Jeudi 26 septembre 2019, mise à jour Jeudi 26 septembre 2019, 15:44
Jacques Chirac est mort. Nous comprenons bien évidemment la douleur, sincère, de ses proches et de sa famille en deuil.
Mais
la profusion des déclarations, communiqués et reportages apologétiques,
qui peignent l’ancien Président de la république en champion de la
lutte contre la pauvreté, de l’amitié entre les peuples et de la défense
des « valeurs de la république », a quant à elle de quoi donner la
nausée.
« Ce n’est pas le moment de faire de la
politique, il faut respecter le temps du deuil », disent-ils toutefois,
comme si cette déferlante pro-Chirac n’était pas elle-même très
politique. Nous avons cependant compris le message et, en vertu de cette
étrange trêve, nous mettrons de côté notre appréciation de la vie et de
l’œuvre de Jacques Chirac.
Nous n’évoquerons donc pas
les affaires (emplois fictifs, marchés publics, HLM, faux électeurs,
frais de bouche, voyages, etc.), symptomatiques d’une « certaine idée de
la politique ».
Nous ne reviendrons pas non plus sur
la reprise des essais nucléaires en 1995, aberration écologique, fuite
en avant militariste et symbole d’une attitude néocoloniale à l’égard de
la Polynésie.
À ce dernier propos, nous ne parlerons
pas du massacre de la grotte d’Ouvéa, en mai 1988, au cours duquel 19
indépendantistes kanaks furent tués lors d’un sanglant assaut ordonné
par Jacques Chirac, alors Premier ministre.
Ce n’est
pas non plus le moment de se souvenir des déclarations de Chirac, le 19
juin 1991, sur « le bruit et l’odeur » des étrangers, illustration
précoce de la reprise par la droite dite « républicaine » des
thématiques les plus nauséabondes du Front national.
Nous
ne mentionnerons pas davantage la participation active de Jacques
Chirac à l’entretien des réseaux de la Françafrique, illustrée notamment
par ses belles amitiés avec les dictateurs Omar Bongo, Blaise Compaoré
ou Denis Sassou Nguesso.
Nous ne reviendrons pas plus
sur ses politiques favorables aux ultra-riches (privatisations de 65
groupes industriels et financiers et suppression de l’ISF en 1986…) et
destructrices pour les salariéEs (suppression de l’autorisation
administrative de licenciement en 1986, plan Juppé de 1995, réforme des
retraites en 2003…).
Nous ne parlerons pas, enfin, de
ses ministres de l’Intérieur, Charles Pasqua, Jean-Louis Debré, Nicolas
Sarkozy, de leurs politiques répressives et racistes, du sort réservé
aux sans-papiers de Saint-Bernard en 1996 ou de l’assassinat de Malik
Oussekine en 1986.
Bref, Jacques Chirac est mort et
nous ferons preuve, comme tous ceux qui s’expriment en boucle sur les
chaînes d’information et les réseaux sociaux depuis ce midi, de
retenue.
Montreuil, le 26 septembre 2019.