de la masterisation entrée en vigueur en 2010, la réduction
continue des postes offerts aux concours depuis dix ans a aussi détourné
beaucoup de jeunes de l’enseignement. Il y avait ainsi 17 000 places
aux concours externes en 2008 contre 8 600 quatre ans plus tard. L’effet
des réductions drastiques de postes dans l’éducation nationale – 80 000
en cinq ans – a bien évidemment pesé.
Revoir les règles du jeu
Plus profondément, le métier de prof ne fait plus rêver.
« L’image véhiculée sur l’école par les médias, les films… est celle
d’une école anxiogène avec un métier d’enseignant perçu comme difficile.
Or c’est une image en partie fausse puisqu’elle correspond à des
territoires particuliers », assure Christian Chevalier qui regrette que « sur la violence scolaire, on a aussi tendance à généraliser à partir de quelques cas. »
L’an dernier, le drame de l’enseignante s’immolant dans la cour de son
collège à Béziers a profondément marqué les esprits dans la profession,
et sans doute au-delà.
La faiblesse des rémunérations - les enseignants français sont parmi
les moins bien payés de l'OCDE - n'incite guère les étudiants, dans ce
contexte, à se diriger vers ce métier.
Et, comme si cela ne suffisait pas, la démographie joue à contresens. « Si
l’on regarde le nombre d’élèves qui arrivent et le nombre de profs qui
vont partir, cela va être encore très tendu pendant dix ans », affirme Daniel Robin, co-secrétaire général du Snes.
Alors que le ministère a toutes les peines du monde à pourvoir les
quelque 6 000 postes offerts aux concours, comment pourra-t-il en
recruter près du double l’an prochain, pour honorer la promesse des
60 000 postes ? Nul doute qu’il faudra profondément revoir les règles du
jeu.
Déjà dans les mesures d’urgence de la rentrée scolaire 2012, pour
dégager les quelque 300 postes promis dans le secondaire, Vincent
Peillon a dû lancer les grandes manœuvres. Et demander aux jurys de
l’agrégation de repêcher dans leurs listes complémentaires 90 candidats
en maths, 70 en anglais et 60 en lettres. Un pis-aller forcément
problématique alors que, rappelle René Cori, membre, démissionnaire, du
jury de l’agrégation de mathémathiques, « le niveau général était déjà loin d’être extraordinaire ».
Pour parer à l’urgence des postes non pourvus, le ministère va avoir
pour cette rentrée recours à l’embauche de contractuels dont le nombre
n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Il y a ainsi fort à parier
que, dans l’urgence, les prochains « Hussards noirs » se recrutent à
nouveau via des jobs dating de Pôle emploi. Mais, là encore, le vivier
est faible. « Embaucher des contractuels qualifiés aujourd’hui est un exercice difficile », explique Daniel Robin.
Pour éviter de se retrouver devant les pires difficultés à la rentrée
2013, le ministre sait qu’il doit faire vite pour élargir le vivier des
candidats. L’une des pistes proposées durant la campagne par le
candidat Hollande était de mettre en place des pré-recrutements pour
accompagner financièrement les étudiants qui s’engageraient dans la voie
de l’enseignement. Une proposition qui rappelle les Ipes,
supprimés en 1978, qui permettaient à des étudiants pré-recrutés sur
concours de bénéficier pendant leurs années d’études d'un salaire, en
échange d’un engagement à enseigner pendant dix ans.
Cette idée est unanimement soutenue par les principales organisations syndicales. « C’est très important, car tout le monde ne peut pas se payer un master, souligne Christian Chevalier. Cela devrait aussi permettre plus de mixité sociale dans le recrutement. »
Pour répondre aux besoins qui vont se poser pour la rentrée 2013, le
ministère envisage une solution radicale. Il s’agirait de mettre en
place une deuxième session de concours d’enseignement au printemps
prochain, quand ceux qui viennent de s’inscrire débuteront, eux, leurs
écrits à l’automne. Cette deuxième vague serait ainsi beaucoup plus
largement ouverte – sans doute aux étudiants entrés dans le processus de
pré-recrutement et plus généralement à ceux inscrits en première année
de master. « Le calendrier est très serré. Tout cela devra être fixé dans la loi d’orientation de décembre », prévient Daniel Robin.
Au cabinet de Vincent Peillon, on n’infirme ni ne confirme
l’information, en précisant qu’il est trop tôt pour se prononcer, alors
que la grande concertation sur l’école doit se poursuivre jusqu’au mois
de septembre. Pourtant tout porte à croire que cette session de
rattrapage est déjà plus qu’une hypothèse de travail.
Education. Réforme Peillon : une rentrée 2013 avec moins de postes qu'à la rentrée 2011 !
