Gaz de schiste en Plaines du Languedoc
Dernières discussions à Béziers(9 février 2013)
La
venue de Séverin Pistre, hydrogéologue à l'université Montpellier II, a
été l'occasion de
reparler des gaz de schiste à Béziers. C'est le PCF qui l'y avait
invité pour une réunion d'information. Le plaisir était donc grand
d'entendre un des rares scientifiques à ne pas se taire
devant l'imminence de la catastrophe s'exprimer sur le sujet. Car
beaucoup de ses collègues préfèrent bon gré mal gré rester dans l'ombre
sans dire mot malgré la conscience du danger qui menace.
Mais il n'y a pas que des complices par omission. On les aide aussi
parfois à s'en tenir au silence : le BRGM par exemple a fini par avouer
avoir embauché une officine de relations publiques pour
répondre aux interpellations (1) et il est interdit à tout personnel de
répondre aux journalistes sinon par le biais de ladite officine – qui
se chargera de distiller la parole remaniée et rendue correcte
selon la norme édictée par le pouvoir.
(1)
cela rappelle que le Conseil général de Loire Atlantique n'a trouvé
rien de mieux, pour contrer les arguments
des opposants à l'Ayraultport, que d'embaucher une de ces officines
pour développer un contre-argumentaire. On n'est jamais mieux servi que
par les pros de la manipulation, semblent-ils
penser.
Il
nous a été rappelé que la pollution a 3 origines : 1_ les produits
directement injectés qui sont
dangereux : toxiques sous diverses formes, perturbateurs
endocriniens ( même à dose minime ils sont toxiques sur des durées très
longues), cancérigènes, etc. 2_ les produits injectés qui
ne sont pas dangereux à l'origine mais qui le deviennent au contact du sous-sol (après des réactions chimiques, catalyseurs, hautes pressions,
etc...) et 3_ les remontées de métaux lourds et radio-nucléides qui sont inoffensifs au fond mais posent problème à
l'extérieur. Sans compter évidemment la sismicité qui pose aussi des
problèmes. Tout ceci pour ne s'en tenir qu'au forage lui-même.
Il
y a aussi les transports des ingrédients nécessaires qui doivent être
acheminés en très grande quantité (eau,
sables, produits chimiques), l’entrepôt des importants déchets de la
fracturation et la transformation du produit de forage en gaz
utilisable par l'installation de nombreuses usines petites ou
grandes.
Cela fait déjà beaucoup dans des zones relativement peu peuplées, comme les États-Unis, on peut imaginer ce que ça
peut donner dans des régions aussi densément peuplées que la nôtre.
Permis de recherche Plaines du Languedoc :
En
fin connaisseur, il relève que, dans le sous sol karstique du Languedoc,
se
trouvent nombre de cavités souterraines et de failles ; ce sous-sol
est donc beaucoup plus fragile que dans des secteurs comme la
Pennsylvanie, qui est beaucoup moins accidentée, où pourtant la
fracturation pose déjà de gros problèmes pendant les forages. Aussi
il prévoit des acccidents importants et de nombreuses
conséquences néfastes dans les processus de forages si les
sols devaient être perforés. Des rejets peuvent avoir lieu dans les
nappes phréatiques dans des délais imprévisibles (plusieurs années voire
plusieurs décennies plus tard).
Dans notre région on a des preuves, dit-il, de communication entre des nappes pourtant éloignées. Sans qu'on
maîtrise pour autant l'architecture des sous sols.
Il
faut dire que – les préjugés scientistes étant bien ancrés - on a pu
entendre
des interventions du public suggérant que, de toute façon, quelles que
soient les nuisances, il fallait s'atteler aux problèmes de la production
d'énergie et qu'on trouverait bien pour extraire ces GdS
une solution aux problèmes posées par la fracturation hydraulique.
Certains en sont même venus à dire que les solutions sont (déjà) dans les cartons, il
suffirait de les en sortir. Position à laquelle M. Pistre
a répondu calmement qu'il opposait sa vision des choses à la vision des ingénieurs – qu'il avait souvent vus à
l’œuvre - selon laquelle de toute façon on aurait toujours une solution technique à tout.
Loin de négliger les
qualités des ingénieurs, il estimait, quant à lui, qu'il fallait rester
humbles devant les phénomènes qu'on ne maîtrisait pas vraiment. Il faut donc
dire qu'on a du mal à savoir ce qui se passe à 100 m de
profondeur et donc qu'à 800m ou 2000m il est impossible de connaître
les allées et venues de l'eau et des produits qu'on injecte. Personne
ne sait : ni lui ni les ingénieurs diligentés
par les entreprises de forages. Et prévoir qu'on va trouver une
solution, que c'est dans l'ordre des choses, qu'il ne peut en être
autrement, n'est pas du tout raisonnable(2). En d'autres termes,
la prudence est de rigueur.
