Plus qu’avec l’islam la France a un problème avec son
histoire coloniale et avec son inconscient catholique qui n’aime guère
toutes ces minorités qui surgissent
NTERVIEW Stéphane Lavignotte, Pasteur
Les soubresauts hexagonaux autour du conflit à Gaza et la violente bataille sur le mariage pour tous accréditent l’hypothèse de crispations religieuses et communautaires en France. Théologien et pasteur protestant, engagé à gauche, Stéphane Lavignotte plaide dans Les religions sont-elles réactionnaires ? - essai qui sort aujourd’hui - pour une approche banalisée du fait religieux, objet social, de son point de vue, comme un autre, qui doit être pensé avec les outils des sciences humaines et de l’histoire. Pour lui, la religion peut devenir aussi bien réactionnaire que révolutionnaire.
La société française a-t-elle un contentieux avec les religions ?
La France se raconte surtout une histoire, celle d’une déchristianisation massive. La plupart des Français, y compris les croyants, sont persuadés que ceux qui croient constituent une petite minorité. La réalité est très différente : environ 56% des Français déclarent toujours croire en Dieu, seulement 10 points de moins qu’en 1946. Pourtant, on aurait pu imaginer une baisse massive liée au mouvement de Mai 68, de la société de consommation ou encore des affaires de pédophilie dans les Eglises. Pour autant, la société française n’est plus une société croyante car la foi est désormais une démarche individuelle et les sociologues des religions décrivent une sortie des institutions. Individuellement, chacun est au placard avec sa foi. J’emploie sciemment l’expression «être au placard», j’ai beaucoup travaillé sur les questions gays, lesbiennes et trans (LGBT). J’ai l’impression que, dans ce pays, les croyants cachent leur foi et redoutent qu’elle soit, d’une certaine manière, découverte. Cliquer ici
A lire aussi
Extrait : Tout en restant matérialiste, athée et adversaire irréconciliable de
la religion, Engels comprenait, comme le jeune Marx, la dualité de
nature de ce phénomène : son rôle dans la légitimation de l’ordre
établi, aussi bien que, les circonstances sociales s’y prêtant, son
rôle critique, contestataire et même révolutionnaire. Plus même, c’est
ce deuxième aspect qui s’est trouvé au centre de la plupart de ses
études concrètes. En effet, il s’est penché d’abord sur le christianisme
primitif, religion des pauvres, exclus, damnés, persécutés et opprimés.
Les premiers chrétiens étaient originaires des derniers rangs de la
société : esclaves, affranchis privés de leurs droits et petits paysans
accablés de dettes. Engels alla même jusqu’à établir un parallèle
étonnant entre ce christianisme primitif et le socialisme
moderne. La différence essentielle entre les deux mouvement résidait en
ce que les chrétiens primitifs repoussaient la délivrance à l’au-delà
tandis que le socialisme la plaçait dans ce monde.
Mais cette différence est-elle aussi tranchée qu’elle apparaît à
première vue ? Dans son étude d’un deuxième grand mouvement chrétien -
la guerre des paysans en Allemagne - elle semble perdre de sa netteté :
Thomas Münzer, le théologien et dirigeant des paysans révolutionnaires
et des plébéiens hérétiques du XVIe siècle, voulait l’établissement immédiat du Royaume de Dieu, ce royaume millénariste des prophètes, sur la terre.
D’après Engels, le Royaume de Dieu était pour Münzer une société sans
différences de classe, sans propriété privée et sans autorité de l’Etat
indépendante ou étrangère aux membres de cette société.
Par son analyse des phénomènes religieux à la lumière de la lutte des
classes, Engels a révélé le potentiel contestataire de la religion et
ouvert la voie à une nouvelle approche des rapports entre religion et
société distincte à la fois de celle de la philosophie des Lumières et
de celle du néo-hégélianisme allemand. Cliquer ici
"Tant que je disais qu'il fallait aider
les pauvres, on me considérait comme un saint ; quand j'ai demandé
pourquoi il y avait tellement de pauvres, on m'a traité de
communiste..." (cardinal brésilien dom Helder Camara) Lire : La vraie Eglise des pauvres, par Michael Löwy)
NPA 34, NPA