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Le grand soir, c'est nous !



Le grand soir


Cela fait tellement de temps qu'on en a marre de tout ça, que je ne me souviens plus d'avant.
Et pourtant, j'ai toujours cette impression persistante de chute interminable et de fuite en avant.
Et pourtant, malgré toutes ces frustrations, ces colères et ces belles envolées lyriques, plus ça va mal et plus on ne fait rien.
Lutte

  • Manière, c'est pas compliqué : dès que ça pète, je sors le manche de pioche !

Puis, il retourne tranquillement négocier sa vie somme toute assez plaisante entre le travail que l'on est bien content d'avoir gardé dans la tourmente et les petites compensations que l'on s'octroie régulièrement pour oublier combien les temps sont durs et l'horizon des jours nouveaux lointain et incertain.


C'est marrant, c'est exactement cette ambiance foutraque que le duo Délépine/kervern, les deux clowns les plus déprimés de l'histoire de la contestation sociale, a si bien décrite dans son film Le Grand Soir. La désespérance des déchus, des jamais soumis, des marginaux qui se heurte de plein fouet avec la résignation consumériste de ceux qui sont encore dans la matrice et s'offrent des indignations à bon compte avant d'aller s'acheter au prix du sang et de la sueur le dernier gadget à la pomme totalement hors de prix et de propos.

En fait, c'est en train de péter


Là, juste maintenant, sous nos yeux et partout. Les gouvernements aux ordres de la finance, des organisations commerciales, des multinationales tapent dur et fort sur les peuples du monde, sous des prétextes plus ou moins vaseux, dont le manque d'imagination et de crédibilité traduit manifestement un grand laissé-aller dans le carnaval pseudodémocratique. C'est gravement en train de péter de partout, les coups d'États financiers ouvrent la voie aux coups d'État parlementaires qui eux-mêmes s'assoient pesamment sur les Constitutions de plus en plus de pays et tout cela provoque partout et en ce moment la misère des peuples et la révolte des opprimés les plus désespérés dans l'indifférence polie du plus grand nombre. 


Sur tous les continents, les conditions de vie de plus en plus de personnes se dégradent significativement selon, toujours, les mêmes modalités : l’explosion de la bulle immobilière américaine a ravagé la classe moyenne laborieuse, avant de s'étendre à l'ensemble de la planète par de très astucieux jeux de contamination financière interbancaire, jusqu'à ce que tout le casino planétaire tremble sur ses fondations. À ce moment-là, les rois du bonneteau financier international ont fait un énorme tapis en réclamant l'aide inconditionnelle des finances publiques sous la menace d'un effondrement total de civilisation. Abondamment nourris et financés par ces géants de pognons aux pieds d'argile, les dirigeants des démocraties mondiales, censés représenter les intérêts des peuples qui les ont portés au pouvoir, ce sont empressé de vider les coffres des nations pour que les grandes lessiveuses à essorer la richesse collective ne ralentissent surtout pas le rythme. Et ensuite, ces mêmes instances financières sont venues chouiner que le braquage des peuples avait quelque peu compromis leur capacité à rembourser leurs dettes iniques nées pour la plupart du changement constant des règles budgétaires et monétaires et dont la ligne directrice depuis 40 ans pourrait se résumer ainsi : privatiser les gains et les ressources, socialiser les pertes ! Et les gouvernements corrompus se sont empressés de détourner leurs mandats prétendument démocratiques pour organiser la grande purge des populations au bénéfice d'une toute petite élite financière pourtant déjà gavé jusqu'à la glotte.


De serrages de ceinture permanents en reculs sociaux concertés, tout ce qui avait été plus ou moins mis en place dans le cadre du grand contrat social entre ceux qui créent les richesses par leur travail et ceux qui font du gras en prélevant leur dîme indécente dessus, est en train d'être définitivement détruit. Là où la société exige le respect des règles et des contraintes de la vie collective, l'aliénation d'une part de nos libertés, en échange du bien-être et de la sécurité, il ne reste plus qu'une sorte d'immonde simulacre de la loi de la jungle. Et quand il n'y a plus rien à sacrifier, plus rien à quoi renoncer, quand on a déjà tout perdu, tout ce à quoi l'on croyait, tout ce à quoi on voulait nous faire croire, il ne reste plus alors que le désespoir, la mort ou la révolte. 


Partout, en ce moment, dans le monde, des gens se soulèvent. Ils dénoncent le grand hold-up du siècle. Ils ont pris conscience de l'ampleur du désastre et se retrouvent confrontés aux matraques de ceux qui étaient censés les protéger. Mais ce ne sont que quelques poignées d'enragés, quelques vagues de désespérés, rien qui n'agite encore les courants forts de la révolte sous la ligne de flottaison des foules placides.


On râle, on serre les boulons, on bricole, on traficote à droite et à gauche, on tente de tenir. Juste encore un peu.

En attendant quoi ? En attendant qui ? 

La cavalerie ? Le sauveur ? Le putain de grand soir ?


Le grand soir, c'est nous. 

Et pendant que je vois ces millions de petites fenêtres qui clignotent de publicités et de fausses nouvelles dans le jour déclinant, ces millions de petites histoires transies et honteuses qui s'imaginent vivre dans une autre époque révolue, ces millions de petites lueurs dispersées qui ne parviennent plus à faire reculer les ténèbres, je me dis que le grand soir s'est égaré quelque part au fond de la cinquième étagère de la travée 4 de l'Auchan ou de l'Ikéa du coin et que nous tous, on l'a bien profond dans le cul !

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