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Catalogne. Réflexions tactiques et stratégiques pour la République...



10 mars

Réflexions tactiques et stratégiques pour la République...

 Ne pas se tromper sur les rythmes de la remobilisation : ni attentisme ni précipitation !


On peut accepter que le gouvernement effectif qui peut exister dans l’immédiat soit de nature autonomiste, à condition que, dans le même temps, la lutte pour défendre les besoins économiques, sociaux, démocratiques et culturels de la population soit engagée dans le but de conquérir la République. Ce qui me semble décisif, c’est de promouvoir un plan de lutte des mouvements et des entités sociaux, mais qui n’attend pas ce que dira le gouvernement, Par contre, qui formule des revendications, qui encourage la désobéissance et l’action unilatérale quand cela est nécessaire, qui conduise vers une mobilisation plus massive et auto-organisée que celle du 1er octobre, avec un contenu national, démocratique et social et qui travaille désormais activement à la solidarité active des peuples de l’Etat espagnol (sur la base de l’opposition au régime monarchique et en faveur de la défense de la République) et de l’Europe. Cela semble difficile et l’est certainement, mais nous avons déjà fait l’expérience que, parfois, les choses qui sont présentées comme faciles – comme le passage à l’indépendance «depuis la loi à la loi» – sont les moins réalistes. Cliquer ici

L'attitude devant la "Justice" espagnole : des choix politiques à faire...

Il ne s’agit pas de faire des comparaisons simplistes. Ni de prétendre qu’en toutes les époques historiques ou toutes les situations politiques, il faut faire la même chose ou quelque chose de semblable. Il s’agit d’être conscients que la lutte devant le tribunal est une partie de la lutte générale, qu’il est possible de le faire de manière offensive, en défendant le processus de mobilisation pour l’autodétermination et l’indépendance, en dénonçant que l’Etat espagnol est incapable d’accepter un référendum et toute décision démocratique qui permette au peuple catalan de décider de son futur et de sa relation avec les autres peuples et que les prisonniers politiques ne sont rien d’autre que des otages d’un régime en crise. Il est encore temps de rectifier. Tant que continue la mobilisation pour libérer les prisonniers politiques, le procès pourra être l’occasion de le convertir en un haut-parleur républicain contre la dérive autoritaire de la monarchie.

Certes, dans les exemples que nous avons mentionnés, il s’agissait de révolutionnaires alors que parmi les secteurs dirigeants de la rébellion catalane, les révolutionnaires n’abondent vraiment pas. C’est peut-être une des faiblesses du mouvement républicain catalan. Mais ce sont les dirigeants qu’il y a et que le peuple a élus à sa tête. D’autres, qui, y compris, se nomment de gauche, restent à l’arrière-garde, quand ils devraient pour le moins être des démocrates conséquents et des défenseurs des libertés, de la liberté des prisonniers et du droit démocratique à l’autodétermination. Cliquer ici

9 mars

Plus que jamais, la Justice espagnole aux ordres (se) fait la loi !

Le Juge, le prisonnier et le parlement catalan ou le triangle des Bermudes de la démocratie espagnole : quand le "système" ne respecte même plus sa propre légalité !




Les lignes ci-dessous, traduites de l'espagnol, portent sur la décision du juge Llarena, du Tribunal Suprême, de refuser la libération de Jordi Sánchez, le président de l'ANC, détenu depuis plus de quatre mois en préventive pour sa participation au processus indépendantiste entamé en septembre de l'an passé. Cette libération a été demandée par le Président du Parlement catalan pour que cette personnalité puisse être proposée à l'investiture, par ledit Parlement issu de l'élection du 1er décembre, de la Présidence de la Généralité qui est l'organe constitutionnel du gouvernement de l'Autonomie catalane. Le refus de cette libération revient à empêcher que cette investiture ait lieu. Ce que le juriste, auteur des lignes qui suivent, déclare en contradiction flagrante avec les "fondements de la démocratie parlementaire espagnole". Il est évident que le titre donné à ce billet ne peut qu'être ironique : un magistrat, qui plus est à un poste aussi sensible, ne saurait ignorer ce qu'est la loi. Le constat simple est que, dans l'Etat espagnol, la Justice bafoue impunément, en toute connaissance, la loi !

Ignorance inexcusable
(extrait)


En Démocratie Parlementaire, le Parlement est le seul organe constitutionnel à avoir la liberté. Il est le seul organe à ne pas « exécuter » le droit, il est le seul à « créer » le droit.  Il est limité par la Constitution mais il n’exécute pas la Constitution, il créé du droit librement dans cette limite. Il a, comme le dit le Tribunal Constitutionnel, la « liberté de configuration ». Personne d’autre que lui n’a cette liberté. 

Et cette « liberté de configuration » se manifeste avant tout dans la transmission de la légitimité démocratique au Gouvernement via l’investiture du Président [dans l’Etat espagnol : chef du gouvernement que nous appelons en France, au niveau institutionnel le plus élevé, Premier Ministre (1)]. Nous avons là la plus haute expression de ce qu’est « la liberté de configuration ». Le Parlement et seul le Parlement peut, suite à la tenue d’élections, décider, dans la limite de ce qui est établi par la Constitution, de la façon de transmettre cette légitimité démocratique, dont il est porteur, au président du Gouvernement. 

Pour ce qui est des Communautés Autonomes [les Régions espagnoles], la limite qu’impose le bloc de la constitutionnalité est que le candidat proposé par le Président du Parlement à l’investiture du Président du Gouvernement soit député et qu’il ne soit pas privé de l’exercice du droit de vote. Dans le respect de cette double limite, il est impossible d’interférer de l’extérieur du Parlement dans le processus d’investiture.  