Extrait
En septembre, Vincent Peillon annonçait le recrutement de 43 000
enseignants sur 2 ans comme gage de la volonté du gouvernement de créer
60 000 postes dans l'éducation nationale. Pourtant ces 43 000 recrues
compenseront tout juste les 40 000 départs en retraites prévus. Cela
signifie que la rentrée 2013 se fera avec moins de postes que la rentrée
2011, la dernière avant le changement de gouvernement. Ces 60 000 postes
promis sont donc toujours 60 000 promesses... et seulement des
promesses.
Le projet de loi sur l'école, publié le 6 décembre, se situe dans la continuité des politiques menées par Sarkozy. Globalement, Vincent Peillon valide les politiques de la droite (réformes des lycées, démantèlement des RASED, personnalisation de l'échec scolaire, individualisation des programmes avec le socle commun, asphyxie de l'éducation prioritaire...).
[...] Avec 12 000 suppressions de postes supplémentaires en septembre, les difficultés
rencontrées par les personnels, les élèves et les parents étaient
prévisibles dès juin. Pourtant la rentrée s’est effectuée sans
perspective de mobilisation, ni sur les conditions de travail et le
manque de postes ni même sur le budget 2013. Les directions syndicales
ont préféré mener une politique de complaisance à l’égard du
gouvernement, participer sagement aux « concertations » tout en refusant
de mobiliser les personnels.
La concertation, à laquelle ont participé le Medef et l’OCDE,
ignore toutes les revendications fondamentales des mobilisations
enseignantes (effectifs, postes, réseaux d’aide spécialisés, suppression
du livret de compétences et du fichage des élèves, abrogation de la
masterisation, des réformes du lycée et du lycée pro).
À chaque alternance gouvernementale sa nouvelle réforme de
l’Éducation dans laquelle on nous ressert les mêmes gages de bonnes
intentions concernant la lutte contre les inégalités, l’échec scolaire
et les rythmes des enfants : semaine de 4, 5 jours, allègement des
journées de cours, devoirs à l’école, réduction des redoublements, fin
des évaluations sanctions, plus de profs que de classes.
À moyens constants, il est difficile de croire au « plus de profs
que de classe ». Impossible d’imaginer lutter contre l’échec scolaire
sans enseignantEs supplémentaires, d’autant plus que les conditions
sociales dégradées creusent encore les inégalités et les difficultés
scolaires des enfants.
Le gouvernement ne remet pas en cause la politique de Chatel-Sarkozy.
Il a annoncé ouvrir 43 000 postes aux concours 2013 mais c’est une
arnaque ! 22 000 profs seront recrutés au concours pour remplacer les
22 000 départs en retraite de 2013. 21 000 étudiants seront sélectionnés
par un second concours. Ils assureront un tiers temps de prof pendant
un an comme contractuels avant d’être recrutés pour remplacer les 21 000
départs en retraite prévus pour la rentrée 2014. La masterisation reste
consolidée. Pour remédier aux inégalités sociales liées à l’allongement
de la durée des études, le gouvernement ne propose qu’un job précaire
dans l’Éducation nationale, les emplois avenir professeurs, pour les
étudiants boursiers.
Un objectif avoué d’adaptation aux besoins des entreprises.
Pour les libéraux, ce service public doit s’adapter à la
réorganisation du marché du travail : « améliorer l’offre, anticiper la
demande et optimiser l’utilisation des compétences de la main-d’œuvre ».
Cette logique du Socle commun est reprise par Peillon et Hollande : le
livret de compétence sera simplifié pour les élèves en réussite, mais
pour ceux en difficulté les profs devront évaluer dans le détail les
compétences acquises et non acquises.
Enfin, la volonté du gouvernement est de préparer l’orientation
professionnelle en lien avec les entreprises locales, dès la 6e ! Pour
l’orientation des élèves, le changement, c’est des services régionaux,
au plus près des besoins de main-d’œuvre locaux.
À quelques inflexions près, le gouvernement actuel poursuit les
politiques libérales guidées par les besoins du capitalisme en ce qui
concerne l’école et la volonté d’économies budgétaires. Les directions
syndicales doivent en tirer le bilan et ne pas accepter de la part
d’Hollande des politiques que nous combattions sous Sarkozy. Cela
commence par construire dès maintenant une grève contre le budget, pour
un véritable plan de création de 80 000 postes dans l’éducation et
l’abrogation des contre-réformes mises en place par Sarkozy. Cette
mobilisation doit se lier aux revendications de l’ensemble de la
fonction publique contre les suppressions de postes et celles des
salariés du privé qui défendent leurs emplois.
Arni Cole
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