Avec 10% de chômage, une croissance en recul permanent, une société
gagnée au pessimisme et anxieuse, se développe en France un sentiment
irrationnel d'être assiégés. Celui-ci se manifeste sous la forme policée
d'une revendication à la laïcité. Dans ce contexte, Elisabeth Badinter,
intellectuelle hautement estimée se réclamant du féminisme, tente de
faire de l’islamophobie un droit élémentaire.
Mercredi 6 janvier, Elisabeth Badinter tenait les propos suivants au cours de la matinale de France Inter : « Il faut s’accrocher et il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d’islamophobe, ce qui a été pendant pas mal d’années le stop absolu, l’interdiction de parler et presque la suspicion sur la laïcité ».
Passée la stupeur d’entendre une figure intellectuelle respectée revendiquer son islamophobie (tout comme Michel Houellebecq l’avait fait en septembre dernier dans une interview au Guardian), on peut raisonnablement s’interroger sur les récentes capacités d’écoute de l’auteur de L’Amour en plus. Il y aurait un « stop absolu » à l’islamophobie ? Une « interdiction de parler » imposée aux islamophobes ? Cliquer ici
Quelle est la place des musulmans en France et comment se situent-ils dans la société, à l’heure de l’organisation de l’État islamique ? Assiste-t-on à l’émergence d’une nouvelle génération djihadiste dans les banlieues ? Le salafisme occupe-t-il une place prépondérante désormais dans ces « territoires perdus » de la République ? Autant de questions qu’aborde Gilles Kepel et auxquelles il apporte des réponses souvent contestables. Cliquer ici
On réduit souvent la laïcité à la neutralité. Il s’agit d’une
double erreur. D’une part, car, comme je l’ai expliqué, il y a
plusieurs paramètres dans la laïcité et celle-ci est faite d’un
équilibre entre ces différents paramètres. Dans ces paramètres, la
neutralité constitue un moyen et non une fin en soi. Etant donné que
c’est un moyen, il ne s’agit pas de neutralité de l’espace public, car
cela deviendrait une fin, mais de neutralité de la puissance publique,
qui doit pouvoir jouer son rôle d’arbitre. Dans un match, c’est
l’arbitre qui est neutre, non les joueurs. Si on confond neutralité et
laïcité, on fait glisser la neutralité de l’arbitre aux joueurs, c’est à
dire aux acteurs de la société civile, aux citoyens. On risque alors de
glisser vers un athéisme d’Etat ou du moins vers des discriminations
antireligieuses, parce que ce ne seront pas forcément toutes les
religions qui seront visées. Cliquer ici
Mercredi 6 janvier, Elisabeth Badinter tenait les propos suivants au cours de la matinale de France Inter : « Il faut s’accrocher et il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d’islamophobe, ce qui a été pendant pas mal d’années le stop absolu, l’interdiction de parler et presque la suspicion sur la laïcité ».
Passée la stupeur d’entendre une figure intellectuelle respectée revendiquer son islamophobie (tout comme Michel Houellebecq l’avait fait en septembre dernier dans une interview au Guardian), on peut raisonnablement s’interroger sur les récentes capacités d’écoute de l’auteur de L’Amour en plus. Il y aurait un « stop absolu » à l’islamophobie ? Une « interdiction de parler » imposée aux islamophobes ? Cliquer ici
Quelle est la place des musulmans en France et comment se situent-ils dans la société, à l’heure de l’organisation de l’État islamique ? Assiste-t-on à l’émergence d’une nouvelle génération djihadiste dans les banlieues ? Le salafisme occupe-t-il une place prépondérante désormais dans ces « territoires perdus » de la République ? Autant de questions qu’aborde Gilles Kepel et auxquelles il apporte des réponses souvent contestables. Cliquer ici
Pour ne pas laïciser idiot ! - 1 -
En 2003 la mystification de Caroline Fourest et Fiammeta Venner largement relayée à gauche comme à droite : Le mot “islamophobie” a une histoire, qu'il vaut mieux
connaître avant de l'utiliser à la légère.
