La lutte syndicale contre les plans sociaux s’organise... à Sciences Po
Par Gaëlle Fleitour - L'Usine Nouvelle le
C’est un meeting insolite qui s’est tenu dans les locaux de la
prestigieuse école, jeudi 24 janvier. A l’appel de la CGT, plusieurs
syndicalistes d’entreprises majoritairement issus de l’industrie comme
Sanofi et PSA ont interpellé les étudiants sur leurs luttes.
Le principal amphithéâtre de Sciences-Po transformé en QG de la lutte
syndicale… C’est une réunion insolite qui s’est tenue jeudi soir. Pour
sensibiliser les étudiants du prestigieux Institut d’Etudes Politiques -
pour la plupart, de futurs cadres et dirigeants d’entreprises - aux
plans de restructuration qu’ils subissent, les représentants syndicaux
de plusieurs groupes industriels se sont invités (avec l’aide d’un
syndicat étudiant) dans le 7e arrondissement de Paris, rue Saint
Guillaume. Initié par la CGT Sanofi du centre de recherche de Vitry
Alfortville et Sud Etudiants, le meeting a offert une tribune aux
salariés de Sanofi, PSA, Renault, Goodyear, Philips, Air France, Virgin, Presstalis et à l’association Licenci’elles, fondée par d’anciennes salariés du groupe 3 Suisses.
Des contextes sociaux très divergents
La salle est comble et le public, principalement des étudiants de
gauche, leur est tout acquis.
Applaudissements, huées, chants
"Licencions les patrons, les patrons qui licencient" : le ton est donné.
Les situations évoquées, elles, n’ont rien d’anodin. Mais peuvent-elles
vraiment être placées sur le même plan, tant leurs ampleurs et leurs
contextes respectifs divergent ? Plan de restructuration de 914 emplois
et questionnement sur le site de Toulouse chez Sanofi, 7 500
suppressions de postes chez Renault, 5 000 chez Air France, 8 000 pour
PSA et la fermeture de son usine d'Aulnay-sous-Bois, probable fermeture
de l’usine d’Amiens pour Goodyear, dépôt de bilan de Virgin…
"Faire reculer les plans capitalistiques"
Les contextes sociaux sont disparates : certaines entreprises sont
rentables, d’autres non, d’autres pourraient bientôt ne plus exister…
Mais un seul mot d’ordre anime les participants : le rassemblement.
Laurence, une syndicaliste de Sanofi interpelle les étudiants : "Je m’adresse à vous : initions la convergence des luttes qui existe, mais qui démarre." Léon, un salarié d’Air France, où "l’unité intersyndicale est très faible", appelle à "se solidariser pour arriver à faire reculer les plans capitalistiques".
C’est finalement un salarié du Technocentre Renault de Guyancourt qui résume le mieux leur vision : "Que
ce soit des suppressions d’emplois ou des accords de compétitivité,
nous sommes tous touchés. Nous avons tous conscience que si on veut
stopper cela, il ne faut pas être seul, en mobilisant dans nos
entreprises. Et si on veut faire reculer le gouvernement et le patronat,
il faut qu’ils aient 'la trouille' : que les bagarres s’étendent et se
coordonnent."
Une grande manifestation le 29 janvier
Rendez-vous est pris pour le 29 janvier, pour une manifestation devant
le ministère du Travail destinée à rappeler au président de la
République François Hollande sa promesse de candidat : faire passer une
loi interdisant "les licenciements boursiers". Le même jour, les
employés en colère de Virgin se retrouveront devant le magasin des
Champs Elysées pour remonter l’avenue jusqu’aux locaux de leur
actionnaire, le fonds Butler Capital. "Pour nous, il est hors de
question de négocier un quelconque chèque de départ. Nous demandons un
repreneur pour la boite, pas un fossoyeur comme Butler".
Gaëlle Fleitour
L'article sur le site de L'Usine nouvelle
La note de Wikipedia sur L'Usine nouvelle, ce "journal conçu par des entrepreneurs pour des entrepreneurs"
Ce magazine de la presse économique et professionnelle est paru pour la première fois le 5 décembre 1891 à Charleville sous le titre l'Usine.
L'intitulé placé sous le titre annonce l'intention de ses fondateurs :
« Organe de l'industrie des Ardennes et du Nord-Est ». Le journal est
édité sous l'égide du Syndicat des industriels métallurgiques ardennais.
Et l'édito précise : « L'Usine a l'ambition de devenir l'organe de tous
ceux qui ont à cœur la prospérité des industries ardennaises et de leur
expansion ». La ligne directrice est annoncée. C'est un journal conçu
par des entrepreneurs pour des entrepreneurs. C'est un outil
d'information pour les aider à agir et à décider, et c'est un support de
communication et d'annonces pour le patronat. Les Ardennes et le Nord-Est de la France sont alors des terres de prédilection pour les industriels.
En 1905, le journal est racheté par Camille Didier, qui en était
devenu le directeur dès 1901, à 26 ans et qui fait ouvrir un bureau à
Paris. Camille Didier veut donner au journal une diffusion nationale.
En 1914, le journal bénéficie d'un lectorat de 3 000 abonnés.
Lors de l'invasion allemande, les bureaux sont transférés à Paris. Ils
ne quitteront plus la capitale. En 1935, le magazine tire à 35 000 exemplaires et les bureaux sont au 15 de la rue Bleue.
Au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale,
le journal appelle à la mobilisation des industriels pour l'effort de
guerre. Paris envahi, il se limite à des informations factuelles telles
que le cours des matières premières. À la Libération, son patron, qui
est toujours Camille Didier, est accusé un temps de collaboration pour
avoir continué à paraître sous l'autorité allemande. Il est soutenu par
sa cousine Jeanne Carlot, figure de la résistance ardennaise qui a
dirigé un journal organe de cette résistance, l'Ardenne.
En 1945, le magazine est de nouveau diffusé après une interruption de onze mois, sous le titre l'Usine nouvelle. La pagination enfle sous les Trente Glorieuses.
Le journal s'intéresse à tous les secteurs, il devient un fleuron de la
presse professionnelle généraliste, avec une position solide. En 1962, Camille Didier décède et le journal est repris par son fils, Edouard Didier.
En 1968, la parution est perturbée par une grève dure de la C.G.T., à l'imprimerie de Montrouge. En 1970, la famille Didier revend le journal au Groupe Havas. En 1992, c'est l'informatisation de la rédaction et en 1998 la création du site internet. Tout un symbole pour aborder le XXIe siècle.
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