Philippe Poutou, une parole en phase avec l'effervescence combative du moment...
La réunion avec Philippe Poutou et Béatrice Walylo, dans le
cadre du cycle de nos réunions publiques mensuelles « Résister à l’air du
temps », nous a amenés, via
l’association PAC (Penser Agir Comprendre),
à faire le pari qu’elle devait se tenir plus au large que d’habitude (soit dans
notre local NPA 34), dans une grande salle du centre ville. C’était un pari
risqué car, si précisément l’air du temps s’est socialement et politiquement
réchauffé en faveur de notre camp social, il n’était pas évident que la
réticence, voire la méfiance populaire qui spontanément s’exprime envers les
partis, épargne une initiative autour de la figure de notre porte-parole
national. Mais il n’en a rien été, bien au contraire, la présence de plus de
130 personnes à cette rencontre nous confirme, comme cela a été développé par
Philippe dans le cours de la soirée, que le mouvement des Gilets Jaunes,
puisque c’est essentiellement de lui qu’il s’agit, a créé, au fur et à mesure
de son installation iconoclaste dans le paysage social, un climat général de
politisation radicale. Et, par là-même, un intérêt soutenu pour ce qu’un parti
comme le NPA défend très à contre-courant de l’offre politique
institutionnelle, dans laquelle est prise, y compris, une partie de la gauche
qui se réclame du changement !
L’intervention de Philippe a, au demeurant, mobilisé, comme d’habitude, les codes du discours se refusant à la langue de bois politicienne. Son parler sans faux-fuyant, chargé de l’humilité mais aussi de l’humour et de la détermination de l’ouvrier qui, sans complexe, se mêle de politique en faisant valoir une analyse précise de la situation du moment, a eu plus d’écho que de coutume, nous a-t-il semblé, parmi les présent-es.
A partir de la présentation du livre Ford Blanquefort !, même pas morts qu’ils ont coordonné,
Philippe et Béatrice ont dessiné ce qu’a été la longue lutte qui s’est déroulée
dans l’usine pour la défense des 800 emplois contre la multinationale
américaine, gavée jusqu’au bout d’aides financières publiques. Mais il était
dit que cette soirée allait être décalée jusqu’au paradoxe puisque Philippe
nous a d’emblée informés que … les Ford c’était fini, l’information venait de
tomber, la liquidation de l’usine était
inéluctable. Même pas morts, en fait si, il fallait s’y résoudre car la capacité
de riposte ouvrière n’avait pas été au rendez-vous de cette séquence décisive.
Notre camarade n’a pas caché le coup dur que cela signifie pour la poignée de
militants syndicaux qui avaient tout tenté pour résister et la tristesse
évidemment d’avoir échoué même s’il y avait peut-être quelque chose à gratter
encore… Comme le débat, qui a suivi les interventions des orateurs, l’a montré,
certains ont accusé le coup dans la salle mais Philippe, sollicité sur ce
point, a, sans rien cacher de la déception ressentie, réussi à l’inscrire dans
un cadre analytique où la lucidité incontournable sur ce qui fait mal reste
accrochée au repérage de tout ce qui dit que la lutte continue : ailleurs
et sous diverses modalités mais avec le fil rouge qu’une bataille, des
batailles, même perdues ne signifient pas que la « guerre » est
perdue. Et cela, pour peu (mais c’est beaucoup) que se travaillent les
questions de convergence des mobilisations par-dessus les obstacles, y compris
ceux mis par les directions syndicales, en mutualisant les leçons sur les
raisons des échecs. Il y avait dans ce discours quelque chose comme l’écho gramscien
du célèbre « pessimisme de l'intelligence allié à
l'optimisme de la volonté » !
L’analyse, proposée par Philippe, du
mouvement des Gilets Jaunes aura, d’ailleurs, permis de tenir la ligne de crête
de l’optimisme raisonné et raisonnable en retenant d’abord son apport
fondamental : sa capacité à défier le pouvoir, à le déstabiliser et même à
le mettre sur la défensive, ce que, il faut le rappeler, les mobilisations
« classiques », contre les lois travail en particulier, n’auront pas
pu ou su faire. Il ne s’agit pas bien sûr d’idéaliser ingénument un mouvement
qui, tout en allant résolument de l’avant, se cherche et n’a pas encore trouvé
le débouché lui permettant de pousser l’avantage, d’élargir sa base, de faire
sa rencontre décisive avec les secteurs du mouvement ouvrier disponibles pour
en découdre, en somme d’approfondir ce qui s’est à peine esquissé le 5 février
dernier, une articulation de la mobilisation de rue et celle des lieux de
travail où la grève cible enfin le cœur de l’économie. Mais considérons déjà que
le travail du négatif à l’œuvre contre le monde macron-capitaliste est un
acquis majeur de ce mouvement.
Si notre camarade a clairement pointé
la tentative par le pouvoir et les médias dominants de criminaliser la révolte
en jaune en instrumentalisant contre elle un incident antisémite, qui s’est
produit en marge de la dernière manifestation parisienne, il n’en reste pas
moins que celui-ci est totalement condamnable et que l’antisémitisme, à l’égal
de tous les racismes et discriminations, appelle condamnations et
mobilisations.
On a senti, tout au long de la réunion,
une salle attentive au discours de nos camarades, réceptive à l’intervention du
Comité Jeune du NPA, posant des questions sur la nécessité, mais sous quelle
forme, du débouché politique, celle aussi de l’unité, au moins de ce qui se
réclame de la gauche. Philippe aura, sur ce point, souligné l’obstacle que représente
pour un mouvement social déterminé à aller jusqu’au bout de sa logique,
l’horizon électoral (Européennes en vue) immanquablement traité sur le mode
électoraliste avec l’obsession de la liste de candidats à établir, de la
campagne de terrain à préparer, des programmes à bichonner qui, au mieux,
n’engagent à rien … Très vite, cette gauche fait ou fera prévaloir que l’urne
vaut plus que la rue… Ce qui, cela a été rappelé, ne vaut pas pour un NPA qui,
s’il participe à une élection, y défend que le centre de gravité du changement,
autant dire de la rupture anticapitaliste, à commencer vis-à-vis du jeu pipé
des bulletins de vote, est ce que, avec une remarquable ténacité, les Gilets
Jaunes démontrent en acte : Macron et sa bande prennent peur, la preuve
par leur terrible brutalité policière, quand, par la rue se trouve déréglé
l’ordonnancement … policé et balisé des choses qui font leur domination…
Bilan à tout point de vue positif et
encourageant de cette réunion, entre autres, par la forte présence de jeunes,
aux côtés de salarié-es, dont ceux et celles de Sanofi, et, au total, par le
nombre de personnes venues pour la première fois écouter ce que le NPA a à dire
sur la situation et, pour certain-es,
souhaiter garder le contact avec lui, voire adhérer !
Enfin nous remercions nos ami-es kurdes, antinucléaires d’ADN 34 (Arrêt du Nucléaire 34) ou de BDS qui ont répondu à notre invitation à tenir une table de leur presse.
Enfin nous remercions nos ami-es kurdes, antinucléaires d’ADN 34 (Arrêt du Nucléaire 34) ou de BDS qui ont répondu à notre invitation à tenir une table de leur presse.
Nous posterons prochainement sur ce site la vidéo de la soirée.