(2) nous aurions jugé plus approprié un terme moins neutre : 'complétement délirant', par exemple.
Aux Etats Unis :
Les
retours actuels des USA – où il s'est rendu pour y prendre connaissance
de la situation – montrent que la
situation sanitaire se dégrade et les retours prochains seront sans
doute encore pires ( si, bien sûr, on laisse filtrer l'information ),
les cancers notamment augmentent autour des zones de
forages en raison de la proximité de ceux ci (notamment le nombre de
cancers du sein est en hausse, c'est le seul pays industrialisé où l'on
voit ça ! )
On a constaté des cancers fulgurants sur du bétail : des animaux meurent en une journée d'un cancer de la bouche après s'être
abreuvés des eaux de décantations.
Mais
ces informations obtenues ne doivent pas masquer le foisonnement
d'interdictions et de répressions qui se faufilent dans le
sillage de l'exploitation des GdS : l'interdiction a été prononcée
par arrêt de justice en novembre 2012 de faire des études
épidémiologiques sur l'impact des forages ; interdiction de
communiquer entre médecins ni de faire le lien entre maladies de
divers patients. En d'autres termes, il est interdit de faire des études
sur l'impact sanitaire de l'exploitation.(3)
Outre
ce que M. Pistre dénonce il faut aussi se souvenir que Josh Fox, auteur
du film Gasland, fut étiqueté comme terroriste par
le FBI ; on se rend compte à quel point le problème posé par les GdS
a des relents de police malfaisante et de politicaillerie agissante. En
tirant sur un fil du côté de l'intérêt financier
et économique des grosses entreprises foreuses on aboutit assez vite
aux mesures répressives organisées par des politiciens.
(3) Détail
sinistrement amusant : quand il demanda aux entreprises américaines
contactées si elles avaient fait une étude d'impact elles ont répondu
avec empressement qu'oui.
A la lecture il s'est aperçu que ces études n'avaient recherché que
l'impact économique de leur activité mais absolument rien concernant
l'impact sanitaire et
environnemental.
Acceptabilité
sociale :
Il
apparaît – d'après Séverin Pistre qui a été auditionné auprès
de la commission européenne sur le sujet – que le problème
fondamental que celle-ci se pose est : est ce que les GdS sont acceptés
par la population ? Et surtout : dans le cas contraire
comment fait-on pour les rendre acceptables ? La réaction dans le
sud de la France étonne encore les technocrates européens : les
populations ne sont pas encore assez assommées par le
mode de vie de plus en plus délirant auquel elles sont
assujetties..., semblent-ils penser. Aux USA certes, les gens qui sont
opposés aux GdS mettent un panneau devant leur maison pour le
signifier ou votent à l'occasion contre quand un vote est organisé
mais il n'y a pas (...encore ?) d'actions communes de protestation.
En
Roumanie après d'importantes manifestations contre les GdS (restées
assez peu médiatisées) il semblerait que
Hilary Clinton ait demandé aux autorités de laisser faire les
officines d'acceptabilité venues des USA afin que la population retrouve
sa sérénité et accepte l'exploitation des GdS. A chacun ses
méthodes : en France on a les Commissions Nationales de Débats
Publics et les commissions de dialogue. Cause toujours !
Et pendant que de nombreuses mesures sont prises par les
autorités pour empêcher les gens de constater les dégâts certains protestataires professionnels échafaudent de fines stratégies visant« ...à informer les autorités de l’état de la planète. »(Fondation Nicolas Hulot) comme
si les 'autorités' n'étaient pas assez au courant, comme si
l'information leur manquait ! Ils voudraient informer ceux qui ne
veulent pas l'être
ou plutôt qui n'ont que faire de discuter car ils ont déjà choisi
leur camp : la prolongation du système coûte que coûte. Et ces gens
poursuivent avec une volonté affichée
« ...d’effectuer un travail de veille quant aux connaissances scientifiques sur les enjeux environnementaux et d’en informer nos
représentants. » Alors
qu'aux USA on a interdit de divulguer des résultats d'études sur le
désastre environnemental, alors
que, dans les contrats qu'ils font signer, les foreurs interdisent
aux populations de divulguer des informations sur les fuites et autres
'accidents' de forage, alors qu'on interdit aux médecins
de recouper des diagnostics, etc. Où pourra-t-on bientôt chercher
des infos fiables pour étayer des 'connaissances
scientifiques' si
seules des études manipulées et tronquées par le pouvoir sont
utilisables ? Mais les petites têtes écologistes
n'en ont cure. Assurés qu'ils sont qu'au final ils auront convaincu
les politiciens (...ou mieux, ils prendront leur place ?! ).
Aujourd'hui
l'offensive des promoteurs des GdS est intense. La
population – bien que peu engagée directement – refuse globalement
le sort qui lui est fait ; nous verrons si le jour où les foreurs
passeront à l'acte le réveil a lieu ou
pas.
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