Il a été utilisé en 1979, par les mollahs iraniens
qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter
le voile pour de "mauvaises musulmanes" en les accusant
d'être "islamophobes". Il a été réactivité
au lendemain de l'affaire Rushdie, par des associations islamistes
londoniennes comme Al Muhajiroun ou la Islamic Human Rights Commission
dont les statuts prévoient de “recueillir les informations
sur les abus des droits de Dieu”. Cliquer ici
On doit l’invention du néologisme « islamophobie » et ses premiers usages à un groupe d’« administrateurs-ethnologues » spécialisés dans les études de l’islam ouest-africain ou sénégalais : Alain Quellien, Maurice Delafosse et Paul Marty. […] Au début du XXe
siècle, la connaissance de l’islam apparaît comme une nécessité pour
les administrateurs coloniaux qui souhaitent préserver la domination
impériale sur les populations musulmanes colonisées. Dans un article de 1910 sur l’état de l’Islam en
Afrique occidentale française, Delafosse dénonce la composante de
l’administration coloniale affichant ouvertement son hostilité à
l’encontre des musulmans et de la religion musulmane.
« Quoi qu’en disent ceux
pour qui l’islamophobie est un principe d’administration indigène, la
France n’a rien de plus à craindre des Musulmans en Afrique occidentale
que des non-Musulmans. (…) L’islamophobie n’a donc pas raison d’être
dans l’Afrique occidentale, où l’islamophilie, dans le sens d’une
préférence accordée aux Musulmans, créerait d’autre part un sentiment de
méfiance parmi les populations non-musulmanes, qui se trouvent être les
plus nombreuses. L’intérêt de la domination européenne, comme aussi
l’intérêt bien entendu des indigènes, nous fait donc un devoir de
désirer le maintien du statu quo et de garder une neutralité absolue
vis-à-vis de tous les cultes.» Cliquer ici
Pour ne pas laïciser idiot ! - 2 -
L’islamophobie est à l’évidence un instrument de pouvoir. Il s’agit
d’une façon relativement récente – elle date de deux ou trois décennies –
de reformuler le racisme d’antan. Il s’agit, en d’autres termes, d’un
encodage. Là où l’on parlait des « Arabes », on parlera des
« musulmans ». Là où l’on disait vouloir défendre la « civilisation
chrétienne », on privilégiera désormais les supposées « valeurs de la
République française ». Toute une série de grandes « valeurs », un peu
trop facilement qualifiées de « françaises », sont ainsi mobilisées – au
sens quasi militaire du terme – pour ériger et maintenir une barrière
symbolique qui sépare « eux » et « nous » : la laïcité, la condition des
femmes, la liberté d’expression, etc. Tout ce discours, qui a émergé
dans les années 1980, au moment où les élites françaises découvraient
les « Français issus de l’immigration », systématiquement décrits comme
des Français de seconde zone car « culturellement différents »,
fonctionne comme un code qui permet de dire le racisme sans le dire
explicitement. Cet encodage, cette façon de dire sans dire, est la
marque de fabrique de l’islamophobie : c’est cela qui a permis de
régénérer le racisme dont on disait, dans la période qui a immédiatement
suivi la décolonisation, qu’il était condamné à disparaître.
[…]
[…]
Il suffit de regarder les résultats des sondages régulièrement effectués
sur le « sentiment des Français à l’égard de l’Islam », notamment dans
les périodes marquées par des attentats, pour comprendre que
l’islamophobie est un moyen assez puissant de « rassembler les
Français ». C’est aussi un moyen pour les responsables politiques de
gagner des élections et, pour certains journalistes, de gagner de
l’argent. Quelques années après la publication des caricatures danoises
du prophète Mohammed par Charlie Hebdo en 2006, on a appris que son directeur de l’époque, Philippe Val, avait empoché 330 000 euros à titre personnel.
[…]
[…]
Ce que révèlent enfin les portraits qui sont faits des « musulmans » en
France, c’est l’incroyable trahison historique de la gauche de
gouvernement. Élu sur un programme progressiste en 1981, le Parti
socialiste français n’a cessé de trahir ses promesses électorales et de
saper les efforts des organisations antiracistes. Sans entrer dans le
détail, on peut citer un exemple flagrant : depuis quarante ans, le
Partis socialiste se fait élire en promettant le droit de vote aux
étrangers vivant en France et, à chaque fois qu’il est élu, il renie
cette promesse. Aujourd’hui, le gouvernement « socialiste » installé par
François Hollande et dirigé par Manuel Valls – qui avaient eux aussi
promis le droit de vote aux étrangers et qui se sont eux aussi reniés – a
instauré un régime d’« état d’urgence » qui n’est rien d’autre que la
réplique de l’état d’exception que le gouvernement français avait
instauré en France dans les années 1950 pour éradiquer les
indépendantistes algériens pendant la guerre d’Algérie. Vous parliez de
« rupture » tout à l’heure ; je pense de mon côté que les continuités
sont assez révélatrices… Cliquer ici
Pour ne pas laïciser idiot ! - 3 -
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