Agir dans un sens contraire à ces dispositions induit la négation du principe de la légitimité démocratique, du principe de l’autonomie parlementaire et du principe de la division des pouvoirs et, en outre, bafoue le droit de vote passif [droit d’éligibilité] du candidat proposé et du droit de vote actif [ce que l’on appelle communément le droit de vote] exercé par tous les citoyens catalans qui ont participé aux élections du 21 décembre dernier. 

Il est effrayant que jouisse du statut de Magistrat du Tribunal Suprême un citoyen qui démontre méconnaître de façon aussi scandaleuse les fondements de la démocratie parlementaire espagnole. L'intégralité du texte en espagnol est ici

Traduction NPA 34 

(1) Note NPA 34 : Il existe statutairement le poste de conseller en cap (littéralement "conseiller", ministre, en chef) ou conseller primer qui, a priori correspondrait plus à ce que nous appelons en français "premier ministre", soit chef de gouvernement. Cette charge a été effective jusqu'en 2006, l'Etatut, le statut d'autonomie catalane entré en vigueur cette même année, précisant qu'elle n'est pas obligatoire. De fait, aujourd'hui, c'est bien le President en titre de l'Autonomie catalane, avant sa destitution Carles Puigdemont, qui assumait cette fonction correspondant à "presidente de gobierno" qui est le  nom donné à la fonction qu'exerce Mariano Rajoy, l'alter ego institutionnel de "notre" Edouard Philippe . 

Nous avons écrit sur le sujet...

 Extrait

  Dans le cadre répressif de haute intensité [qui prévaut dans l'Etat espagnol], la dépendance politique de la Justice espagnole, en particulier de ces trois piliers que sont le Tribunal Constitutionnel, le Tribunal Suprême et, en vrai héritage quasi direct, du Tribunal d’Ordre Public franquiste, la Audiencia Nacional, tient une place de premier plan pour faire que ceux-ci « mettent les mains dans le cambouis » d’un arbitraire sur lequel, dans une efficace répartition des tâches, la Constitution, texte sacré que personne du commun ne lit, a pour fonction de faire écran…démocratique. [...]

 
Si on considère la lettre de l’article 155 [par lequel le Gouvernement de Madrid a pris le contrôle politique de la Catalogne], on finit de cerner l’habileté par laquelle la Constitution pose la noblesse de ses postulats, détachée des modalités concrètes de leur application, laissant aux politiques et à la « justice » le loisir de les interpréter à leur guise et en fonction des intérêts immédiats qui sont évidemment les intérêts inscrits en continuité entre le franquisme et la démocratie : ceux du capital espagnol (et catalan), sous la modalité d’un enrichissement par corruption atteignant des sommets inégalés en Europe.  Un professeur de droit constitutionnel et ancien membre du Tribunal Constitutionnel en est arrivé, malgré tout, à mettre en évidence … l’inconstitutionnalité de l’application qui a été faite du 155. Le point de départ de son raisonnement est la disposition hiérarchique des articles de la Constitution : l’article 2, qui stipule le droit d’autogouvernement des nationalités de l’Etat espagnol, pose les bases de la répartition territoriale des pouvoirs et le 155 n’est, lui, qu’un article établissant le cas exceptionnel par lequel, de manière provisoire et sous toute une série de contraintes, l’autogouvernement en question peut être suspendu. Or, selon ce juriste, si les mesures d’annulation des lois par lesquelles le Parlament catalan ouvrait la voie à la déclaration d’indépendance, sont respectueuses de la Constitution, il n’en va pas de même de la dissolution du Parlament lui-même et donc du pouvoir de convoquer de nouvelles élections qui constitutionnellement sont du ressort du seul President de la Généralité. Dans l’application du 155 à la Catalogne, il y a donc eu, entre autres anomalies graves relevées par ce juriste, usurpation de pouvoir et ce qu’il qualifie de « loufoquerie  constitutionnelle ». La conclusion de cette tribune est sans appel qui parle de la « carte blanche » que s’est donnée le gouvernement central pour usurper les compétences de toute communauté autonome  avec laquelle il aurait des divergences. [...] 

La Constitution espagnole s’accommode parfaitement des inconstitutionnalités qui se revendiquent d’elle : ni le Roi, supposé garant de cette Constitution ni le Tribunal Constitutionnel, supposé son gardien orthodoxe, ne se sont émus de l’anomalie relevée dans l’utilisation du 155. Disons même qu’ils l’ont ouvertement cautionnée ! Et, pour cause, l’un et l’autre, étaient trop occupés à prêter main forte à cette transgression démontrant en acte que cette Constitution est, de fait, un des éléments de défense d’un Etat pour qui la démocratie c’est, avant tout, ce qui, sans plus avoir l’hégémonie politique d’antan mais dans la recherche d’une recentralisation autoritaire de temps de crise, permet d’asseoir le pouvoir économique et social de quelques uns sur des millions d’autres.

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En 2015, écrit la professeure de droit M. Eugenia R. Palop, le PP, fort de sa majorité absolue, réforma le Tribunal constitutionnel (TC) pour le doter de « pouvoirs de sanction inouïs, sans en définir le contenu, sans limite de temps, dans le seul but de "discipliner" les Communautés autonomes qui ne se soumettraient pas à ses sentences ». Ce fut en fait une réforme taillée spécialement pour contrer le « procés »  catalan. Pour cette professeure les choses sont claires, cette réforme a transformé le TC en un Tribunal d’ordre public (rappelons que c’était le nom du tribunal d’exception du franquisme), « dépourvu de tout prestige, sans le moindre semblant d’impartialité et d’indépendance » (« El 155 y el estado de excepción permanente », eldiario.es, 13 décembre 2017, http ://www.eldiario.es/zonacritica/excepcion-pe...).

Tiré de 155, v’là la Constitution « démocratique »… 



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